Le prophète de malheur

On n'était pas habitué à ce que M. Duceppe, qui s'est toujours prétendu rigoureux, emploie cet argument à la Nostradamus en faveur de l'indépendance.

Pratte, vous connaissez?!


L'ancien chef du Bloc québécois Gilles Duceppe a accordé la semaine dernière sa première entrevue télévisée depuis sa défaite du 2 mai. Sur les ondes de Radio-Canada, il a fait et répété cette prédiction étonnante: «Si les Québécois et Québécoises ne bougent pas, d'ici 15 ans, inévitablement, on sera sur la même pente que les Franco-Canadiens et les Acadiens. C'est une assimilation fulgurante.» On n'était pas habitué à ce que M. Duceppe, qui s'est toujours prétendu rigoureux, emploie cet argument à la Nostradamus en faveur de l'indépendance.
L'épouvantail de l'assimilation est agité par les nationalistes depuis la victoire des Britanniques en 1760. Les rouges d'Antoine-Aimé Dorion l'ont employé dans leur combat contre la Confédération. En 1939, Paul Bouchard a annoncé que la centralisation des pouvoirs à Ottawa mènerait à «la fin de notre nationalité». À l'occasion des États généraux du Canada français, Lionel Groulx a soutenu qu'«il y va de l'avenir de notre nation, acculée à la décision suprême : être ou ne pas être». En 1989, Lise Payette a signé un documentaire-choc dont le résumé se lit ainsi: «D'ici à 25 ans tout au plus, prédisent certains démographes, la nation canadienne-française sera moribonde. Puis elle disparaîtra.»
Ces prophéties ne se sont pas avérées. En 1951, les Québécois de langue maternelle française constituaient 82,5% de la population de la province. Aujourd'hui, la proportion de francophones reste à vrai dire inchangée: 79,6%. Certains voient dans ce fléchissement sous la barre des 80% l'augure de la disparition, mais c'est simplement le résultat de l'augmentation du nombre d'immigrants, augmentation décidée autant par les péquistes que par les libéraux. Les francophones restent donc largement majoritaires tandis que la proportion d'anglophones, elle, est en chute libre: 13,8% en 1951, 8,2% en 2006.
M. Duceppe évoque la situation des francophones hors Québec. Il a raison de déplorer l'«assimilation fulgurante» de la minorité française de la plupart des provinces du pays. Toutefois, il n'y a aucune comparaison possible entre leur situation et la nôtre. Nous, Québécois francophones, contrôlons notre gouvernement (c'est le fruit le plus précieux de la Confédération). Nous avons pris les commandes de notre économie. Nous assimilons de plus en plus les immigrants. Notre culture est plus forte que jamais. Nous avons nos écoles, nos universités, notre littérature, notre cinéma, notre télévision. Et tout cela disparaîtrait en quelques décennies? Allons donc!
Les Québécois francophones ont en main tous les outils nécessaires à la préservation et au développement de leur culture. Ce n'est certainement pas en ajoutant son nom au mémorial des prophètes de malheur que M. Duceppe convaincra ses concitoyens du bien-fondé de l'argumentaire souverainiste.

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André Pratte878 articles

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[une chronique intitulée « Tout est pourri » (critique de Anne-Marie Gingras) ->http://books.google.fr/books?id=EZWguAMXAtsC&pg=PA27-IA27&lpg=PA27-IA27&dq=pratte+Tout+est+pourri&source=bl&ots=MUti9NTQuH&sig=h2zgJlLgOg844j5ejxnUl4zH2_s&hl=fr&sa=X&ei=73RrT8aQEqnh0QHuh4GyBg&ved=0CEEQ6AEwBQ#v=onepage&q=pratte%20Tout%20est%20pourri&f=false]

[Semaine après semaine, ce petit monsieur nous convie à la petitesse->http://www.pierrefalardeau.com/index.php?option=com_content&task=view&id=30&Itemid=2]. Notre statut de minoritaires braillards, il le célèbre, en fait la promotion, le porte comme un étendard avec des trémolos orwelliens : « La dépendance, c’est l’indépendance ». « La soumission, c’est la liberté ». « La provincialisation, c’est la vraie souveraineté ». « La petitesse, c’est la grandeur ». Pour lui, un demi-strapontin à l’Unesco est une immense victoire pour notre peuple. C’est la seule politique étrangère qu’il arrive à imaginer pour le peuple québécois. Mais cet intellectuel colonisé type n’est pas seul. Power Corp. et Radio-Cadenas en engagent à la poche.





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