Discours d'ouverture de la 2e session de la 39e législature de l'Assemblée nationale du Québec

Le premier ministre du Québec, Jean Charest, a donné aujourd'hui le coup d'envoi de la 2e session de la 39e législature avec la lecture du discours inaugural.

PLQ - les derniers feux - Printemps 2011

Le premier ministre du Québec, Jean Charest, a donné aujourd'hui le coup d'envoi de la 2e session de la 39e législature avec la lecture du discours inaugural.
La version lue fait foi.
Monsieur le Président, en m'adressant à vous aujourd'hui, je m'adresse à tous les Québécois.
Comme nation francophone d'Amérique, nous devons nous faire entendre pour affirmer notre différence et notre manière d'être. Ce souffle de vie s'incarne dans notre langue et notre culture. Le Québec s'exprime et se raconte notamment par la musique, la littérature, le théâtre, la danse, le cirque, le cinéma et la peinture. Le Québec, c'est entre autres Robert Lepage au Metropolitan Opera de New York, Dany Laferrière et le prix Médicis, Arcade Fire primé aux Grammy Awards, Denis Villeneuve et son film Incendies aux Oscars, et le retour sur scène de Céline Dion à Las Vegas. Nous, Québécois, sommes chez nous sur les plus grandes scènes du monde. Au nom de tous les Québécois, j'aimerais remercier tous nos artistes qui perpétuent la grande séduction de notre culture.
Cette année marquera le 50e anniversaire de la création, par le gouvernement de Jean Lesage et son ministre Georges-Émile Lapalme, d'un ministère dédié à notre culture. Depuis, les gouvernements qui se sont succédé ont appuyé toutes les formes d'art et d'expression. Nous allons souligner cet anniversaire, notamment par une initiative qui nous transportera encore davantage à l'extérieur du Québec.
J'annonce la création d'un fonds spécial qui investira pour encourager nos entreprises culturelles et nos artistes à mener des projets majeurs sur la scène internationale.
Les artistes génèrent un vent de liberté universel. Lorsque ce vent se lève, aucun homme, aucun dictateur n'est assez puissant pour le bloquer avec ses bras. À ce moment même, des pays comme la Tunisie et l'Égypte sont en mutation, pendant qu'Haïti s'engage courageusement dans sa reconstruction. Ces événements nous touchent. Ces événements nous touchent, entre autres parce qu'ils se déroulent dans notre famille élargie : la Tunisie, l'Égypte et Haïti sont membres de la Francophonie. Ces événements nous touchent parce que ces millions de personnes recherchent une liberté semblable à la nôtre. Je veux aujourd'hui témoigner de la solidarité des Québécois envers ces peuples qui réclament leur droit à la liberté et à leur part de vie.
Déjà, depuis 2008, le monde se redessine sous nos yeux. Les pays arabes se métamorphosent. La Chine a surpassé le Japon pour atteindre le rang de 2e économie mondiale. Les pays émergents sont des concurrents redoutables, et, aussi, des clients recherchés. Chaque mois, des innovations technologiques réduisent le temps et l'espace et changent nos habitudes. Et une conscience environnementale transforme radicalement notre vision de l'économie. C'est dans ce monde que le Québec est appelé à grandir.
Avec ce discours inaugural, j'invite les Québécois à penser, à imaginer, à rêver et à construire le Québec dans un monde où s'additionnent de nouveaux espaces et se créent de nouvelles dimensions. Plus que jamais, le Québec est dans une position de force pour se démarquer. Nous avons du talent. Nous avons des ressources. Nous avons des alliances. Nous avons des projets. Rarement notre jeunesse n'aura vu s'ouvrir autant de voies nouvelles pour faire sa vie.
La crise économique et financière, par la rapidité avec laquelle elle s'est propagée, témoigne elle aussi de ce monde nouveau; tandis que la manière dont nous avons su la combattre et la traverser en dit long sur la force du Québec. Il y a près de 4 millions de personnes qui travaillent au Québec. C'est un record de tous les temps. Notre taux de chômage est inférieur à celui de l'Ontario et des États-Unis, du jamais vu en 30 ans. La participation des jeunes femmes au marché du travail est l'une des plus élevées au Canada. Grâce à nos politiques familiales, une famille de la classe moyenne a un revenu après impôt plus élevé au Québec que partout ailleurs au Canada. La pauvreté recule. Le nombre de personnes à l'aide sociale est en baisse constante. On en compte 60 000 de moins qu'en 2003. Le revenu disponible a progressé davantage au Québec qu'en Ontario et au Canada pendant la période 2006-2009.
