Le Québec et Copenhague

Copenhague - 15e Conférence de l'ONU sur les changements climatiques


Le fait que le premier ministre Jean Charest sera présent à Copenhague montre que tout ne va pas pour le mieux dans le royaume du Canada. On pourrait même dire que les enjeux environnementaux représentent la pire menace à la stabilité de la fédération canadienne depuis la crise québécoise.
Mais cette fois-ci, ce n'est pas une bataille identitaire entre le Québec et le reste du Canada. Le clivage, à la fois idéologique et géographique, oppose les provinces industrialisées, comme le Québec, l'Ontario et la Colombie-Britannique, aux provinces de l'Ouest productrices de pétrole, et surtout de sables bitumineux, que sont l'Alberta et la Saskatchewan. Le Québec n'est donc pas isolé. Mais, comme d'autres provinces, il risque certainement d'être pénalisé.

L'absence de volonté du gouvernement fédéral dans la réduction des émissions de gaz à effet de serre a amené presque toutes les provinces, à l'exception de l'Alberta et de la Saskatchewan, à combler le vide provoqué par l'inaction fédérale. Elles se sont imposé des cibles plus ambitieuses que celles d'Ottawa, une réduction de 10% à 20% d'ici 2020 par rapport aux niveaux de 1990, quand le gouvernement fédéral vise une réduction de 3%.
Cette dynamique est salutaire. Dans ce domaine de compétence partagée, les provinces contribuent à limiter le retard du Canada. Elles créent une saine émulation et exercent une pression qui forcera peut-être le gouvernement central à bouger. On assiste au même phénomène aux États-Unis où ce sont des États plus ambitieux qui mènent le bal.
Mais cette situation est loin d'être idéale. Parce que le Canada se retrouve sans stratégie coordonnée. Les provinces ont conçu chacun leur plan dans leur coin et l'on se retrouve avec une mosaïque de politiques mal arrimées, ce qui peut devenir un casse-tête pour les entreprises. En outre, ces initiatives provinciales font en sorte que certaines provinces s'imposent un effort plus intense que d'autres.
En ce faisant, elle se retrouvent paradoxalement à cautionner l'élément le plus contestable de l'approche du gouvernement Harper, l'absence d'équité dans le combat pour la réduction des GES. L'approche conservatrice est fortement colorée par sa volonté très claire d'éviter que les mesures pour contrer le réchauffement climatique puisse affecter l'économie des provinces de l'Ouest. Cela risque de mener soit à l'inaction, soit à l'injustice, en forçant les autres provinces à faire plus que leur part.
Cette iniquité, on la voit dans la façon dont le gouvernement fédéral formule ses cibles. Tous les pays signataires de Kyoto définissent leurs objectifs par rapport aux émissions de 1990. Le Canada se sert de 2006 comme point de référence. Ce n'est pas insignifiant. Cela permet de masquer l'inaction des dernières années.
Mais cette approche pénalise le Québec, parce qu'on ne tient pas compte des efforts de la province avant 2006, et parce que les réductions de GES additionnelles seront plus difficiles à réaliser que dans une province qui n'a rien fait. C'est en outre injuste pour les secteurs industriels qui ont fait d'énormes efforts, comme l'aluminium, pendant que le monde des sables bitumineux continuait à pomper du CO2 dans l'atmosphère. Et si la piètre performance canadienne compromet sa capacité d'exporter, qui va en payer le prix? Les provinces exportatrices.
Mais de l'autre côté, n'oublions pas que les provinces des Prairies ont la très nette impression elles aussi d'être des victimes, parce que le centre du Canada, insensible à leur culture et la nature de leur économie, est prêt à entraver leur croissance et à affecter leur prospérité.
Les enjeux sont considérables. Les positions respectives semblent irréconciliables. Tous les éléments sont donc réunis pour une crise capable d'ébranler la fédération canadienne.


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