Les crachats dans la soupe

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Que de contorsions et de détours pour parvenir enfin à ce constat très juste et très lucide !

Lors du récent colloque organisé par l’UPAC pour souligner son cinquième anniversaire, le professeur Denis Saint-Martin expliquait que la crainte de l’incertitude politique et économique associée à la souveraineté avait pu amener les milieux d’affaires à contribuer systématiquement à la caisse électorale du PLQ au cours des dernières décennies et favoriser ainsi la corruption de nos moeurs politiques.

Que la question nationale puisse être un vecteur de corruption ne devrait d’ailleurs étonner personne. Le scandale des commandites a clairement démontré que le camp fédéraliste était prêt à utiliser tous les moyens, y compris celui-là, pour préserver l’unité du pays.

Certes, le PQ a aussi pratiqué le financement sectoriel, comme se plaisent à le rappeler les libéraux dans l’espoir que la turpitude des uns arrive à justifier celle des autres. Il n’en demeure pas moins que les péquistes font presque figure d’amateurs quand on les compare aux grands collecteurs de fonds du PLQ.

À l’exception de l’intermède de 18 mois du gouvernement Marois, les libéraux ont été au pouvoir de façon ininterrompue depuis 2003. Il semble tomber sous le sens que les entreprises sont plus enclines à favoriser le parti dispensateur de contrats. Cette apparente logique ne s’applique toutefois que lorsque les libéraux sont au pouvoir.

Une comparaison faite par Le Devoir en 2010 à partir des données du Directeur des élections du Québec avait donné des résultats étonnants. Entre 1994 et 2002, le PLQ, alors dans l’opposition, avait recueilli en moyenne 4,37 millions de dollars par année. Entre 2003 et 2008, années de pouvoir, les contributions à la caisse libérale ont explosé, passant à 8,3 millions en moyenne.

Pourtant, qu’il soit au pouvoir ou dans l’opposition, le PQ a recueilli sensiblement les mêmes sommes et même un peu moins lorsqu’il formait le gouvernement : 4,68 millions entre 1994 et 2002, 4.86 millions entre 2003 et 2008. Jean Charest soutient qu’il dirigeait un gouvernement « honnête, intègre », mais il est clair que les entreprises n’attendaient pas les mêmes retours d’ascenseur du PQ.

Outre la question nationale, on peut penser que le « préjugé favorable envers les travailleurs », dont l’adoption de la loi antibriseurs de grève par le gouvernement Lévesque s’était voulue le symbole, n’est pas étranger à l’engouement des milieux d’affaires pour le PLQ.

Un parti qui s’engage à « élargir la syndicalisation », présentée comme la « voie privilégiée » vers une société juste et plus humaine, comme on pouvait jadis le lire dans le programme du PQ, est nettement moins susceptible de s’attirer leurs faveurs. Dans sa vie antérieure, Pierre Karl Péladeau était d’ailleurs un des plus féroces détracteurs des syndicats, dont il déplorait le pouvoir excessif dans la société québécoise.

Chose certaine, les milieux d’affaires ont clairement affiché leurs couleurs lors du référendum de 1995. Excédé de voir la classe d’entrepreneurs qu’il s’était employé à faire naître se ranger systématiquement dans le camp du non, Jacques Parizeau avait fustigé l’égoïsme de ces millionnaires qui crachaient dans la soupe après avoir largement bénéficié de l’appui de l’État et qui partageaient le même « mépris des Québécois ». Rien ne permet de croire qu’ils agiraient différemment s’il y avait un autre référendum.
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