NI – NI en SYRIE, c'est OUI – OUI à SARKOZY !

Gauche-Droite : le débat

Le débat fait rage entre le Parti de la gauche grecque et une Nouvelle association progressiste, un débat qui porte à réfléchir. Depuis bien des années moult « gauches » n’ont pas su quelle position adopter face aux guerres téléportées, aux agressions téléguidées, aux coups d’État télégraphiés tantôt en Amérique Latine, tantôt en Asie, ensuite en Afrique et plus récemment au Moyen-Orient, région dépositaire de vastes ressources d’hydrocarbures stratégiques si importantes pour l’épanouissement des forces productives et des profits.
La gauche doit-elle se désintéresser de ces conflits inter-impérialistes où des prolétaires arabes, ivoiriens, nigérians, serbes, bosniaques, kosovars, nicaraguayens, irakiens, afghans, somaliens, libyens, syriens et iraniens tombent sous les balles tantôt des forces répressives nationales, tantôt sous les canonnières des forces d’intervention et d’insurrection, parfois de type « Contras », avec thuriféraires entraînés, armés et payés par une puissance étrangère ? (1)
Au contraire, la gauche devrait-elle invariablement renvoyer dos à dos les forces belligérantes et proclamer le fameux Ni-NI ; ni Saddam Hussein – ni George Bush ; Ni Kadhafi – ni Sarkozy ; ni Bachar al-Assad – ni Barak et Hilary ; et accorder tout le soutien au peuple, abstraction commode, le temps d’une lâcheté – le temps de fermer les yeux sur un massacre appréhendé.
Mais où se situe le peuple dans ces guerres de rapines, serions-nous tentés de demander ? Peut-on se fier aux médias occidentaux pour connaître les desideratas des peuples mortifiés, pris entre le feux croisé des insurgés équipés et armés de l’étranger et l’armée nationale délitée ? (2) Enfin, la gauche ne devrait-elle pas plutôt soutenir l’un des belligérants – l’une des puissances aux commandes de l’une des alliances et faire front avec une fraction impérialiste contre une autre, favoriser la plus timide contre la plus intrépide ou la plus désespérée ?
Dans un texte récent, le Parti communiste grec (PKK), celui qui a mené la résistance anti-fasciste en Grèce au cours de la Deuxième guerre mondiale, propose de soutenir l’option du Ni-NI mais en demi-teinte, presque comme un aveu de culpabilité. Voici ce qu’un membre du comité central de ce parti a été autorisé à publier :

« Comme c’est une erreur tragique de diviser la bourgeoise en « nationale » et en « asservie à l’étranger » [compradore - NdT], il est également équivoque et dangereux de faire le choix d’une union impérialiste, choisir un impérialisme. Le mouvement communiste et le mouvement ouvrier doivent avoir une position d’opposition claire contre toute union impérialiste, ils doivent lutter pour la sortie des pays des plans et des unions impérialistes, par le renversement simultané du système capitaliste qui les a produites. » (souligné par nous NDLR) (3).