Au cours des dernières années, tout en combattant la crise économique, le Québec s'est donné de nouveaux espaces pour grandir. Nous avons instauré, entre la France et le Québec, un nouvel espace de mobilité pour nos citoyens. C'est un projet novateur sans égal au monde. Nous avons ouvert des marchés à nos entrepreneurs en déclenchant des négociations entre le Canada et l'Union européenne pour un nouveau partenariat. Ce traité, pensé au Québec, sera le modèle des accords internationaux de l'avenir. Les étudiants étrangers, diplômés au Québec, se font maintenant offrir un certificat de sélection pour rester chez nous.
Notre vision pour l'avenir de notre société est directement liée à notre volonté de faire du Québec un pôle d'attraction mondial pour la main-d'œuvre qualifiée. France-Québec, Canada-Europe, les étudiants étrangers, trois innovations québécoises qui font de nous les pionniers de la mobilité internationale de la main-d'œuvre. Nous avons fait du Québec une solution nord-américaine pour combattre le réchauffement climatique et pour décarboniser l'économie. Par des projets de développement à l'Hôpital Sainte-Justine, au Centre hospitalier de l'Université de Montréal, au Centre universitaire de santé McGill, à l'Hôpital général juif de Montréal, au Centre hospitalier universitaire de Sherbrooke et au Centre hospitalier universitaire de Québec, nous serons, d'ici à la fin de cette décennie, un pôle mondial dans le domaine de la recherche médicale. Puis, nous avons rendu l'investissement concurrentiel. Depuis le 1er janvier dernier, le Québec n'a plus de taxe sur le capital. Nous avons amené le Québec au bon endroit, au bon moment.
Dans nos débats, nous jetons souvent sur nous-mêmes un regard sévère. Pourtant, dans l'addition des plus et des moins, il est incontestable que le Québec est parmi ce que l'humanité a de mieux à offrir. Prendre les bonnes décisions exige que nous posions le bon regard; un regard qui se libère autant de la complaisance que du dénigrement.
Ce discours d'ouverture est celui du gouvernement de l'économie. Je dis dès à présent que les décisions, orientations et politiques que j'énoncerai aujourd'hui s'inscrivent à l'intérieur du cadre financier très rigoureux que nous avons établi il y a un an, et qui, depuis ce temps, a été reconnu et appuyé par cinq agences de notation de crédit de l'extérieur du Québec. Je dis aujourd'hui aux membres de mon équipe ministérielle que nous sommes liés par la discipline budgétaire et le respect de nos objectifs. Je réitère aujourd'hui l'objectif du retour à l'équilibre budgétaire en 2013-2014.
Pour l'avenir, nous nous donnons 5 priorités :
- l'éducation, qui est le berceau de tous les talents;
- l'emploi, parce que le Québec doit être fort de tous ses bras et de toutes ses têtes;
- le développement durable, parce qu'économie et environnement sont les deux faces d'une même médaille;
- la maîtrise de nos ressources, parce que nous en sommes fiduciaires pour nos enfants, petits-enfants et pour la planète;
- et la santé, pour bien vivre avec ceux que nous aimons.
Ces priorités sont comme les cinq doigts de notre main. La main que nous tendons entre nous pour nous entraider. La main que nous tendons au monde pour faire des alliances. La main que nous tendons aux prochaines générations pour leur passer le témoin et ouvrir la voie
Les plus grandes possibilités s'offrent à nous. Pour les saisir, il faudra faire mieux, faire plus et, souvent, faire différemment. En éducation, nous devrons continuer de faire mieux. Continuer de faire mieux, cela signifie d'abord faire un juste état des lieux. Année après année, les élèves québécois figurent parmi les meilleurs dans les concours internationaux. Le Québec a un taux de remise de diplôme plus élevé que la moyenne canadienne et que la moyenne des pays de l'OCDE. Ce qui est vrai, par contre, c'est que trop souvent, ça prend trop de temps. Le 14 décembre dernier, l'Institut de la statistique du Québec rendait public le Portrait social du Québec 2010. On y lisait notamment : « Le taux de décrochage scolaire chez les jeunes de 17 ans a régressé de 26,2 % à 9,4 % entre 1979 et 2007 ». Pour ce progrès, je salue le dévouement des enseignants, des professionnels et des directions d'école qui travaillent de manière exemplaire pour que nos enfants décrochent leurs rêves. Nous allons poursuivre et intensifier notre combat pour la réussite scolaire de nos enfants. Dans ce combat, les parents sont sur la ligne de front. Ils sont les premiers guides de leurs enfants. Nous allons rapprocher l'école de nos jeunes, spécialement des garçons. Nos jeunes sont attirés par les nouvelles technologies. C'est leur univers. L'école doit s'inscrire dans cette réalité. Le tableau noir, celui que nous avons tous connu, sera modernisé.
