À la mémoire d'un homme libre

Falardeau n’est pas mort ! Il est plus vivant que jamais !

Pierre Falardeau : 1946-2009

« Quand un résistant tombe, dix autres se lèvent pour ramasser son arme »

- Pierre Falardeau
Je dois mon engagement politique en grande partie à Pierre Falardeau. En 2004, j’avais 16 ans et je militais au Parti Québécois, à l’époque dirigé par Bernard Landry. Lorsque je me suis rendu à la Maison Ludger Duvernay, siège de la Société Saint-Jean Baptiste de Montréal, pour le lancement du livre « Québec libre : Entretiens politiques avec Pierre Falardeau », je ne savais pas à quel point ma vision politique changerait lorsque j’aurais mis la main sur cet ouvrage. La lecture de livre m’a éveillé à un point que je ne saurais décrire. Plus encore que ses idées, Pierre Falardeau m’a transmis sa passion, sa colère et son amour pour la liberté. Il m’a amené à voir différemment le combat pour l’indépendance du Québec : plus encore que la libération nationale, c’est un refus de la soumission, un rejet de quiconque osera toucher à notre liberté. Il m’a fait comprendre quelque chose de fondamental : personne ne pourra jamais m’imposer une identité qui n’est pas la mienne.
Je ne veux pas être canadien et je ne le serai jamais. Ils peuvent tenter de se le faire croire dans leurs papiers, dans leurs registres, dans leurs passeports, mais la vérité est que je refuse, moi, d’être canadien. Notre Québec est un pays, et personne ne nous l’enlèvera. Pierre voyait l’indépendance comme un combat pour notre survie collective en tant que peuple, situant son engagement bien loin du nationalisme bureaucratique faisant de la souveraineté une lutte pour se libérer des dédoublements administratifs et du déséquilibre fiscal, car on aura rarement vu des peuples sortir dans la rue pour cela, vous l’admettrez. Loin aussi du discours gauchisant « la souveraineté ? Oui mais seulement à condition qu’il y ait un projet de société socialo-féministo-écologico-altermondialiste ». Comme si la création d’un pays n’était pas déjà un projet de société amplement enthousiasmant.
J’ai ensuite acheté ses deux recueils de textes, « La liberté n’est pas une marque de yogourt » et « Les bœufs sont lents mais la terre est patiente ». Plus encore que ses merveilleux films, ce sont ses ouvrages qui ont forgé ma pensée politique. Il m’a ensuite incité à découvrir Pierre Bourgault, André D’Allemagne, Lionel Groulx, Hubert Aquin, et bien d’autres encore.
Plus encore, Pierre a grandement contribué au rayonnement de notre culture par son cinéma engagé d’une très grande qualité. Il a grandement contribué à notre devoir collectif de mémoire par ses films à caractère historique, comme Octobre ou 15 Février 1839. Dans une société où la connaissance de l’histoire fait grandement défaut, ces petits chefs d’œuvres sont des contributions plus que bénéfiques. « Je me souviens » est notre devise nationale. Pierre s’en souvenait, lui. Il aurait tant voulu que davantage de québécois s’en souviennent aussi…
J’ai eu l’occasion par la suite de connaître davantage Pierre, l’individu, avec sa personnalité colorée mais toujours attachante. Un homme qui malgré l’image de fanatique violent que les médias fédéralistes tentent de lui inculquer, même après sa mort, était profondément sensible, respectueux et sympathique. Il a participé à plusieurs de mes événements, et c’est un honneur d’avoir pu travailler avec lui. C’est au printemps 2008, alors que j’organisais une soirée à la mémoire de Pierre Bourgault dans le cadre du cinquième anniversaire de son décès, qu’il m’annonça qu’il ne participerait pas à cause d’une opération au cerveau qu’il subirait quelques jours avant. Cette nouvelle me toucha profondément.
Pierre Falardeau n’a pas pu voir son Québec qu’il aimait tant devenir un pays libre et indépendant. On voit maintenant les journalistes et les petits politiciens fédéralistes tenter de réduire sa vie à une simple contribution à la culture québécoise afin de désamorcer la puissance rassembleuse de son message. Ne l’enterrez pas trop vite, et ne vous réjouissez pas trop vite. Qu’ils se le tiennent pour dit : Nous sommes des milliers de jeunes prêts à reprendre le flambeau jusqu’à la victoire. La mémoire de Pierre ne pourra qu’ajouter à notre ferveur. D’en haut, il nous soutiendra tout autant que lorsqu’il était des nôtres.
Comme notre pamphlétaire l’avait écrit au sujet de Pierre Bourgault lors de son décès en 2003 : Falardeau n’est pas mort ! Il est plus vivant que jamais !
Salut Pierre !

