Piètre gouvernance des filiales de la Caisse

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« M. Sabia n’a pas cru bon de prendre le moindre petit blâme»


À la suite de l’enquête interne que la Caisse de dépôt et placement du Québec a déclenchée sur sa filiale Otéra Capital après avoir pris connaissance des faits troublants révélés par notre Bureau d’enquête, quatre dirigeants d’Otéra viennent d’être limogés pour s’être placés en situation de conflits d’intérêts.


Réalisée au coût de 5 millions $, cette enquête interne force la Caisse à améliorer sa gouvernance chez Otéra Capital, et également chez sa filiale Ivanhoé Cambridge.


Ce que le président et chef de la direction de la Caisse, Michael Sabia, a promis de faire.


« Clairement, les pratiques en matière d’éthique, de gouvernance et de gestion des risques chez Otéra doivent être rehaussées au niveau de celles de la Caisse. Nous allons faire les changements requis, de manière décisive, tout comme nous avons agi immédiatement pour lancer une enquête indépendante quand des allégations ont été portées à notre connaissance. »


Bien que Otéra Capital relève de lui, M. Sabia n’a pas cru bon de prendre le moindre petit blâme ni de s’excuser pour la gouvernance déficiente de sa filiale. Ça me désole !


CDPQ INFRA ?


J’ai été également étonné de voir qu’aucune recommandation d’amélioration de gouvernance n’a été formulée à l’endroit de l’autre filiale importante de la Caisse, soit CDPQ Infra.


CDPQ Infra, qui est responsable du REM, n’a rien à améliorer, semble-t-il, d’après l’analyse des codes d’éthique qui a été réalisée par la firme Norton Rose Fulbright.


Ça me dépasse ! Pourquoi ? Parce que l’un des grands principes de bonne gouvernance que la Caisse tente d’imposer aux entreprises dans lesquelles elle investit consiste en la composition d’un conseil d’administration constitué d’une majorité d’administrateurs indépendants.


Or, qui compose actuellement le conseil d’administration de la filiale CDPQ Infra ? Seulement trois administrateurs, tous des hauts dirigeants de la Caisse, soit Michael Sabia (le grand patron de la Caisse), Macky Tall (président et chef de la direction de CDPQ Infra et chef des marchés liquides de la Caisse), et Claude Bergeron (président du conseil de CDPQ Infra et chef de la direction des risques et relations avec les déposants de la Caisse).


Créée en juillet 2015, CDPQ Infra devait nommer sur son conseil d’administration deux administrateurs indépendants. Après plus de trois ans, leur nomination se fait toujours attendre...


CDPQ Infra est en train de réaliser le plus gros projet de transport en commun (6,3 milliards $) depuis le métro de Montréal... sans qu’aucun administrateur indépendant surveille nos intérêts.


Pas fort comme gouvernance !


RETOUR SUR OTÉRA


Grand bien fasse à Michael Sabia ! Son honneur est sauvé, car l’intégrité du portefeuille d’Otéra Capital n’a pas été touchée. Spécialisée dans les prêts hypothécaires commerciaux, la filiale Otéra est en lien étroit avec la filiale immobilière Ivanhoe Cambridge.


L’enquête indépendante menée par l’équipe de Me Stéphane Eljarrat (de la firme OSLER, HOSKIN & HARCOURT) conclut qu’aucune preuve de fraude ou de blanchiment d’argent touchant le portefeuille d’Otéra n’a été établie... et qu’aucun autre élément ne permet de conclure que le portefeuille d’Otéra a fait l’objet de transactions frauduleuses.


CHANGEMENTS CHEZ OTÉRA ET IVANHOÉ


Comme il fallait s’y attendre, la Caisse apporte des changements à la direction et au conseil d’administration d’Otéra Capital.


Et, bien entendu, les pratiques en matière d’éthique sont rehaussées... jusqu’au niveau de celles de la Caisse.


« L’éthique et l’intégrité à la Caisse sont des valeurs fondamentales et d’intérêt public. Les pratiques et la politique de tolérance zéro de la Caisse en matière d’éthique doivent donc être appliquées par Otéra », affirme Michael Sabia.


Dans la foulée des changements apportés en matière de bonne gouvernance chez Otéra Capital, la Caisse en profite aussi pour améliorer la gouvernance chez sa grosse filiale Ivanhoé Cambridge.


Deux administrateurs indépendants seront ajoutés au conseil d’administration, portant le nombre d’indépendants à 10 sur 13 membres du conseil d’administration (CA) d’Ivanhoé Cambridge.


De plus, on créera au sein dudit CA un comité de gouvernance et d’éthique du conseil.