La fabrication du consentement à la guerre

Le Grand départ des militaires de Valcartier

Radio-Canada en première ligne : illustration de la couverture militaire

Médias et politique


C’est maintenant dans l’indifférence que nos jeunes soldats meurent en
Afghanistan. Il y a quelques semaines le soldat Sean David Greenfield est
mort, comme 49 autres de ses frères d’armes, n’avaient pas franchis le
seuil des 25 ans. Encore hier trois autres soldats canadiens sont morts.
Puisque volontaires, dans une démocratie, ces jeunes et tous les autres
soldats de Valcartier qui partent maintenant auraient consentis à
participer à cette guerre. Est-ce véritablement le cas? Sont-ils informés
adéquatement pour s’engager dans une telle aventure?
La fabrication du consentement en action
Le code journalistique de Radio-Canada souligne l’importance des média
électronique, et surtout de la « Première chaîne » télévisuelle pour une
information juste et équilibrée.
En septembre 2007, cinq organismes citoyens membres du regroupement Échec
à la guerre déposent une plainte à l’Ombudsman de Radio-Canada pour
dénoncer la couverture biaisée de la société d’état par rapport au conflit
afghan, favorisant le point de vue du gouvernement canadien et des Forces
canadiennes. « Le Canada est en guerre pour assister la population afghane
qui souffre. »
La plainte, très précise, traite exclusivement de la couverture
télévisuelle de Radio-Canada lors du premier déploiement en Afghanistan des
troupes de la base militaire Valcartier, au cours des mois de juillet et
août 2007. Elle affirme que nos médias d’information évacuent les enjeux
géostratégiques, le pourquoi de la guerre, au profit d’une insignifiante
couverture de théâtre tactique.
Après évaluation de la plainte, l’Ombudsman prend la décision d’inclure
également la couverture pour juin, ainsi que la totalité de la couverture
médiatique (télévision, radio et même internet) dans l’espoir de démontrer
l’objectivité de la société. A la lecture de la décision, il semble que
Madame Julie Miville-Dechêne ait été incapable de refuser la plainte des
organismes de paix autrement que par cette méthode touchant plus de 200
événements de couverture. Elle souligne son incapacité à juger des
omissions dans la couverture.
Cette distorsion de la plainte ne semble pourtant pas suffire. Le rapport
final de l’Ombudsman de notre société d’état doit pousser à un seuil
d’insignifiance la notion d’objectivité journalistique pour pouvoir
atteindre l’objectif du rejet de la plainte. Quitte à friser l’absurdité,
les événements médiatiques relevés sont discriminés en deux catégories : la
simple couverture d’un évènement de type reportage, et une deuxième
catégorie qui comprend les entrevues d’analyse. Ainsi, 80% des éléments
médiatiques sont automatiquement rejetés comme des reportages de
couverture, objectifs par défaut. Le journaliste ne fait que rapporter
l’événement, peu importe le fait que la Défense Nationale et le
gouvernement soient derrière l’événement et en profitent pour passer leur
message.
Pour le simple citoyen qui tente de comprendre la logique, la conclusion
est simple. Celui qui a les moyens de fabriquer l’évènement médiatique,
contrôle l’information. L’État a les moyens, c’est son message qui passe.
Nos jeunes citoyens, une opposition muselée
Nos plus jeunes concitoyens, ceux directement ciblés pour participer à
cette guerre, ont compris le message. Ils se sont mis à la tâche dans la
conception d’évènements anti-guerre. Le cœur de leur analyse : « Le
Canada est en Afghanistan, au service du Pentagone, pour établir un régime
capable de contrôler les visées de l’Iran, de la Russie et de la Chine sur
les richesses fossiles de la mer Caspienne. »
Les organisations étudiantes ont orchestré des dizaines d’évènements de
protestation contre le recrutement militaire dans les institutions
scolaires et au centre de recrutement des Forces canadiennes. Évidemment,
nos institutions scolaires ne doivent pas être des lieux d’endoctrinement.
Toutefois, aucun évènement d’opposition au recrutement n’a été considéré
comme digne d’une couverture par les services télévisés, encore moins la
chaîne principale de notre valeureuse société d’état. Ni les manifestations
mensuelles devant le centre de recrutement des Forces Canadiennes, ni les
actions théâtrales d’opposition aux tables de recrutement et encore moins
l’opposition à la présence des cadets de l’armée lors des évènements
militaires pendant le 400e de Québec. L’indifférence totale.
Les événements organisés par les premiers intéressés par la guerre, les
jeunes, recrutés et sujet à partir au front, n’intéressent pas nos
journalistes de la télévision. On ne s’intéresse à eux qu’à l’instant
précis où ils reviennent en cercueils semble-t-il.
Les universités et les instituts de recherche : des fabriques à
propagande?