J'annonce que chaque classe de chaque école du Québec sera dotée d'un tableau blanc intelligent et que chaque professeur sera muni d'un ordinateur portable.
Le sport est un élément central de la vie étudiante. C'est une voie de réussite scolaire. Il crée de saines habitudes. Il enseigne de précieuses leçons sur soi, sur les autres et sur la vie. Il y a au Québec un engouement pour le sport étudiant. Les gradins se remplissent d'élèves et de parents; la fierté des équipes scolaires rejaillit sur des communautés entières. Quand on est fier de son école, on y reste et on y réussit.
J'annonce que le gouvernement investira pour renforcer la fierté et l'appartenance liées aux équipes interscolaires. Toutes les écoles secondaires publiques du Québec auront les ressources pour améliorer les équipements d'entraînement et doter leurs équipes d'uniformes que les élèves seront fiers de porter.
Depuis 2003, nous avons augmenté le temps consacré à l'étude et à la maîtrise de la langue française. Notre langue, c'est notre identité; c'est aussi notre force. Notre langue, c'est un instrument de liberté. En cela, il n'y a aucune opposition entre la pleine maîtrise du français et la connaissance d'une deuxième et d'une troisième langue.
J'annonce que les élèves de 6e année du primaire consacreront la moitié de leur année à l'apprentissage intensif de l'anglais. Cette approche sera progressivement étendue à tout le Québec sur un horizon de 5 ans. À cet égard, nous mettrons en valeur des collaborations nouvelles entre commissions scolaires francophones et anglophones.
L'éducation forme les citoyens de demain. Elle doit aussi cultiver l'art du vivre ensemble et le respect envers les autres, notamment envers les enseignants.
J'annonce que des formations au civisme seront implantées dans toutes les écoles et que toutes les écoles du Québec devront être dotées de codes de vie centrés sur le respect de la personne, de l'autorité du professeur et des directions d'école.
Dans cet esprit, j'estime, comme premier ministre, et aussi comme père de famille, que le vouvoiement devrait être de mise dans nos écoles. Plusieurs écoles y reviennent, souvent encouragées et appuyées par les comités de parents. Cette particularité de notre langue française est en elle-même une marque distinctive de politesse et de respect. Cela devrait être le ton approprié entre un élève et son professeur.
Au sommet de notre réseau de l'éducation se trouvent nos universités. Elles sont pour l'avenir du Québec des institutions stratégiques. Elles nous permettent de rivaliser dans la course mondiale vers le savoir et l'innovation. Montréal, notre métropole, est la 2e ville nord-américaine où se trouve la plus forte concentration d'étudiants universitaires. C'est un formidable atout pour le Québec. Depuis 2003, nous avons ajouté près de un milliard de dollars au financement de nos universités. C'est un effort très important. En même temps, autour de nous, les sociétés se mobilisent pour renforcer leurs institutions universitaires. Sur ce défi en particulier, c'est tout le Québec qui doit s'unir et réagir. Nous allons tous y participer : le gouvernement y contribuera encore davantage, le secteur privé y contribuera davantage, et les étudiants feront leur juste part. Nos universités doivent rayonner. Les étudiants y forgent leur avenir. Les entreprises y trouvent leurs talents et leur intelligence. C'est là que s'inventent, par exemple, les médicaments qui nous soigneront et les carrières que mèneront plusieurs de nos enfants. C'est une condition essentielle à la réussite de notre société. Le Québec y joue son avenir.
