Lettre ouverte à Pauline Marois

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La confiance, c'est la capacité d'espérer

Un an déjà. Personne ne peut oublier cette soirée où tout a failli basculer. Nous portons tous ces images en nous et elles ne s’effaceront jamais. Ce sont des moments terrifiants qui ont fait leur lot de dommages. Puis, dans les jours qui ont suivi, je t’ai vue te relever, reprendre ton souffle et foncer sur cette route où on t’avait déstabilisée, mais pas anéantie. Heureusement.

C’est sûr que je t’ai à l’oeil, Madame ma Première Ministre. Même de loin. Par amitié d’abord et avant tout. Il me semble que j’ai toujours été capable, même de loin, de deviner ce qui t’avait heurtée au point de remettre tes objectifs en question, parfois. J’ai souvent compris, parfois même avant toi, pourquoi tu acceptais les fameuses guerres de tranchées dont on te faisait porter toute la responsabilité et que tu affrontais en silence, parfois avec le sourire, alors qu’il aurait suffi d’une petite tape d’encouragement sur l’épaule pour que tu éclates en sanglots. Il m’arrive de penser que parfois, je te connais mieux que toi-même. Suprême prétention… parce qu’au fait, il m’arrive encore de me demander pourquoi tu dis telle chose, pourquoi tu choisis telle route et, finalement, où tu trouves les forces et le calme qui te portent et qu’on sent chez toi, même dans les pires moments.

Le 4 septembre 2012, ta victoire, malgré tout si fragile, nous faisait réaliser qu’un gouvernement minoritaire ne serait pas de tout repos et que l’aventure serait à la fois stimulante et dangereuse, car l’appétit débordant de tes petits nouveaux ne se cachait déjà plus. Ton absence des célébrations de fin d’année a été mise sur les responsabilités inattendues que tu venais de découvrir dans la corbeille de noces que les libéraux venaient de déposer à ta porte. D’autres prétendaient que le feu était déjà pris entre les plus flamboyants de ton équipe. Ça m’a fait sourire, moi qui en ai vu tant d’autres. Et je me suis dit que j’attendrais le moment que tu choisirais pour nous exposer la route que tu entendais ouvrir pour nous tous.

Au début, tes nouveaux députés avaient tous l’air de « jeunes mariés » dans des costumes de location. Ils en étaient souvent drôles. Puis, ils se sont calmés, car ce ne sont pas les dossiers qui manquent. Nous, les citoyens, on était un peu dans le brouillard. La commission Charbonneau paraissait lente. On a craint qu’il ne s’y passe rien, comme si quelqu’un avait échappé le ballon. On croyait que la police se traînait les pieds, que les maires montrés du doigt depuis si longtemps étaient devenus intouchables et, surtout, que la relève était à pied d’oeuvre depuis longtemps pour assurer la continuation de la collusion et de la corruption. Tout allait mal.

On t’imaginait, toi, enfermée dans tes bureaux, à refaire la gestion de l’ingérable ? À revérifier, ciseaux à la main, où il serait possible de rogner sans qu’on en soit étouffés ou tout simplement à mettre les petits pots dans les grands pour que le coup d’oeil soit plus tentant ? Nous avons pensé que tu ne t’en sortirais pas, ce que souhaitaient visiblement les oppositions qui applaudissaient à tes problèmes.

Plus droite, plus fonceuse

Puis doucement, tu es ressortie du mutisme. Tu avais pris le temps de revoir ce qu’il y avait dans chacun des dossiers, tu commençais à avoir une bonne idée de ce que tu pourrais faire maintenant et de ce qui devrait attendre un peu. Tu as fait le tour du Québec avec le sourire aux lèvres et la main tendue. Tu as surmonté ta crainte du 4 septembre 2012 pour en ressortir plus forte, plus droite et plus fonceuse.

Tu as fermé le bec à pratiquement tous ceux qui avaient tendance à lever le nez sur le fait que ce soit une femme qui occupe le poste de première ministre et pour ça, moi, je te dis merci. Parce que si tu ne l’avais pas fait, nous serions toutes retombées 50 ans en arrière et il aurait fallu payer cher la formidable prétention que nous avions eue de dire qu’une femme peut non seulement exercer le pouvoir, mais qu’elle le fera peut-être mieux que bien des hommes qui traitent ce pouvoir-là comme un autre échelon de leur ascension personnelle dans l’échelle de la réussite sociale ou politique. L’ambition qui les habite n’est pas faite pour servir les citoyens, mais pour les servir eux-mêmes. Après un an de pouvoir, dans ton cas Pauline, on a fini par comprendre que tu nous fais passer avant ton succès à toi et que tu pratiques la démocratie simplement, autant que tu le peux, avec enthousiasme.

L’enthousiasme est comme une plante verte, il faut l’arroser avec régularité pour qu’elle donne ses meilleures idées. Mais ça, tu sauras trouver. Le plus beau cadeau, Pauline, après une première année, c’est que les citoyens sont en train de réapprendre la confiance. C’est tout un cadeau après ce qu’on a vécu.

Bonne continuation Madame la Première Ministre. Bon courage aussi.


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