IMMIGRATION

Le patronat veut 80 000 immigrants par année, Boulet dit non

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Le PQ met la pression sur la CAQ


Dans un cri du cœur dirigé aux chefs des principaux partis politiques du Québec, les associations patronales ont demandé de faire passer de 50 000 à 80 000 par année les seuils d’immigration. Au même moment, en commission parlementaire, le ministre de l’Immigration et de l’Emploi, Jean Boulet, anéantissait cet espoir en réitérant que son gouvernement n’allait pas accueillir plus d’immigrants.


« Il n’est pas question de changer ou d’augmenter les seuils qui ont été établis dans la planification pluriannuelle. On est passé de 40 000 à 52 000 et on a encore des problématiques d’intégration », a répondu Jean Boulet à une question du député de Québec solidaire, Andrés Fontecilla, en citant en exemple le taux de chômage de 13 % chez les immigrants, qui est supérieur à la moyenne. « Encore trop de gens résident et s’installent à Montréal [et ne travaillent pas] », a-t-il indiqué, soulignant qu’il existe pourtant beaucoup de possibilités d’emplois en région.


Les seuils ayant été la marotte de l’opposition durant cette commission parlementaire, M. Boulet a été abondamment talonné sur la question. « Êtes-vous d’accord avec des seuils qui vont de 100 000 à 120 000 immigrants par année au Québec ? », lui a demandé le député du Parti québécois, Pascal Bérubé. « Non », a répondu le ministre, catégorique. Il a également indiqué que les seuils sont établis « en fonction de la capacité d’accueil » et qu’ils sont « tout à fait compatibles avec la réalité que nous souhaitons. »


« On doit rattraper le retard »


Au terme de leur rencontre préélectorale avec les dirigeants des partis à Québec jeudi, le Conseil du patronat, appuyé par la Fédération des chambres de commerce du Québec (FCCQ) et la Fédération canadienne de l’entreprise indépendante (FCEI), a publiquement exhorté le futur gouvernement à hausser ses seuils d’immigration à 80 000, à partir de 2023 jusqu’en 2026. « À chaque année, on vit un recul par rapport au seuil qui avait été estimé et on doit rattraper le retard accumulé de 2017 à aujourd’hui », a soutenu Karl Blackburn, président du Conseil du patronat. Cette demande est encore plus grande que celle formulée il y a trois ans.


Citant l’analyse du ministère de l’Emploi de 2017, 1,4 million de travailleurs devront être puisés à même différents « bassins » comme les étudiants, les personnes éloignées du marché du travail (personnes handicapées, judiciarisées, etc.) et les immigrants. Ceux-ci compteraient pour 22 % des besoins à combler, soit 64 000 immigrants par année. Or, à son arrivée au pouvoir, la Coalition avenir Québec (CAQ) a abaissé les seuils des libéraux qui étaient d’environ 50 000 à 40 000, pour ensuite les augmenter progressivement.


En appui à la demande du patronat, Manufacturiers et Exportateurs du Québec (MEQ) voudrait même aller plus loin. « Nous, on serait plus à 90 000 [immigrants] », a dit la présidente-directrice générale, Véronique Proulx. Elle avance que ces dernières années, la pénurie de main-d’œuvre a coûté 18 milliards de dollars aux manufacturiers qui ont notamment dû refuser des contrats à l’international. Commandé par la FCEI, un sondage Léger mené le mois dernier auprès de plus de 1000 répondants a révélé que la population appuie les entreprises alors que 68 % demandent qu’on leur vienne en aide, peu importe le secteur.


Une voie d’accès rapide pour les temporaires


Autre revendication prioritaire parmi les 16 recommandations faites par les représentants des employeurs : celle de mettre en place une voie d’accès rapide à l’immigration permanente pour les travailleurs temporaires. « Ça permettrait d’avoir accès à des travailleurs qualifiés en région », a insisté Véronique Proulx.


En commission parlementaire, le ministre Jean Boulet a affirmé que tous les travailleurs temporaires ne souhaitent pas s’établir ici de manière permanente mais que s’ils le veulent, ils peuvent le faire via les programmes qui s’offrent à eux dont le Programme de l’expérience québécoise (PEQ). Celui-ci a toutefois été réformé par la CAQ et les délais avant de s’y qualifier ont augmenté, a rappelé le député Andrés Fontecilla.


Le ministre Boulet a également été abondamment questionné sur les longs délais d’obtention de la résidence permanente qui sont de 31 mois en moyenne pour les quelque 30 000 personnes souhaitant faire leur vie au Québec, contre 27 mois environ dans le reste du Canada, une hausse récente d’un délai qui a longtemps été de 6 mois. « Je ne veux pas avoir l’air de constamment renvoyer la balle dans le camp d’Ottawa mais les délais, c’est [eux] », a-t-il déclaré.


Il a reconnu que certains candidats à l’immigration s’en vont en Ontario et dit parler constamment de ce problème, et d’autres, avec son homologue fédéral, Sean Fraser. « Ce qui m’irrite le plus ce sont les 24 000 travailleurs qualifiés qui sont déjà au Québec, qui travaillent, parlent français et qui attendent après leur résidence permanente », s’est indigné le ministre.



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