L'éducation doit mener à l'emploi. Nous avons traversé la crise en concentrant nos efforts sur la protection des emplois. Nous avons fait ce choix parce qu'un emploi, c'est le début de tous les possibles. En même temps, notre population vieillit. Il faut radicalement changer notre façon de voir le vieillissement et la vie. Pendant trop longtemps, nous n'avons perçu que les impacts négatifs de ce changement. Le vieillissement de la population, c'est d'abord la manifestation du progrès et de l'amélioration des conditions de vie. Quand je suis né, avoir 52 ans, c'était vieux. Aujourd'hui, c'est jeune. En moins de 100 ans, l'espérance de vie à la naissance s'est accrue de plus de 30 ans. Pensez à ce que ça veut dire dans nos conditions de vie actuelles : ce n'est pas la vieillesse qui s'allonge, c'est la vie active qui se poursuit. C'est toute la trame de la vie qui change. Soyons l'une des premières sociétés au monde à modifier ses habitudes et son organisation en fonction d'une vie plus longue, plus belle et plus épanouie. Nous allons repenser l'épargne pour une retraite qui pourrait être aussi longue que l'était jadis une carrière. L'État doit ainsi veiller à la pérennité du Régime de rentes du Québec, tout en permettant au plus grand nombre possible de Québécois de participer à un régime de retraite privé. Nous allons repenser l'organisation de nos services et de nos communautés pour tenir compte de ces milliers de Québécois qui sont riches de leur expérience, de leur santé et du temps qu'ils ont à donner. Et nous allons repenser notre organisation du travail pour que nos jeunes, notamment, bénéficient davantage des conseils de ceux qui ont de l'expérience. Nos aînés sont actifs. Nous avons besoin d'eux. Et nous les voulons en emploi aussi longtemps qu'ils le voudront. Ce sera la conciliation travail-retraite.
J'annonce que mon gouvernement proposera un avantage fiscal aux personnes de plus de 65 ans qui désirent rester au travail ou retourner en emploi.
Le Québec a aussi besoin que les bonnes idées des Québécois deviennent de bonnes entreprises. C'est l'entrepreneuriat. L'entrepreneuriat a notamment fait du Québec le réinventeur du cirque, un leader mondial de l'aérospatiale et un pionnier dans plusieurs domaines des sciences de la vie. Quand on a une bonne idée et qu'on est prêt à travailler ensemble, tout doit devenir possible au Québec. Mon gouvernement, qui a mis en place en 2004 le Défi de l'entrepreneuriat jeunesse, présentera une nouvelle stratégie sur l'entrepreneuriat. Par cette stratégie, nous agirons de concert avec les leaders et organismes pour stimuler l'entrepreneuriat partout au Québec.
Le développement de l'emploi passe aussi par une meilleure intégration des immigrants. L'an dernier, le Québec a accueilli plus de 50 000 nouveaux arrivants. Ils sont venus de 185 pays, le cœur gonflé d'espoir et prêts à vivre comme tous les Québécois : la peur de rien, l'envie de tout, comme le dit une chanson de Jean-Pierre Ferland. Ils doivent s'intégrer à notre société francophone et partager nos valeurs fondamentales. Le Québec a besoin de leurs compétences. Pour certains, décrocher un emploi dans leur domaine est difficile. Pourtant, nombre d'entreprises recherchent cette main-d'œuvre.
Nous faisons le pont. Le gouvernement a développé et activé un service de recrutement par Internet. Le Placement en ligne international offre aux entreprises de toutes les régions la possibilité d'embaucher des travailleurs qualifiés, sélectionnés par le Québec avant même leur arrivée chez nous. Avec ce service, nous atteignons un objectif triple : plus d'immigrants en emploi, plus d'immigrants dans nos régions, plus d'entreprises qui trouvent la main-d'œuvre dont elles ont besoin. D'autres mesures actives viendront accélérer l'intégration en emploi des nouveaux arrivants.
Le développement de l'emploi repose sur la formation de la main-d'œuvre. Elle doit permettre aux travailleurs de progresser dans leur projet de vie. Elle doit correspondre aux besoins des entreprises. Elle doit être disponible en temps réel. Et cette formation doit participer à des gains de productivité. C'est le défi des cégeps, des centres de formation continue et des centres de formation professionnelle. C'est dans ces lieux que la main-d'œuvre québécoise nourrit sa réputation d'être parmi les meilleures du monde. Dans la foulée du Pacte pour l'emploi et du Pacte pour l'emploi Plus, nous allons améliorer l'adéquation entre l'offre de formation et les besoins des entreprises. Dans les prochains mois, les partenaires de la formation professionnelle et de l'éducation se rencontreront dans chaque région du Québec. Ces rencontres seront couronnées par un forum national, coprésidé par la ministre de l'Éducation et la ministre de l'Emploi. Ce rendez-vous sera un moment de décision et d'action. Nous avons 700 000 emplois à combler en 3 ans. J'en appelle à tous. Il faut renforcer la collaboration et innover afin de former plus, de former mieux et de former plus efficacement.
