Le sac à dos à Falardeau

"Le sac à dos à Falardeau", mp3 - Parole et musique de Manon VincentAvec des « si » et des « peut-être » On t’explique que ta vie s’en va C’est bien pire qu’être ou ne pas être D’ici trop tôt, tu s’ras plus là

Pierre Falardeau : 1946-2009

"Le sac à dos à Falardeau", mp3 - Parole et musique de Manon Vincent "[www.Manon Vincent.com->www.manonvincent.com]" (la nièce dont je parle dans mon article )
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Je ne connaissais pas Pierre Falardeau, enfin pas vraiment, que pour lui avoir parlé à quelques occasions, sur un coin de rue ou dans une assemblée publique. Mais on avait comme qui dirait des visages qu’on s’connait...
Quand je parlais de lui, je disais toujours « mon ami Falardeau ». Surtout pas pour me grandir de son personnage tel un groopie, mais parce c’est ainsi que je le sentais. Il était de ces êtres qu’on aime de suite, de ces êtres qu’on frôle par moment sans que la vie nous permette jamais de les embrasser dans nos bras.
Je savais qu’il était malade et, dernièrement, ma nièce m’a fait parvenir un courriel dans lequel elle me disait que «ton ami Falardeau » est dans la même chambre que mon amie Sylvie à Notre-Dame...». Quelques jours plus tard, je lui ai fait parvenir ce message :
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24 août 2009
Et alors ? Donne-moi un son de cloche. Ça fait deux jours que je vois Falardeau et ta Sylvie dans ma tête, couchés dans la même chambre d'hôpital, en jaquette bleue, bordés de soins palliatifs... J'en ai même rêvé.

Et mon vieil ami Denis hier... Pour Pierre, je savais depuis un moment, un de ses amis me l'avait dit et depuis quelque temps, je ne le voyais plus sur Mt-Royal... jaser avec les gens et je me disais... j’espérais....

Putain de crabe !

Tonton

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25 août 2009
Allo Tonton,

Ton ami Falardeau y va pas du tout. Il a vu au moins 10 médecins hier. Des oncologues, des spécialistes, même des psy...Il a posé des questions et ils ont répondu : «Pas beau »! ls parlent de métastasses un peu partout, dans le bedon et peut-être même au cerveau. Il a très mal au dos, aux os....bref... Il voulait de la chimio mais les doc ont refusé. Ça n'aurait rien donné.

Lui, il était fort devant eux. Il a dit à un des doc : « Moé t'sé, si j'peux plus penser, si j'peux plus écrire, ben j'aime mieux mourir...». Il rigolait même. Il n'a pas versé une larme. Toute une pléiade de spécialistes venaient le voir pour le voir.... Une petite conne est venue lui demander ce qu'il faisait comme travail. Il lui a répondu : «Je pense».
Il était fort et patient. Mais quand ce cirque est parti, son regard tombait dans une sorte de vide. J'oublierai jamais ces yeux-là. On a pas beaucoup parlé. Quelques formalités tout au plus, je lui passais quelques revues, lui rendais quelques services. J'ai réussi à stopper quelques préposés pour qu'ils le laissent un peu dormir. Crisse qu'y sont fatiguants des fois dans les hôpitaux!

Puis vers 15h, les infirmiers sont venu le chercher pour le transfert aux soins palliatifs. Couché sur un lit blanc avec son sac à dos pour seul bagage, à la sortie il m'a regardé et m'a dit "Salut" avec un sérieux qui sonne comme un coup de poing dans l'coeur, comme si il quittait le monde des vivants pour aller vers la mort, mais lentement...

J'oublierai pas cette journée de si tôt.

Bisou

Miss xx
P.S. L'image de ce sac à dos restera gravé dans ma mémoire toute ma vie...
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Le sac à dos à Falardeau
[->www.manonvincent.com]Tu m’as trouvé dans une boutique

T’avais une gueule bien sympathique

Juste à la veille d’un grand voyage

Tu m’as choisi comme bagage

Je me suis accroché à ton dos

J’emporte tes idées et tes mots

On va voir qu’est-ce que le monde a l’air

On va faire lever la poussière
Allez hue! mon ch’val de bataille

Et hop! au galop qu’on s’en aille

Brasser la cage aux idées ohhhhh!!!

