LOI SUR LES SOINS DE FIN DE VIE

Nouvelle politique?

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« Personne n’a le monopole des bonnes idées »

Il y a dans l’évolution du projet de loi sur les soins de fin de vie (ancien projet de loi 52), ressuscité par le gouvernement Couillard, plusieurs éléments de cette « nouvelle manière de faire de la politique » que tant ont appelée de leurs voeux depuis 2011. Peut-il être plus qu’une exception qui confirme la règle ?

Parmi ces éléments d’une « nouvelle manière de faire de la politique », il faut souligner d’abord — et surtout — l’absence totale de partisanerie dans la préparation de ce projet de loi ; préparation s’étant déroulée sur presque cinq années et ayant survécu à deux changements de gouvernement. Or, s’il y a une chose qui rend la politique détestable aujourd’hui, aux yeux de nombreux électeurs, c’est bien la partisanerie. Cette maladie infantile qui réduit les « esprits à l’état de gramophones » (selon l’image de George Orwell) ; de simples disques recrachant une « orthodoxie ».

Lors du « débarquement » du 6 juin 2011 où elle avait choisi de quitter le caucus péquiste, Louise Beaudoin avait pourfendu d’éloquente manière le sentiment partisan qui « souvent rend aveugle », force à toujours être dans la certitude, jamais dans le doute ; impose un « ton guerrier », conduit à considérer les adversaires « comme des ennemis » ; impose un unanimisme et la « rigidité implacable de la ligne de parti ». Des maux « dont la politique est en train de mourir ici et ailleurs », déplorait-elle.

Justement (et c’est là un deuxième élément) : lors du vote qui sera tenu bientôt sur la Loi concernant les soins de fin de vie, nos élus pourront, pour une rare fois à l’Assemblée nationale, voter « librement ». C’est-à-dire, pour reprendre les expressions usuelles : selon leurs « propres convictions », « selon leur conscience ». Bref, ils s’affranchiront de l’état de simples lecteurs du fichier MP3 de leur parti (pour actualiser l’image d’Orwell…).

« Le parlementarisme a servi la population correctement », a déclaré avec raison le ministre de la Santé Gaétan Barrette, jeudi. Ce nouveau politicien, lui-même si prompt à adopter le « ton guerrier », à fustiger ses adversaires avec les mots les plus durs, a pourtant su décrire les choses en termes justes : « On n’est pas là pour se juger les uns les autres, on est là pour faire un exercice de représentation et de réflexion et d’en arriver à un moment donné à un vote qui représente éventuellement l’opinion de la majorité de la population. Moi, je trouve ça très sain. » Souhaitons qu’il n’oublie pas ses belles paroles en d’autres circonstances.

Car c’est précisément ce dont rêve une bonne partie de la population lorsqu’elle pense à une « nouvelle politique ». Les enjeux d’aujourd’hui sont trop complexes pour être traités à coups de caricatures de type « gramophone ». On souhaiterait que nos élus, plus souvent, tentent de définir les solutions ensemble comme ils l’ont fait pour les soins de fin de vie. À cet égard — et même s’ils sont dus à un effet « lune de miel » —, les propos de Philippe Couillard, dans son discours de mercredi, sur l’ouverture « à l’égard des projets de loi déposés par les députés de toutes les formations politiques », ont quelque chose de rassurant. « Personne n’a le monopole des bonnes idées », a-t-il dit. Qui contredirait cette affirmation antipartisane ?

Bien sûr, notre système parlementaire restera par essence contradictoire. Cela n’a pas que de mauvais effets. Des procureurs aux thèses opposées se confrontent, un peu comme au tribunal. Une partisanerie crasse peut en découler. Mais cette situation permet souvent un sain choc des idées (nombre de projets de loi finissent par être adoptés à l’unanimité). Encore faut-il que les acteurs plongés dans ce système utilisent leur marge de manoeuvre à bon escient. Nos élus en sont capables, ils nous l’ont démontré ces dernières années, même sur un sujet délicat comme celui des soins de fin de vie.


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