Pour que notre économie grandisse, le gouvernement doit veiller à la probité du marché. Il y a des règles et il y a des lois. Nos entreprises ont droit à un environnement concurrentiel sain; nos épargnants et nos investisseurs ont droit à la sécurité; et les citoyens ont le droit de payer le juste prix. Nous avons mis en place un arsenal policier, législatif et administratif pour traquer ceux qui contournent les règles. L'annonce, la semaine dernière, de la formation d'une unité permanente anticorruption témoigne de notre détermination. Nous protégeons résolument l'intérêt public et l'État de droit.
Dans le domaine du développement durable, l'avenir nous appartient. En 2012, le Québec sera l'un des rares endroits d'Amérique du Nord à avoir réduit de 6 % ses émissions de gaz à effet de serre. Le Québec respectera ainsi sa part des exigences du protocole de Kyoto. Pendant que s'accomplit cette transformation de notre économie, l'emploi atteint des sommets. C'est la preuve que produire en protégeant l'environnement est source d'emploi, d'innovation et de richesse. Pour l'avenir, nous avons établi un objectif très ambitieux : une réduction de nos GES de 20 % d'ici 2020.
En devenant leaders du développement durable, nous donnons une valeur ajoutée à nos produits. L'étiquette « Fabriqué au Québec » devient une marque de commerce recherchée, parce qu'elle est gage d'un produit à faible teneur de carbone. Pour atteindre nos objectifs de réduction des gaz à effet de serre, nous allons notamment proposer un programme d'entretien et d'inspection pour les véhicules lourds et légers. Puis, nous allons préparer une grande évolution dans le domaine des transports.
J'annonce que le Québec s'engage dans le développement de la nouvelle industrie des transports électriques et dans l'utilisation des véhicules électriques. Nous présenterons un plan :
- pour appuyer la fabrication de produits et de composantes de véhicules électriques afin que le Québec devienne un acteur mondial de cette nouvelle industrie;
- pour préparer l'arrivée de ces véhicules, notamment par le développement d'infrastructures de recharge;
- pour appuyer les sociétés de transport collectif qui se tourneront vers l'électricité;
- et pour encourager les Québécois à se tourner vers les véhicules électriques et hybrides.
Imaginons pour un instant ce que peut vouloir dire la voiture électrique pour les familles québécoises. Faire un plein d'essence coûte aujourd'hui en moyenne 60 $. Pour faire une distance équivalente avec une voiture électrique, il en coûterait moins de 10 $. Le Québec est l'endroit le mieux placé qui soit pour s'engager dans cette direction. Nous avons un savoir-faire en véhicules électriques déjà reconnu. Nous avons l'électricité qu'il faut; le Québec est le 4e producteur d'hydroélectricité au monde; 98 % de l'énergie que nous produisons est propre et renouvelable. Et nous sommes des leaders mondiaux dans la lutte contre les changements climatiques. Il est dans l'ordre des choses que nous soyons parmi les premiers au monde à faire le passage aux véhicules électriques. C'est cette décision que nous prenons aujourd'hui.
Le développement durable, c'est notre patrimoine naturel; notre territoire, c'est le Nord québécois, c'est le Plan Nord. Ce plan sera un projet de développement durable : le gouvernement entend consacrer à terme 50 % du territoire du Plan Nord à des fins autres qu'industrielles, à la protection de l'environnement et à la sauvegarde de la biodiversité. Le gouvernement vise ainsi à établir un équilibre entre les types de développement et les formes de conservation, dans une perspective de développement durable du territoire.
Au cours de la dernière année, des rencontres ont eu lieu sous le leadership de la vice-première ministre et ministre des Ressources naturelles, avec des leaders régionaux incluant des représentants des Premières Nations et des Inuits. Aux côtés de représentants des milieux économiques, sociaux, communautaires et environnementaux, ils ont fait le portrait du Nord d'aujourd'hui et dessiné le Nord de demain. C'est un projet qui est d'abord pour les Québécois, mais c'est déjà un projet qui intéresse le monde entier. C'est l'économie, le développement durable, les changements climatiques, les économies émergentes, c'est l'immensité du territoire... C'est un concentré des promesses et des défis de notre époque.