Le Bureau de la Nouvelle association Staline s’adressant à leurs camarades grecs répond ceci : « Je ne vois aucune incompatibilité avec la défense des intérêts du mouvement ouvrier, à engager une alliance (qui par sa nature même est susceptible d’être temporaire et peut au gré des circonstances cesser ou se transformer en conflit ouvert), avec une force impérialiste, contre une autre force impérialiste encore plus dangereuse, plus néfaste. (…) Comment pouvons-nous alors émettre des réserves quand il s’agit de défendre résolument les indépendances de la Libye, de la Syrie, de l’Iran … (et demain peut-être de l’Algérie…) contre l’impérialisme, surtout notre impérialisme!!! » (4).
Malgré les apparences, ces deux positions s’apparentent. La première renie toute alliance avec quiconque mais soutient l’union du prolétariat avec chacune des factions bourgeoisies nationalistes européennes, lançant le slogan de la lutte pour sortir la Grèce de l’Euro, de l’Union européenne, et de toute autre alliance ou organisation financière ou économique impérialiste, laissant croire aux ouvriers grecs que la sortie de l’euro et le rétablissement de Drachme apportera un renouveau économique quelconque à ce pays en faillite, ce qui est faux. Cette proposition de sortir de l’Euro et de l’Union européenne n’a de valeur et ne peut constituer une solution véritable à la crise en Grèce qu’à la condition impérative qu’elle s’accompagne simultanément du renversement total de l’ordre capitaliste, du pouvoir politique bourgeois en Grèce.
Par ailleurs, « défendre l’indépendance de la Libye et de la Syrie » comme il est dit est une fumisterie. La Libye et davantage encore la Syrie sont deux pays qui font partie de la zone d’influence de la Russie et de la Chine et la présente attaque menée par le triumvirat américano-franco-britannique vise simplement à ramener la Syrie dans le giron européen après avoir envahi la Libye et occis Kadhafi.
Un représentant du Parti communiste français « frère » de ces compères pousse plus loin le vérin et dévoile le pétrin chauvin dans lequel Gerin s’écarte : « Prenons à bras le corps la question de la nation. Prenons ce qu’il y a de meilleur dans les valeurs et les idéaux républicains. Osons être offensifs avec le drapeau de la laïcité car l’héritage révolutionnaire de 1789 (pas celui de 1917, vous aurez remarqué NDLR) (…) L’édifice du siècle des Lumières, des valeurs universelles et singulières de 1789 nous imposent comme devoir de défendre la République, l’État de droit et du bien-être. » (5). Le PCF propose pour l’avenir-futurologue (XXIe) de l’État-nation française le retour au siècle des lumières (le XVIIIe). De plus, tous les prolétaires de France seront interloqués d’apprendre qu’ils vivent sous « l’État de droit et du bien-être » ! Plus loin, dans son envolée oratoire, le député communiste propose de voter « Made in France » aux prochaines présidentielles françaises. De là à proposer de se retrousser les manches pour sauver la ‘patrie’ capitaliste en danger, il n’y a moins qu’un pas. En 1946, Thorez y était déjà.
On nous permettra de confronter ces trois précédentes propositions avec celles d’un intellectuel européen indigné d’être accusé – par une journaliste bien payée – de soutien à des dictateurs enragés pour avoir vigoureusement dénoncé les agressions de l’OTAN et des États-Unis. Jean Bricmont écrit ceci : « L’astuce qui consiste à dénoncer les opposants aux guerres comme soutenant la partie à laquelle on fait la guerre est vieille comme la propagande de guerre. Dans les dernières décennies, j’ai ainsi « soutenu » Milosevic, Saddam Hussein, les talibans, Kadhafi, Assad et peut-être demain Ahmadinedjad. En réalité, je ne soutiens aucun régime, je soutiens une politique de non-ingérence, c’est-à-dire que non seulement je rejette les guerres humanitaires, mais aussi les élections achetées, les révolutions colorées, les coups d’État organisés par l’Occident. ». Le professeur belge ajoute férocement mais justement : « Au mieux, une partie de la gauche se réfugie dans le « ni-ni » : ni l’Otan, ni le pays attaqué au moment donné. Personnellement, je considère que notre devoir est de lutter contre le militarisme et l’impérialisme de nos propres pays, pas de critiquer ceux qui se défendent par rapport à eux, et que notre position n’a rien de neutre ni de symétrique, contrairement à ce que suggère le slogan « ni-ni » (6).
