Les partisans du Parti québécois ont de bonnes raisons de célébrer. Le PQ a fait un come-back aux élections de lundi dernier et mis fin à la série noire qui le poussait de plus en plus vers le bas. Le PQ retrouve son rôle d'opposition officielle. La performance est assez bonne pour que son chef, Pauline Marois, ne soit pas crucifiée par le parti.
Le renversement de tendance est convaincant. Le PQ était en perte de vitesse: 44,75% en 1994 avec Jacques Parizeau, la dernière fois où les péquistes ont obtenu plus de voix que les libéraux, 42,87% en 1998 avec Lucien Bouchard, 33,24% en 2003 avec Bernard Landry, 28,35% en 2007 avec André Boisclair, et maintenant, 35% avec Mme Marois.
C'est une bonne raison de se réjouir, pour les péquistes, bien sûr, mais aussi pour les Québécois en général, qui retrouveront une opposition compétente et solide, et un parti capable d'assurer l'alternance du pouvoir dont on a besoin en démocratie. Mais est-ce que l'option souverainiste a pour autant retrouvé son élan?
D'abord, ces résultats sont très moyens; 35%, ce n'est pas grand-chose. Personne n'a noté que, des deux grands partis malmenés par l'ADQ en 2007, ce sont les libéraux qui ont le mieux rebondi. Ils ont obtenu neuf points de pourcentage de plus, et le PQ seulement sept points. Le PQ n'a pas non plus réussi à battre les libéraux même s'ils sollicitaient un troisième mandat, ni même à limiter leur victoire à un gouvernement minoritaire.
Cependant, les péquistes sont certainement mieux placés pour remporter les prochaines élections. Mais ce n'est pas cela que les membres les plus fervents du parti célébraient. Lundi soir, dans le meeting où Mme Marois et ses partisans célébraient les résultats, ils y voyaient plutôt les premiers pas d'une marche victorieuse vers la souveraineté, en scandant : «Un pays! Un pays! Un pays!»
Cela mérite deux mises en garde. La première est mathématique: il faut plus qu'un point sur une courbe pour déceler une tendance. La seconde est littéraire, et c'est la fable de La Fontaine, La laitière et le pot au lait, encore bien vraie 300 ans plus tard. C'est l'histoire de Perrette qui se rend au village vendre le pot au lait posé sur sa tête, qui rêve à ce qu'elle fera avec tout l'argent qu'elle accumulera jusqu'à ce que le pot tombe par terre. Adieu, veau, vache, cochon...
Il est vrai que les militants péquistes seront revigorés, plus enthousiastes, et qu'ils parleront davantage du «projet de pays». Mais le défi des péquistes, ce n'est pas de parler de souveraineté, un art qu'ils maîtrisent parfaitement, mais plutôt de convaincre les Québécois de les écouter et surtout de les suivre.
Il faut d'abord se demander pour quoi les électeurs qui ont choisi le PQ ont voté. Pour la souveraineté? Pour Mme Marois? Contre Jean Charest? Pour un gouvernement péquiste? Pour une bonne opposition ? Par réaction épidermique aux attaques de Stephen Harper contre les «separatists»? Quand on fait campagne sur autre chose que la souveraineté, il ne faut pas interpréter le vote comme un vote sur la souveraineté. Une erreur que le chef bloquiste Gilles Duceppe n'a jamais commise.
Il faut ensuite comprendre les causes de l'embellie. Le PQ a fait des gains, comme les libéraux, parce que l'ADQ s'est effondrée. Il a aussi profité du fait que Mme Marois a éliminé du programme l'engagement de tenir un référendum le plus tôt possible, qui avait considérablement nui à André Boisclair. La chef du PQ, reine de la langue de bois, dira que son parti s'est recentré sur le projet au lieu d'être soumis à la mécanique. Mais le résultat est qu'on peut maintenant voter pour le PQ sans risque référendaire. Est-ce un signe de progrès pour la souveraineté?
Reste la possibilité qu'une éventuelle prise du pouvoir donne un coup de pouce à l'option, parce qu'un gouvernement péquiste aurait plus d'outils et qu'il pourrait déclencher un référendum. Mme Marois pourrait demander à Lucien Bouchard et à Bernard Landry ce qu'ils en pensent.
Enfin, il faut quand même regarder les sondages. L'appui à la souveraineté est faible, un maigre 37% dans notre dernier CROP. Depuis que Mme Marois dirige le PQ, la popularité de l'option a même reculé; elle se situait à 39% en août 2007. Il n'y a pas là l'ombre d'un signe de progrès.
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