Ce qui intéresse nos média, c’est l’information objective des chercheurs.
Grâce à ses énormes budgets, le Ministère de la défense a donc mobilisé,
au service des Forces canadiennes, un imposant réseau de centres de
recherches universitaires en sciences politiques. Son outil, un programme
de financement nommé le Forum sur la sécurité et la défense (FSD) qui a
pour but de mouler les cerveaux de nos plus brillants universitaires,
souvent nos jeunes, au militarisme.
Ces centres sont devenus le gagne pain d’une centaine d’éminents
spécialistes des sciences politiques, de la géostratégie, des affaires
internationales et des enjeux sécuritaires de toutes sortes. Plusieurs de
ces chercheurs sont maintenant bien connus du public. Selon le rapport
annuel du FSD, au cours de l’année 2006-2007, les spécialistes de ces
Centres au Canada ont pris part à 420 événements spéciaux, donnés 1 200
entrevues dans les média et publié 115 lettres d’opinion dans les journaux.
Dans le contrat de financement d’un centre de recherche financé par la
Défense nationale, il y a des clauses obligeant les communications
médiatiques. Dans le cas de la Conférence des associations de la défense,
un lobby militariste, cette organisation doit s’engager à appuyer des
activités qui, selon les exigences de la Défense nationale «contribuent
manifestement aux politiques nationales du Canada ». On apprend dans le
même document que l’organisation doit annuellement «obtenir des médias au
moins 100 demandes d'entrevues et de documentation pour la radio et la
télévision ». Est-ce le type d’exigences auxquelles se soumettent les
Centres de recherche universitaires et les chercheurs pour obtenir, eux
aussi, les fonds du FSD?
Il est difficile à croire que la Défense nationale finance de façon
désintéressée les chercheurs en science politique. L’analyste-chercheur à
la télé vous informe-t-il, ou est-il là pour vous endoctriner?
Une affaire de spécialistes ?
Pourtant, les occasions de présenter des couvertures critiques de l’armée
ne manquent pas, et le mouvement « Cadets Canada » en est un exemple
flagrant. Le silence total de Radio-Canada sur cette question a de quoi
laisser songeur. Heureusement, les syndicats d’enseignants commencent à
travailler sur la question.
Dans le contexte de guerre actuelle, la ligue navale du Canada intéresse
vos jeunes à la culture militariste dès l’âge de 9 ans. Pour le mouvement «
Cadets Canada » dans son ensemble, 50 000 jeunes, plus de 200 millions de
budget, les efforts d’intéressement s’effectuent dès la sortie de l’école
primaire, soit, 12 ans. Lorsqu’on réalise que ces organismes utilisent les
infrastructures scolaires québécoises pour hameçonner nos jeunes et même
pour y tenir leurs activités, nous sommes en présence d’un enjeu médiatique
tout ce qu’il y a de plus préoccupant.
Les questions relatives au recrutement ne sont qu’un exemple parmi
d’autres. Les nombreux contacts avec les journalistes de Radio-Canada ont
permis de saisir comment se fabrique le consentement des Canadiens à la
guerre. Les directeurs de l’information de notre société d’État ont réussi
à convaincre leurs subalternes que les questions militaires sont trop
complexes pour en faire l’analyse. Puisque politiquement trop délicates et
controversées, elles ne devraient apparemment être l’apanage que d’experts
de l’armée ou de spécialistes prétendument indépendants provenant
d’institutions académiques. La couverture des guerres et des conflits dans
nos médias est donc devenu le terrain exclusif des universitaires souvent
soutenus par l’armée, des ex- «hauts gradés de l’armée » et des
politicailleux qui suivent la lignes de partis.
Si il en est ainsi pour une Société d’état indépendante, comment en
serait-il autrement pour les média électroniques privés, qui salivent déjà
face aux milliards qui sont entre les mains des militaires? Pour les
patrons, les journalistes sont trop occupés à chasser la quotidienneté de
la nouvelle et ils ne peuvent pas saisir la subtilité de ces enjeux
politiques sensibles.
Cette structure qui a pour but de fabriquer le consentement populaire ne
semble heureusement, à long terme, pas donner les résultats escomptés.
L’opposition populaire à la guerre s’est transformée pour beaucoup en
indifférence et pour certain, grâce à l’information disponible sur
internet, en cynisme. Les premières victimes en sont la population
Afghane, puis nos jeunes militaires et finalement les média qui négligent
de protéger la démocratie.
La fabrication du consentement à la guerre doit, de tout évidence, devenir
une préoccupation centrale pour les journalistes consciencieux. La loi sur
la protection du consommateur condamne la publicité trompeuse. Compte tenu
de ses conséquences dramatiques, devons-nous aussi condamner la propagande
trompeuse de l’armée?
Alexandre Vidal, Campagne étudiante antirecrutement .info
Normand Beaudet, membre fondateur du Centre de ressources sur la
non-violence.
-- Envoi via le site Vigile.net (http://www.vigile.net/) --


