Politique provinciale : l'échec de M. Dumont

Quel avenir pour les tiers-partis


Ce n'était un secret pour personne, l'ADQ et son chef s'étaient rangés derrière les troupes de Stephen Harper pour faire élire le plus de conservateurs possible au Québec. Le vrai secret, c'est que M. Dumont identifiait les intérêts du Québec à ceux de Stephen Harper, qui n'a pourtant jamais caché son opposition aux revendications traditionnelles du Québec.
Tant dans les comtés qu'au plus haut niveau de l'organisation du Parti conservateur, les gens de l'ADQ avaient fait le pari que l'élection d'un grand nombre de députés conservateurs au Québec constituait un bon moyen de préparer les prochaines élections provinciales.
On connaît les rapprochements idéologiques entre ces deux formations de droite; on sait aussi que l'un des principaux conseillers de M. Harper pour le Québec, M. Dimitri Soudas, est issu des rangs de l'ADQ, ce qui facilitait les contacts. Il n'était donc pas surprenant que les deux chefs aient conclu un accord de réciprocité en matière d'organisation, leur clientèle cible respective habitant les mêmes circonscriptions.
Cela dit, cette concordance d'intérêts stratégiques, voire idéologiques, n'exigeait certainement pas que l'ADQ pousse le bouchon jusqu'à renier l'un des éléments les plus percutants de son discours politique des dernières années, celui de «l'autonomisme», pour reprendre le terme cher à M. Dumont. Or, c'est ce qui ressort avec force des critiques acidulées portées par le chef de l'opposition à l'endroit du premier ministre Charest, au lendemain des élections.
En accusant les libéraux québécois d'avoir «sauvé le Bloc» par leurs interventions répétées défavorables aux conservateurs au cours de la campagne, M. Dumont vient de négocier un virage très dangereux pour sa propre image de parti nationaliste - pardon, autonomiste!
Il est juste de prétendre que M. Charest et certains de ses ministres ont profité de la campagne fédérale pour se poser en défenseur des intérêts du Québec. L'ardeur mise à l'opération avait même de quoi surprendre compte tenu de l'intérêt mitigé manifesté par M. Charest pour ces questions au cours de ses premières années à la tête du Québec.
Mais voilà, les choses ont changé depuis qu'il est devenu le premier ministre d'un gouvernement minoritaire. M. Charest a enfin compris qu'il n'était pas dans l'intérêt du Parti libéral, ni dans le sien, de laisser tout le terrain de la cause nationale aux souverainistes et aux autonomistes. Pour reconquérir l'électorat francophone, M. Charest se doit de bien le représenter auprès des autorités fédérales, comme l'ont fait la plupart des premiers ministres libéraux avant lui. Que ce changement d'orientation soit sincère ou non, qu'il soit temporaire ou permanent, pour le moment, il va tout à fait dans le sens des intérêts du Québec, qui auront toujours besoin d'être défendus par celui qui occupe la plus haute fonction à l'Assemblée nationale, de quelque parti qu'il soit.
En manifestant autant de dépit à l'endroit du chef du gouvernement, qu'il accuse d'avoir nui à l'élection de députés conservateurs, M. Dumont oublie qu'un seul électeur sur quatre au Québec a voté Harper. Et si les électeurs n'ont pas choisi M. Harper, c'est qu'ils ont jugé que ce dernier n'était pas le mieux placé pour défendre les intérêts du Québec à Ottawa. Et ce n'est pas Jean Charest qui est responsable de cet état de fait!
Si M. Dumont mettait de côté ses propres frustrations stratégiques devant un échec dont sa propre organisation est elle-même en partie responsable, il réaliserait vite que sa sortie contre M. Charest efface d'un coup les efforts mis depuis son mémorable discours à-plat-ventriste de Toronto pour présenter l'ADQ comme le parti «autonomiste» qu'il n'est visiblement pas davantage aujourd'hui qu'hier.


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