Déjà, des travaux ont été entrepris pour préparer l'accès au territoire. Des aéroports nordiques sont en rénovation, des routes sont en restauration et d'autres en préparation. Le potentiel du nord du Québec est gigantesque. Sur le plan énergétique, c'est un monde de possibilités. Sur le plan minier, on y trouve de tout. Sur le plan touristique, on y trouve certains des plus beaux paysages du monde, que nous voulons partager et protéger. Ce qui était tout récemment une vision devient le chantier d'une génération.
Dans quelques semaines, nous annoncerons les détails du Plan Nord. Il entraînera des investissements de plusieurs dizaines de milliards de dollars. Pendant 25 ans, le Plan Nord soutiendra des dizaines de milliers d'emplois. Il sera source de création de richesse et de développement économique et social, d'abord au bénéfice des communautés locales et de tous les Québécois.
Le Plan Nord sera aux décennies 2010, 2020 et 2030 ce que la Manic et la Baie James ont été aux décennies 1960 et 1970. Il sera le gage d'un partenariat avec les Premières Nations et les Inuits. Notre Plan Nord, c'est aussi une aventure humaine. Ce sera une occasion pour la jeunesse du sud du Québec d'aller à la rencontre des communautés du Nord. Le Plan Nord positionnera le Québec dans la reconfiguration des routes maritimes qu'entraînera l'ouverture du passage du Nord-Ouest. Nous aurons alors des ports en eaux profondes à notre extrémité nordique, où mouilleront des navires en transit entre l'Europe et l'Asie.
La maîtrise de nos ressources et de l'énergie est intimement liée à la notion de développement durable. Le développement des énergies propres, l'intensification des mesures d'efficacité énergétique, le développement de nouvelles filières comme les biocarburants, et le passage à la voiture électrique contribueront à réduire notre dépendance aux énergies fossiles.
En conséquence : J'annonce qu'en 10 ans, nous ferons passer de 38 % à 32 % la part des énergies fossiles dans le bilan énergétique québécois.
Pour aider à l'atteinte de cet objectif, le gouvernement présentera également une nouvelle politique de développement des transports collectifs. Cette politique favorisera l'interconnexion entre les différents modes de transport et amènera de nouvelles solutions au déplacement des personnes.
Le Québec a la chance d'avoir des ressources : des ressources qui participent à notre développement et des ressources qui sont en forte demande dans les économies émergentes. Nos ressources sont une richesse. Elles font notre histoire. Elles sont notre territoire. Elles font partie de notre patrimoine. Elles nous appartiennent. L'exploitation de nos ressources naturelles doit obéir à des conditions strictes : Elle doit être soumise au paiement de justes redevances. Elle doit entraîner des retombées locales et régionales. Et elle doit se faire dans le respect de l'environnement et des communautés locales.
J'annonce l'entrée en vigueur prochaine d'un nouveau régime de redevances pour le gaz, inspiré des meilleurs régimes existants. Avec le Plan Nord, la croissance de l'activité minière entraînera une augmentation des redevances versées aux Québécois pour l'exploitation de leurs ressources minérales. Une partie de ces redevances sera versée au Fonds des générations afin de contribuer à la réduction de la dette.
Au cours de la dernière année, les Québécois ont appris que les basses-terres du Saint-Laurent seraient riches en gaz naturel. Ce gaz représente un potentiel de création de la richesse significatif, puisque chaque année nous envoyons près de deux milliards de dollars à l'extérieur du Québec pour combler nos besoins. Ce gaz est moins polluant que l'essence et le diesel utilisés dans nos voitures et nos camions; il est aussi plus propre que le mazout pour le chauffage de nos maisons et que le mazout lourd utilisé dans nos usines. Il peut contribuer à la réduction des gaz à effet de serre et être un levier de développement économique. Toutefois, l'extraction de ce gaz de schiste soulève des inquiétudes chez les citoyens. Nous avons donné au Bureau d'audiences publiques sur l'environnement le mandat de proposer un cadre régissant l'exploration et l'exploitation sécuritaires de cette nouvelle ressource. Le rapport est attendu dans les prochains jours. Ce développement se fera comme il le faut ou il ne se fera pas. Les dimensions de santé, de sécurité et de protection de l'eau et de l'environnement sont incontournables et non négociables.
