Le rapport annuel du Commissaire aux langues officielles déposé la semaine dernière est à la fois source d'encouragement et d'inquiétude pour les minorités linguistiques au Canada et pour tous ceux préoccupés par la vitalité de la dualité linguistique de notre pays.
En 2003, j'ai eu l'honneur de lancer le Plan d'action pour les langues officielles, que les communautés de langue officielle appellent encore Plan Dion. Un plan qui allait injecter plus de 750 millions de dollars sur cinq ans dans plusieurs domaines stratégiques pour l'épanouissement des communautés minoritaires francophones et anglophones à travers le pays, tels que l'éducation, la santé et la petite enfance. Au chapitre des bonnes nouvelles, le Commissaire affirme que le Plan d'action «a, tout compte fait, réussi en grande partie son pari. Il a donné le nouvel élan tant souhaité à la politique des langues officielles».
Ce pari au coeur du Plan d'action demeure l'agrandissement de l'espace francophone pour combattre l'assimilation. Cet espace francophone au Canada continuera de s'élargir grâce au travail acharné des communautés mais aussi grâce à la Charte des droits et libertés qui célèbre cette année son 25e anniversaire.
Il est triste et affligeant de constater que le premier ministre du Canada, Stephen Harper, n'ait pas daigné lever le petit doigt pour fêter avec toutes les communautés à travers le Canada la Charte et les institutions qui l'appuient.
Travail de sape
Au contraire, le premier ministre et son gouvernement ont été trop occupés depuis leur élection à saper les institutions essentielles au développement des droits des minorités linguistiques comme le Programme de contestation judiciaire (PCJ) ou la Commission canadienne du droit. Il faut bien comprendre l'importance du Programme de contestation judiciaire.
En aidant financièrement les minorités à faire valoir leurs droits devant les tribunaux, le PCJ a permis, entre autres, aux communautés minoritaires de contrôler leurs écoles et de combattre l'assimilation. Comme l'a si bien expliqué Gisèle Lalonde, la grande dame des droits de la minorité franco-ontarienne, la semaine dernière: «La fin du Programme de contestation judiciaire est une attaque sur les plus faibles dans notre société. Si ce programme n'existait pas, nous, les minorités francophones, ne serions pas ici aujourd'hui.»
Le gouvernement conservateur doit, comme le demandent l'Opposition officielle et le commissaire Fraser, indiquer dès aujourd'hui comment il entend reconduire le Plan d'action dont le financement prend fin en 2008. Il doit aussi immédiatement restaurer le Programme de contestation judiciaire.
Mais au lieu de permettre au Comité permanent des langues officielles de la Chambre des communes d'examiner ces questions, le premier ministre a annulé les réunions du comité, deux minutes avant l'heure prévue des audiences, insultant ainsi des témoins qui s'étaient déplacés du Manitoba. Le premier ministre Harper a aussi refusé de nommer un nouveau président issu de son caucus pour diriger les travaux du comité après que la majorité des députés aient retiré par un vote leur confiance envers le président suite à son comportement inacceptable.
À cela vient s'ajouter la décision du premier ministre Harper de nommer des unilingues anglophones à des postes importants dans la vie des francophones en situation minoritaire comme des juges au Nouveau-Brunswick, le président de la Commission de la capitale nationale ou le nouvel Ombudsman fédéral des victimes d'actes criminels.
Les décisions et le comportement du premier ministre Harper ne présagent rien de bon pour les minorités linguistiques au Canada. Selon le Commissaire, «les gestes et surtout l'inaction du gouvernement Harper depuis son élection, sèment le doute quant à son engagement véritable» envers les communautés de langue officielle.
L'élan du Plan d'action doit être poursuivi. Les communautés de langues officielles à travers le pays pourront toujours compter sur mon leadership personnel et celui du Parti libéral pour faire avancer la cause de la dualité linguistique au Canada. Mes gestes et l'action de mon gouvernement ne sèmeront jamais le doute. Le Canada a besoin d'un Plan Dion II.
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Stéphane Dion
L'auteur est le chef du Parti libéral du Canada.
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