La gauche ne doit-elle pas soutenir la classe prolétarienne et les peuples révoltés et affamés partout dans le monde ? La gauche ne devrait-elle pas appuyer la classe ouvrière syrienne comme elle aurait dû appuyer la classe ouvrière libyenne et serbe et les autres ? Oui, nous le pensons courageusement. Aussi, la première tâche ne serait-elle pas de connaître la position de la classe prolétarienne dans le pays soumis aux agressions et aux infiltrations étrangères dans chaque pays exorcisé que la phalange impérialiste met « temporairement » en garde à vue prolongée ?
Un indice pour faciliter l’investigation. Dès qu’une organisation, un parti, un groupe de révoltés, une armée de libérer spontané préconise l’ingérence de forces militaires étrangères, l’attaque humanitaire de ses congénères sous bombardement soi-disant chirurgical, écartez ce groupuscule fasciste, car il ne représente certainement pas le peuple ou les prolétaires concernés qui, nous l’avons constaté, n’apprécient jamais les bombardements pseudos chirurgicaux. En Irak, dix ans de ces bombardements de « précision » ont laissé un million de morts collatéraux et des millions de réfugiés toujours parqués dans des camps de paumés dans les pays étrangers. En Libye, les zones aériennes protégées ont servi à larguer des bombes à sous-munition et à l’uranium appauvri sur des milliers de civils qu’on venait soi-disant réchapper de l’enfer et qui sont aujourd’hui enterrés ou atterrés, regrettant le temps béni de Kadhafi. La population libyenne ne sait plus comment se défaire de ses « libérateurs » intégristes, qu’elle n’a jamais souhaités ni-ni invités.
En Égypte et en Tunisie, les soulèvements spontanés étaient dirigés directement contre le pouvoir national réactionnaire; aucune force militaire d’intervention étrangère n’est venue défendre les intérêts des puissances impérialistes de tutelle. Cela n’était pas nécessaire, la direction politique petite bourgeoise, et le mouvement des jeunes indignés inexpérimentés se sont laissé piéger. Et aujourd’hui dans ces deux pays les anciennes cliques qui formaient l’entourage des dictateurs déchus poursuivent la politique de Ben Ali sans Ben Ali et de Moubarak sans Moubarak comme il était facile de le prévoir (7). Toutefois, à aucun moment il n’était de mise d’en appeler à l’une ou l’autre des puissances impérialistes pour intervenir. Les classes ouvrières tunisienne et égyptienne, libyenne et syrienne doivent faire leurs classes. La révolution ne s’importe pas de l’étranger et surtout elle ne peut être dirigée par Obama, par Sarkozy, ni-ni par Harper ou Cameron.
Pour la gauche il ne saurait être question d’en appeler à l’intervention d’une puissance ou d’une alliance impérialiste pour sauver un peuple en danger. Le peuple libyen avait déjà eu l’expérience de la domination coloniale italienne, puis britannique, et il savait d’instinct que le joug du Qatar et de l’Arabie Saoudite alliées des franco-britanniques serait mortel pour leur indépendance. En quoi le peuple syrien sera-t-il mieux traité par la section de la bourgeoisie compradore syrienne sous la botte franco-américaine que par la section alliée aux impérialistes russes et chinois ? Le peuple syrien ayant déjà eu l’expérience de la domination coloniale française, pouvez-vous comprendre son peu d’enthousiasme à retourner à ces temps éculés ?
Dans tous les pays du monde, l’intérêt de la classe prolétarienne, c’est de conserver la paix militaire à tout prix (au milieu de la guerre de classe qui se poursuit chaque jour bien compris) jusqu’au jour où les conditions objectives et subjectives de l’insurrection révolutionnaire seront réunies. Ce jour-là, il y aura insurrection et violence populaire et nous les appuierons sans condition. Soyez sans crainte aucune alliance impérialiste ne volera au secours des révoltés – insurgés – armés… vous saurez alors de quel côté frapper.
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(1) http://www.oulala.net/Portail/spip.php?article5536 et
http://www.france-irak-actualite.com/article-13-officiers-fran-ais-prisonniers-en-syrie-100868796.html
(2) http://www.michelcollon.info/Syrie-autant-en-emporte-le-vent.html
(3) http://dossiers-du-bip.fr/News/2012-01-critere-fondamental.html
(4) http://dossiers-du-bip.fr/News/2012-02-reponse-critere-fondamental.html
et http://solidarite-internationale-pcf.over-blog.net/article-le-pc-grec-kke-repond-a-pierre-laurent-president-du-pge-et-secretaire-general-du-pcf-les-larme-101185943.html
(5) http://www.blogandregerin.fr/
(6) http://www.michelcollon.info/Lettre-a-une-journaliste.html
http://www.mondialisation.ca/index.php?context=va&aid=23260 et
http://www.agoravox.fr/actualites/international/article/le-printemps-arabe-l-agression-103059


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