Une fausse manchette diffusée la semaine dernière par un groupe de presse et reprise par des commentateurs peu scrupuleux affirmait que «malgré 1,5 milliard, le Pacte pour l'emploi est un échec». Forcée de réagir, la ministre de l'Emploi et de la Solidarité, Julie Boulet, n'a réussi à convaincre personne. Qu'attend-on pour accompagner les programmes d'un processus d'évaluation systématique qui permettrait au moins de savoir si l'argent est bien dépensé?
Le Pacte pour l'emploi lancé en mars 2008 fait partie de ces nombreux programmes à propos desquels il est impossible de dire s'ils atteignent leur cible ou non. Doté d'un budget de près d'un milliard, dont la moitié devait provenir des entreprises, il a été bonifié d'un autre demi-milliard au moment de la crise, en 2009, la plus grande partie provenant cette fois du plan fédéral de lutte contre la récession.
D'entrée de jeu, une question: les entreprises ont-elles vraiment contribué à hauteur d'un demi-milliard? Si oui, sous quelle forme?
Lors du lancement du plan, le premier ministre Charest et son ministre responsable du temps, Sam Hamad, avaient insisté sur un détail plus spectaculaire destiné à prouver que les libéraux pouvaient faire mieux que les adéquistes: remettre 50 000 assistés sociaux au travail en versant un supplément à ceux qui accepteraient un emploi au salaire minimum, une formation ou un stage.
Le hic, c'est que l'essentiel du Pacte pour l'emploi, et du budget, ne s'adressait pas du tout à cette catégorie de prestataires, mais à tous ces gens qui veulent travailler et qui rencontrent des difficultés particulières, tels les immigrants, les personnes handicapées et les plus de 55 ans mis à pied.
Un autre volet important du programme s'adressait aux entreprises soucieuses d'améliorer la formation de leurs employés, puis, en 2009, au moment de la récession, l'intervention financière d'Ottawa a même permis de compléter le salaire de milliers de travailleurs pour éviter leur mise à pied.
Évidemment, même très coûteux, ces services frappent moins l'imagination que la promesse de faire travailler des assistés sociaux.
C'est pourtant ce seul aspect du programme qui, aujourd'hui, fait dire à certains que le Pacte est un échec puisqu'il n'y a que 3000 assistés sociaux de moins qu'en 2008 au lieu des 50 000 prévus.
Quiconque se rappelle les récessions précédentes sait que le nombre d'assistés sociaux grimpait chaque fois d'au moins 100 000 pour ne redescendre que très lentement par la suite. Cette fois, il y aurait 3000 personnes de moins sur la liste après la récession qu'avant?
Donnée plus spectaculaire encore, 794 000 personnes vivaient de l'aide sociale à la fin des années quatre-vingt-dix au Québec, et elles ne sont plus que 484 000 aujourd'hui, malgré la récession. Alors, où est le problème?
Malheureusement pour le gouvernement, il est impossible d'établir un lien quelconque entre son Pacte pour l'emploi et le nombre d'assistés sociaux puisque la grande responsable est la conjoncture économique.
Voilà une bonne raison pour demander que l'on accompagne tout nouveau programme d'une évaluation systématique. Lors de l'annonce du Pacte pour l'emploi, en mars 2008, le ministre Hamad avait promis qu'une telle évaluation serait produite 18 mois plus tard. Si tel fut le cas, qu'attend-on pour la rendre publique? Craindrait-on ses conclusions, preuves à l'appui cette fois?
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j-rsansfacon@ledevoir.ca
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