J’suis l’ sac à dos à Falardeau
Tes idées se sont promenées

Entre adulées et contestées

Sur des plateaux de cinéma

Même ceux de « Radio-Cadenas »

On a traîné rue St-Denis

Dans les cafés et les bineries

Même les chics resto du Plateau

Et partout où ça vole plus haut
Refrain
Tu m’as déposé moi ton sac

Sur le rebord d’une fenêtre

Chambre 6009 j’t’en simonac

C’pas ici j’voulais qu’on s’arrête

Des sarraus blancs défilent sans cesse

Ta jaquette bleue montre des dents

J’pense qu’y donnent pas cher pour tes fesses

Ils ont des têtes d’enterrement
Refrain

Avec des « si » et des « peut-être »

On t’explique que ta vie s’en va

C’est bien pire qu’être ou ne pas être

D’ici trop tôt, tu s’ras plus là

Remets-moi vite sur ton dos

Qu’on sorte par la porte d’en arrière

Reprends tes idées et tes mots

Moi j’veux pas jamais qu’on s’arrête
Refrain
Manon Vincent 24 août 2009
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3 commentaires

  • Archives de Vigile Répondre

    20 décembre 2009

    Dimanche, 22 décembre 2009 par Bruno Deshaies
    Bonsoir Manon Vincent,
    Je comprends votre désespoir et votre impatience.
    Votre désir d'être libre collectivement est admirable.
    Mais les Québécois-Français s'en vont tous azimuts.
    Un nouveau parti politique, le PI, et des dizaines d'activités disparates toujours avec le même désir de vaincre dans le bruit et la dispersion quand ce n'est pas dans la dérivation face à l'objectif. Pour une majorité d'indépendantistes, la lutte se limite au domaine des rivalités politiques et électoralistes.
    Je sais personnellement que monsieur Pierre Falardeau avait reconnu publiquement à l’occasion d’une émission avec Julie Snyder, en 1997, que la lecture de l’Histoire de deux nationalismes au Canada par Maurice Séguin nous rendait un peu moins niaiseux.
    Il y a eu le référendum de 1995 et nous tournons toujours en rond. Cessons de réagir !
    La question aujourd’hui n’est pas tant d’en parler que d’agir en profondeur. Ce n’est pas le domaine des rivalités politiques qui doit nous intéressé mais le besoin de se parler entre quatre yeux, de comprendre ce que c’est que l’indépendance, puis de toute urgence s’organiser pour être ensemble vers un but commun bien compris.
    Faut-il le faire ou bien brailler chacun dans son coin ? Cette question me hante depuis de nombreuses années. Les sectaires ne sont pas les indépendantistes mais bien nos adversaires politiques et les souverainistes-associationnistes, pour ne pas dire les confédéralistes, qui croient que notre indépendance est possible dans l’annexion au Canada. C’est un mythe.
    Il nous faut un encadrement collectif si l’on veut faire l’indépendance du Québec. Cette vision est refusée par les souverainistes partisans du PQ comme du BQ. Ceux-ci croient avoir le monopole de la défense de nos intérêts NATIONAUX. En ce moment, ça fait pitié de les voir aller.
    Il faut créer le mouvement en-dehors des partis politiques sans vouloir les combattre. Toutefois, on doit les rappeler à l’ordre. Les VRAIS combats dépassent les capacités des partis politiques.
    Quand l’union des forces indépendantistes sera-t-elle possible ?

  • Archives de Vigile Répondre

    29 septembre 2009

    @ Marie-Hélène,
    Merci de votre intérêt pour le Québec et de vos bons mots. J'aimerais beaucoup que vous ajoutiez à ce message ce que vous avez écrit pour Natagan. Je n'arrive pas à retrouver ce texte et cela compléterait bien cette série de messages.
    Dimanche dernier, j'ai demandé à mes petits-fils de me prêter des craies de couleurs puis, j'ai écrit un cour message sur le trottoir devant chez moi. Après, j'ai laissé la boîte de craies bien en vue et en fin de journée, devait bien y en avoir une dizaine de messages sur 30 pieds de longueur. J'ai bien tenté de faire parvenir ces photos à Vigile net mais n'y suis pas arrivé.
    Alors,j'ai coupé des fleurs d'automne du jardin et les ai répendues sur les messages. Le lendemain, plus rien ! La pluie avait tout emporté.
    Comme c'est son métier. Le nôtre est de continuer.

  • Marie-Hélène Morot-Sir Répondre

    29 septembre 2009

    Monsieur Vincent je suis très émue de vous lire, merci de nous raconter ces derniers jours à l'hôpital de votre grand Pierre Falardeau .. et cette manière dont il est parti avec son sac à dos, pour ces fameux soins palliatifs, lui aussi, où l'on sait bien ce qui vous attend, là où on vous envoie lorsque la médecine et les médecins ont épuisé tous leurs moyens ..
    Je dis "lui aussi", car la semaine précédente, peut-être l'avez-vous lu , j'ai raconté le départ de Natagan, cet ami, ce chercheur inlassable de l'Histoire de votre beau Québec qui a tenté de faire se souvenir les Québécois de leur passé afin qu'ils en soient fiers !
    Natagan a emprunté ce même chemin, cette terrible direction des soins palliatifs, et dans les mêmes conditions...Y compris la jaquette bleue !.. ! Peut-être a-t-il ouvert le passage pour Pierre Falardeau qui l'a suivi de si prés, et nous ne pouvons que souhaiter que là-haut ces deux si grands patriotes puissent deviser ensemble sur l'avenir de votre beau pays en vous envoyant tous les courages dont vous avez tous besoin pour vous tenir debout et pour continuer à leur place ..