J'annonce que le gouvernement resserrera le cadre législatif et réglementaire associé à l'exploration et à l'exploitation du gaz de schiste. Le gouvernement adoptera également une nouvelle loi spécifique à la mise en valeur des ressources pétrolières et gazières du Québec. D'ici là, les ministères et organismes concernés exerceront un suivi rigoureux de toutes les étapes de l'exploration. Cela permettra au Québec de parfaire l'acquisition des connaissances nécessaires à la mise en valeur durable de cette ressource.
Dans le domaine des hydrocarbures, le Québec a aussi dans ses confins maritimes de possibles gisements pétroliers. Le gouvernement a récemment annoncé l'interdiction de forage pétrolier dans l'estuaire du Saint-Laurent. Cela nous laisse un autre gisement potentiel, dont le bassin fait l'objet d'une évaluation environnementale. Il est situé plus loin au large et connu sous le nom de Old Harry. Mon gouvernement affirme sa volonté de conclure, dans les meilleurs délais, une entente avec le gouvernement fédéral sur l'exploitation de ce gisement. Cette entente devra faire du Québec le principal bénéficiaire de l'exploitation de ses ressources extracôtières, notamment en lui procurant l'entièreté des redevances.
Nos ressources, c'est aussi notre sol, notre terre, nos forêts et les communautés rurales qui nourrissent le Québec. Il suffit de s'envoler de l'un ou l'autre des aéroports du Québec pour voir se dérouler sous nos yeux une forêt qui s'étend à perte de vue. Le Québec est riche de sa forêt. La crise en forêt a été longue et elle a fait mal. Nous avons soutenu les travailleurs et les communautés. Maintenant, la situation s'améliore. En mettant en œuvre le nouveau régime forestier, nous allons refonder l'avenir de ce secteur. Nous allons assurer l'exploitation durable de la forêt, créer un environnement d'affaires propice à la compétition, à l'innovation et à la croissance. Nous allons ramener de jeunes travailleurs en forêt. Nous adopterons de nouvelles mesures pour favoriser l'utilisation du bois du Québec, matériau écologique par excellence, dans la construction et la rénovation de nos bâtiments. Nous lancerons une marque de commerce « Bois du Québec » pour aider les consommateurs à faire le meilleur choix.
De la même manière que la forêt, le secteur bioalimentaire, c'est-à-dire l'agriculture, les pêcheries et la transformation alimentaire, joue un rôle de premier plan dans notre économie, le développement des régions et la mise en valeur de notre territoire. Le gouvernement déposera un livre vert pour mettre en place la première politique bioalimentaire du Québec. Nos régions doivent participer pleinement à la prospérité du Québec.
J'annonce que le gouvernement déposera une stratégie et proposera une loi cadre pour assurer l'occupation et la vitalité des territoires en accord avec nos partenaires, les élus municipaux et les leaders régionaux. Notre action visera aussi à encourager les entreprises de l'économie sociale, où se marient la solidarité et le développement économique régional. Nous inciterons les ministères et organismes publics à effectuer leurs achats courants auprès de nos partenaires sociaux. Cet achat local est un exemple de développement durable.
En développant notre savoir, en stimulant l'emploi et nos compétences, en menant un développement économique durable ambitieux et passionné, et en maîtrisant nos ressources, nous allons mieux vivre. Et nous aurons plus de richesse pour mieux prendre soin de ceux que nous aimons. Dans les dernières années, notre système de santé a subi de fortes pressions. Depuis que nous formons le gouvernement, nous avons augmenté le budget de la santé de presque 60 %, ce qui correspond à un ajout de plus de 10 milliards de dollars en 7 ans. Depuis 2003, le Québec a vu naître plus de 600 000 enfants et près de 400 000 personnes ont franchi la barre des 75 ans. Or, c'est aux deux extrémités de notre vie que nous avons le plus besoin de soins. La croissance de la demande en soins depuis 2003 a dépassé tout ce que le Québec avait connu. Jamais un gouvernement n'a développé autant que le nôtre la capacité de réponse du système de santé. Un meilleur accès à la médecine familiale est au cœur de nos efforts. D'ailleurs, nous atteindrons notre objectif de 300 groupes de médecine familiale au Québec. Je salue le dévouement des infirmières, médecins et professionnels de la santé qui soignent les Québécois. Avec leur concours et l'appui essentiel des groupes communautaires, nous mettons chaque jour de l'avant des solutions nouvelles pour répondre aux besoins. Grâce à tous ces efforts, notre système de santé est dynamique et en pleine évolution.
