Les énergies fossiles séduisent la Caisse de dépôt

Elle a haussé ses investissements dans le pétrole, le gaz et le charbon à plus de 16 milliards en 2016

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Fausse route !

La Caisse de dépôt et placement du Québec a augmenté ses investissements dans les énergies fossiles en 2016, selon une recension réalisée par l’organisme Recycle ta Caisse. Les avoirs du principal investisseur institutionnel du Québec dans ce secteur atteignaient ainsi 16,7 milliards de dollars à la fin de 2016.

Les résultats de l’analyse publiée mercredi indiquent que la valeur des placements dans le charbon, le pétrole et le gaz naturel a connu « une importante augmentation » de 4,5 milliards de dollars entre 2015 et 2016, soit sur une période d’un an.

Leur proportion dans le portefeuille global de la Caisse de dépôt est ainsi passée de 4,9 % à 6,2 %, toujours selon les calculs inscrits dans ce document mis en ligne par la Fondation David Suzuki et Greenpeace. Uniquement dans le portefeuille d’actions, la part des énergies fossiles est passée de 7 % à 9,7 %.

En plus d’augmenter sa participation dans certaines entreprises du secteur, la Caisse a ajouté de nouvelles sociétés impliquées dans les énergies fossiles à son portefeuille d’investissements.

Sables bitumineux

Un peu plus de la moitié des placements dans le secteur pétrolier et gazier se trouveraient dans des entreprises liées à l’exploitation du pétrole des sables bitumineux. Les avoirs du gestionnaire de régimes de retraite de millions de Québécois s’y élevaient à 8,4 milliards de dollars à la fin 2016.

Les pétrolières impliquées dans les projets de pipelines sont notamment bien présentes. À titre d’exemple, le rapport cite l’augmentation de 408,5 millions de dollars de la participation dans TransCanada, qui est ainsi passée plus de 1 milliard de dollars à la fin de l’année dernière.

Dans le cas d’Enbridge, les investissements sont passés de 627,6 millions au 31 décembre 2015 à 930,6 millions à la fin de 2016. On parle donc d’une hausse de plus de 300 millions (48 %) des avoirs dans cette pétrolière.

L’investisseur institutionnel est également plus impliqué dans Pembina Pipeline, une entreprise qui exploite des réseaux de pipelines et de gazoducs dans l’ouest du pays. La valeur des actifs de la Caisse dans Pembina a bondi de 73 % entre 2015 et 2016, passant de 295 à 510 millions.

Réalité climatique

« La Caisse tourne le dos à l’Accord de Paris et contribue à accélérer la crise climatique chaque fois qu’elle augmente ses investissements dans le charbon, le pétrole des sables bitumineux et les pipelines », selon le porte-parole du groupe Recycle ta Caisse, Sébastien Collard.

Selon un rapport publié plus tôt cette année par l’Agence internationale de l’énergie, le respect des engagements pris par les États dans le cadre de l’Accord de Paris signifierait de diviser par deux la consommation de pétrole d’ici 2050. Un tel recul signifierait « l’arrêt » pur et simple de l’utilisation du pétrole de l’Arctique, mais aussi des sables bitumineux du Canada.

Pour Éric Pineault, professeur au Département de sociologie à l’UQAM, la Caisse doit donc entreprendre « un processus organisé et planifié de désinvestissement qui commence par les actifs “carbone” les plus à risque, en particulier le charbon et les sables bitumineux, ainsi que les actifs liés de près à ces secteurs, dont les entreprises de pipelines qui desservent ce marché ».

Selon une étude de l’organisation DivestInvest publiée à la fin de 2016, l’actif des investisseurs institutionnels et individuels qui veulent retirer leurs billes de ce secteur se situe à plus de 5000 milliards de dollars américains, un record.

Énergies renouvelables

À moyen terme, le pétrole et le gaz sont toutefois là pour de bon, soulignait récemment la Caisse, en réponse à des questions du Devoir.

« Nous sommes en marche vers une transition énergétique vers une économie qui est sobre en carbone. Mais cette transition ne se fera pas du jour au lendemain. Nous avons donc encore des investissements dans les énergies traditionnelles, dans les entreprises qui sont les plus performantes sur le plan environnemental », expliquait ainsi son directeur principal des communications avec les médias, Maxime Chagnon.


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