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Simon-Pierre Savard-Tremblay179 articles

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Simon-Pierre Savard-Tremblay est sociologue de formation et enseigne dans cette discipline à l'Université Laval. Blogueur au Journal de Montréal et chroniqueur au journal La Vie agricole, à Radio VM et à CIBL, il est aussi président de Génération nationale, un organisme de réflexion sur l'État-nation. Il est l'auteur de Le souverainisme de province (Boréal, 2014) et de L'État succursale. La démission politique du Québec (VLB Éditeur, 2016).





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1 commentaire

  • Ouhgo (Hugues) St-Pierre Répondre

    12 janvier 2010

    Définition de Wikipédia : Le romantisme se caractérise par une volonté d'explorer toutes les possibilités de l'art afin d'exprimer les extases et les tourments du cœur et de l'âme : il est ainsi une réaction du sentiment contre la raison, exaltant le mystère et le fantastique et cherchant l'évasion et le ravissement dans le rêve, le morbide et le sublime, l'exotisme et le passé.
    Falardeau comble nos carences en histoire par ses films. Il éveille notre conscience de colonisés. Il fait tout ce qu’il peut comme artiste pour toucher nos sens. Sur les Plaines d’Abraham, il a appelé jusqu’à son propre martyre… mais l’ennemi a reculé. Je l’ai personnellement entendu dire : «Les polices pourront me frapper, je suis vieux, ça leur prendra pas tellement de coups pour me tuer. » Y aurait-il eu mort plus romantique pour un résistant que de finir sous les matraques fédérastes des Plaines d’Abraham? Mais il n’aura pas suffi de proférer des menaces de tirer des roches, de la marde… On ne l’y a pas immolé. Il a caché le tourment de son âme sous une autre bravade : « Nous avons fait reculer l’ennemi! » C’était une réaction romantique du sentiment contre la raison. Car en fait, plus que la multiplication des résistants, c’est la clônation à l’infini des assimilateurs qu’il faut voir, lorsqu’il y en a un d’humilié!
    Falardeau, c’est la passion DeLorimier. Les Patriotes aux nerfs émoussés en 1837 ont refusé d’écouter leur chef Papineau, plus mené par la raison. De son exil aux États-Unis, ce dernier confia à l’ambassadeur de Pontois : « C’est une population réduite au désespoir, qui se précipite aveuglément au-devant du danger, sans concert, sans organisation, sans secours étranger, et qui se dévoue à la mort. » Novembre 1838, « Signé Papineau, la correspondance d’un exilé. » Y. Lamonde.
    Si l’expérience passée peut nous servir, nous devrions peut-être rendre hommage avec reconnaissance à nos héros romantiques, Falardeau tout comme Bourgeault, Honoré Mercier, Henri Bourassa, les Patriotes ou Montcalm, mais sans nécessairement les prendre pour modèles rationnels pour l’ultime lutte que nous livrons maintenant.
    Les stratèges qu’il nous faut actuellement pour que notre minorité française d’Amérique déjoue les ruses assimilationnistes que nous assène l’ennemi multiculturel actuellement devront vaincre leurs émotions pour planifier une Résistance sur tous les fronts. Pendant que nous faisions reculer le plan pour « Fêter » la défaite des Plaines, pendant que nous forcions le Prince Charles à enjamber les poubelles pour aller décorer ses Black Watch, l’aile parlementaire parlait de « gouvernance souverainiste à la sauce provinciale » au lieu d’instruire la population sur les avantages de la liberté d’un peuple. Pendant que nous montions sur le 24 Sussex avec nos caisses de drapeaux rouges en guise d’avertissement, Québec et Ottawa s’entendaient pour orienter les mass-media vers la désinformation sur le recul du français partout au Québec, et de façon insidieuse dans la musique du champ public. Même si on se dit, chacun dans sa petite manif, qu’on ne nous canadianisera jamais, le rouleau compresseur nous écrasera pendant que nous crions : Je suis Québécoisssss….
    « Pierre Falardeau n’a pas pu voir son Québec qu’il aimait tant devenir un pays libre et indépendant. »
    Considérant, la vague de nouveaux arrivants assermentés à la Reine qui s’accroît, il ne suffira pas de « milliers » de jeunes déterminés à résister… Il faudra un cerveau pour imaginer comment nous pourrons développer en nous la force de caractère de Suédois, de Hollandais, de Danois, de Suisses, de Chiliens, pour apprendre à vivre fièrement sur ce territoire métissé sans se laisser imposer des mœurs qui ne nous conviennent pas. Nous serons très nombreux à ne pas le voir tel qu’idéalisé, ce Québec de nos ancêtres. En toute vigilance, Ouhgo