Comme partout en Occident où la population vieillit, le nombre de Québécois aux prises avec le cancer s'accroît. Nous avons renforcé la lutte contre le cancer. Nous avons notamment ramené à quatre semaines le délai maximal séparant le premier diagnostic du premier traitement.
J'annonce la création de la Direction québécoise du cancer. Cette direction va coordonner les services et les ressources afin de réduire les délais et d'assurer que toute personne touchée ait un accès rapide aux meilleurs services et aux meilleurs spécialistes, au meilleur moment.
La Direction québécoise du cancer veillera aussi : à l'amélioration continue des soins et des services; au déploiement de programmes de dépistage; à l'utilisation des meilleurs médicaments; à la coordination des soins palliatifs; et à la mise en place du Registre québécois du cancer, pour mieux suivre l'évolution des besoins. Cette direction sera assistée par une équipe de spécialistes choisis par leurs pairs, de proches aidants et de personnes atteintes de la maladie. Elle s'appuiera sur des centres intégrés de cancer présents sur tout le territoire du Québec.
Le vieillissement de la population pose aussi, pour notre société, de nouveaux défis. Nous devons adapter l'organisation de nos services à nos aînés.
J'annonce l'élaboration de la politique « Vieillir chez soi ». À travers cette initiative, cinq ministres travailleront ensemble pour que l'État offre dans chaque région des services adaptés et conçus pour améliorer la vie des aînés.
« Vieillir chez soi », c'est reconnaître que nos aînés actifs et en santé veulent vieillir à la maison. D'autres personnes âgées ont besoin d'une aide plus soutenue et de soins adaptés. Il faut faire mieux pour les aider.
J'annonce la mise en œuvre d'un plan de services intégrés pour les personnes âgées. Ce plan comporte plusieurs volets : davantage de soutien à domicile; davantage de places de convalescence;davantage de places en ressources intermédiaires et en soins de longue durée.
Ce plan aura aussi pour effet de faire baisser la pression qui s'exerce sur les salles d'urgence et de réduire les délais d'hospitalisation. Nous allons, d'autre part, poursuivre avec détermination nos efforts d'encadrement des résidences privées pour personnes âgées. Nos aînés ont droit à un environnement sécuritaire et à des services de qualité. Comme société, nous devons assurer le respect envers nos aînés et préserver leur dignité.
Voilà quelles sont nos priorités pour les prochaines années. À travers ces cinq priorités, l'éducation, l'emploi, le développement durable, la maîtrise de nos ressources et la santé, nous allons ouvrir les voies de l'avenir et affirmer notre culture. Le Québec se démarquera.
Nous allons donner un nouvel élan à Montréal, la métropole canadienne qui a le mieux résisté à la crise économique. Le redéploiement de ses infrastructures de transport se poursuivra, ses universités grandiront, et elle accueillera l'une des plus grandes concentrations au monde d'institutions et d'entreprises vouées au développement des sciences de la vie. Nous accompagnerons la ville de Québec dans ses projets culturels et sportifs et dans ses ambitions olympiques. Notre capitale nationale est une inspiration par son dynamisme et sa confiance.
Au quotidien, nous serons soucieux de travailler avec tous nos partenaires, qu'ils soient des milieux municipal, régional, syndical, patronal ou communautaire. Nous continuerons à maintenir et à développer des relations harmonieuses avec nos voisins du Canada et des États-Unis. Nous conclurons avec le gouvernement fédéral des ententes qui vont dans le sens des intérêts du Québec et des intérêts du Canada. Car un fait demeure : les Québécois sont les coauteurs de l'histoire de ce pays, et le Canada est à son meilleur lorsque le Québec influence sa marche.
Mesdames, Messieurs, chers Québécois, voici de quelle façon nous allons travailler pour faire du Québec une force d'attraction et inspirer le monde par notre dynamisme, notre originalité et notre confiance en notre destinée. Merci.
Maintenant, Monsieur le Président, conformément à l'article 45 du Règlement de l'Assemblée nationale, j'invite cette chambre à adopter la motion suivante : Que l'Assemblée nationale approuve la politique générale du gouvernement.
***
Jean Charest
_ Premier ministre du Québec


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