Pas de tapis rouge pour le chef du Bloc

PQ - succession de Boisclair


Tommy Chouinard - Gilles Duceppe n’est pas tellement le bienvenu à Québec. Plusieurs députés péquistes lui demandent de rester à Ottawa. Et aucun élu interrogé par La Presse n’a accordé son appui au chef bloquiste hier. C’est plutôt un clan Marois qui est en train de se former.
Gilles Duceppe se retrouve dans une position délicate, puisque la grande majorité des députés bloquistes l’ont encouragé à briguer la direction du PQ, un parti qui a besoin de se faire «botter le derrière» selon son collègue Louis Plamondon.
Cette déclaration, «inappropriée» selon le nouveau chef intérimaire du PQ François Gendron, nuira à la cause de M. Duceppe, selon des péquistes.
«On a davantage besoin de Gilles Duceppe à Ottawa qu’on en a besoin à Québec», a affirmé l’ancien journaliste Bernard Drainville. Vingt-quatre heures après la démission d’André Boisclair à la tête du PQ, le député de Marie-Victorin a invité Pauline Marois à se lancer dans la course à la direction. L’ancienne ministre péquiste, qui a déjà participé à deux campagnes au leadership sans succès, ne ferme pas la porte à un retour aux affaires.
Camil Bouchard doute que le chef bloquiste soit le leader dont le PQ a besoin en ce moment. «Je me demande si M. Duceppe représente le renouveau», a-t-il lancé, refusant de dire quelle personne il verrait à la tête du PQ.
Le député de Vachon a toutefois rencontré Pauline Marois à Trois-Rivières, hier. Ils ont tous deux participé au congrès de l’ACFAS. Mme Marois n’avait pas bénéficié de son appui lors de la course à la direction en 2005. Camil Bouchard avait été le seul député à se ranger derrière l’ancien haut mandarin Louis Bernard.
Avant la démission d’André Boisclair, des membres de l’entourage de Gilles Duceppe à Ottawa ont donné des coups de fil aux élus péquistes pour sonder la popularité du chef bloquiste, a souligné le député de Matane, Pascal Bérubé.
Il a ainsi accrédité la thèse d’André Boisclair selon laquelle des proches de M. Duceppe tentaient de le déloger de la tête du PQ. «Comme par hasard, des gens avec qui on n’a pas discuté depuis des années s’informent de notre santé et de la température dans notre comté. Il y avait souvent d’autres points à l’ordre du jour. Ils s’informaient…», a-t-il affirmé.
Les péquistes sont, selon lui, «partagés» au sujet de la venue possible de Gilles Duceppe à Québec. Pascal Bérubé confirme que des péquistes souhaitent le retour de Pauline Marois. «Ça existe, bien sûr. Mme Marois a des états de service exceptionnels au Parti québécois. Je suis le premier à la reconnaître», a-t-il dit, sans préciser dès maintenant quelle candidature il pourrait appuyer.
La députée de Matapédia, Danielle Doyer, a été cinglante. Un éventuel couronnement de Gilles Duceppe serait «épouvantable», selon elle. Sa venue au PQ pourrait semer «la bisbille» au sein du mouvement souverainiste.
«M. Duceppe, il fait bien à Ottawa. Pourquoi aller dégarnir quelque chose qui fonctionne bien ? C’est quoi l’idée ?» a-t-elle affirmé. À ses yeux, Gilles Duceppe ne doit pas s’attendre à un tapis rouge s’il décide de faire le saut à Québec car le caucus est divisé.
La déclaration de Louis Plamondon n’incitera personne à se ranger derrière M. Duceppe, a-t-elle ajouté. «S’il fait bien la discipline à Ottawa, qu’il continue à le faire là.» Pauline Marois, «une personne de grande valeur», devrait tenter sa chance selon elle. «C’est une femme qui respecte et connaît le Parti québécois. Alors pourquoi pas ?»
«M. Duceppe ferait mieux de demeurer à Ottawa», a lancé de son côté Lorraine Richard. La députée de Duplessis avait appuyée Pauline Marois durant la course à la direction, en 2005.
Plusieurs nouveaux élus péquistes, dont Johanne Morasse, Irvin Pelletier et Denis Trottier, demandent à Gilles Duceppe de demeurer à la barre du Bloc. «Je pense que ce serait une bonne chose que M. Duceppe ne s’amène pas à Québec», a laissé tomber M. Trottier. Pauline Marois serait selon lui «une très bonne candidature, mais d’autres candidats de qualité pourraient se présenter». Pour Irvin Pelletier, Mme Marois «serait une candidature qui pourrait être intéressante».
Lisette Lapointe, députée de Crémazie et conjointe de Jacques Parizeau, estime que Gilles Duceppe est «une personne très appréciée dans le mouvement souverainiste». Mais elle a refusé de dire qui serait le meilleur successeur d’André Boisclair.
Louise Harel, qui a été soupçonnée par des péquistes de travailler en sous-main pour faire mousser la candidature de Gilles Duceppe, a esquivé les questions des journalistes. «Je ne veux surtout pas avoir à me prononcer maintenant. Je suis une grande amie depuis très longtemps, et je le serai pour la vie je pense, de Gilles Duceppe. Mais nous gardons les uns et les autres notre libre arbitre bien évidemment.»
La députée d’Hochelaga-Maisonneuve ne s’est pas portée candidate pour devenir chef intérimaire du PQ alors qu’elle avait occupé ce poste en 2005 à la suite du départ de Bernard Landry. «J’ai le goût de contribuer à part entière à cet effort de renouvellement», a-t-elle dit. Interrogé à avoir si elle souhaitait avoir les coudées franches pour aider un éventuel candidat, elle a répondu en riant : «Ne vous fiez pas à ce que vous ressentez».
L’ancien bloquiste Stéphane Bergeron, élu dans Verchères, s’est contenté de dire que «c’est à (Gilles Duceppe) d’évaluer» la situation. François Legault et Diane Lemieux sont demeurés discrets. Pierre Curzi, pressenti pour devenir candidat, a affirmé qu’il est «trop tôt» pour se prononcer sur la course à la direction.
La sortie de Louis Plamondon a provoqué la colère de plusieurs péquistes. «On n’a surtout pas besoin de se faire botter le derrière. M. Plamondon doit déjà regretter sa déclaration», a lancé Bernard Drainville.
La présidente du PQ, Monique Richard, souhaite que le chef soit choisi avant la rentrée parlementaire de l’automne, prévue en octobre. Plusieurs députés péquistes partagent son avis et rejettent tout couronnement.
La direction du PQ se réunira samedi pour définir les modalités de la course au leadership. Les élus péquistes souhaitent des critères d’admissibilité plus sévères qu’en 2005 afin de limiter le nombre de candidatures.
Après une réunion de deux heures, les députés ont élu par vote secret leur doyen François Gendron à titre de chef intérimaire de l’aile parlementaire du PQ. Le député d’Abitibi-Ouest a confirmé lui-même qu’il a battu Marie Malavoy, «une femme extraordinaire». Il restera neutre pendant toute la durée de la course à la direction.
François Gendron a indiqué que le PQ, sur le point de tenir une course à la direction, votera en faveur du budget afin d’éviter la chute du gouvernement libéral. Les baisses d’impôts ne sont « pas une bonne idée », mais « l’électorat ne veut pas aller en élections au mois de juin », a-t-il expliqué.
Avec la collaboration de Denis Lessard


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