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5 commentaires

  • Michel Guay Répondre

    23 mars 2009

    Oui mais il faut tout de même distinguer entre instruis d,une technique et instruis de la vrai vie.
    avoir un doctorat ne signifie pas être socialisé etêtre à l,épreuve des mensonges de propagande Canada .
    Ces jeunes sont trompés par des menteurs eux mêmes trompés . Ils massacrent une nation désarmée qui résiste avec courage contre les agresseurs Canadians et Quebecers
    Et dire que nos milliards en impôts servent à commettre ces crimes contre l'humanité au lieu de servir au développement et à la paix pour tous
    Et celui qui veut remplacer Harper le paysan d'extrème droite , le slave royaliste et impérialiste Igantieff est pire qu'Harper étant un sioniste actif ayant travailler après des russophones en Israel et qui affirme son racisme dans tous ses écris

  • Jean-François-le-Québécois Répondre

    21 mars 2009

    @ Michel G:
    Mais, monsieur G, on ne parle pas ici de jeunes gens mal instruits, et sans direction dans la vie, comme vous dites, mais dans le cas de l'exemple que j'ai récemment fourni, d'une jeune femme de 25 ans, étudiante au baccalauréat en psychologie, à l'UQAM!
    Mais ce qui me dérange le plus, ce qui m'a marqué le plus, c'est cette curieuse façon qu'avait la jeune fille, d'évoquer en étant «interviewée» à LCN, la possibilité de «sacrificer sa vie», avec un sourire radieux... Très, très dérangeant; déstabilisant. Est-ce une fin si... belle, disons, pour une jeune Québécoise, qui a encore toute la vie devant elle, et qui est sur le point de décrocher un diplôme pour oeuvrer comme professionelle, en tant que psychologue, que de mourir pour le Canada?
    On parle de mourir pour le Canada, mourir pour Stephen Harper (et sa vision de la démocratie); et mourir pour garder en place le gouvernement incompétent et arrogant de monsieur Karzaï, là-bas... Mourir sous les balles des talibans, ou sur les lieux d'un archi-bête accident, chose fréquente avec l'armée «canayenne»; le genre d'armée, selon les dires d'un ancien casque bleu québécois (son nom m'échappe, hélas), qui a écrit un livre, qui peut demander (l'armée en question) à des soldats québécois de marcher sur un terrain qu'on soupçonne d'être miné... Ce pour vérifier, s'il y a bel et bien des mines, sur le dit terrain...
    Ça me fait penser à une discussion que j'ai eue, avec un jeune soldat affecté à la base de Valcartier, que j'ai connu, il y a 4 ans; lors d'une conversation, entre lui et moi, il m'avait dit: «Heille, cette armée-là (canadienne), c'est dirigé par des cabochons. T'avais pas compris ça?»

  • Michel Guay Répondre

    21 mars 2009

    Effectivement ces jeunes Québecois sont endoctrinés par les menteurs de Propagande Canada. 4 morts et des dizaine de blessés inutiles encore ce matin . Il est vraiment temps de dénoncer jour et nuit cette agression criminelle contre une nation désarmée .
    Déjà 5 millions d'Afghans sont en exil dans le monde et les morts civils se comptent par centaine de millers
    Les jeunes mal instruis et sans direction se laissent livrer comme chair à canon
    Ils reviendront ici détruis pour la vie ou les pieds devant

  • Jean-François-le-Québécois Répondre

    20 mars 2009

    C'est quand même terrible de penser que présentement (mars 2009), le Québec est l'une des provinces qui fournissent le plus de recrues à l'armée «canayenne». Plus que l'Ontario!
    Je me souviens de cette jeune femme francophone de 25 ans, étudiante en psychologie, affirmant aux nouvelles de LCN, qu'elle était très heureuse de s'être enrôlée! Et qu'elle n'avait pas peur d'aller en Afghanistan; qu'elle croyait que la plus belle contribution qu'elle pouvait faire à notre société, c'était de mourir, de «sacrificer sa vie» (sic) là-bas, si ça pouvait aider à amener la démocratie là-bas, ou si ça pouvait sauver la vie d'autres soldats «canayens»... Je ne sais pas si les recrues originaires du pays de Stephen harper, feraient le même sacrifice pour elle...
    Le Rest of Canada est non seulement en train de nous prendre notre langue (à en juger par le vocabulaire de la jeune fille en question)... ce pays qui n'est pas vraiment le nôtre, réussit aussi, à nous prendre certaines de nos jeunes femmes en âge d'avoir des enfants, en les envoyant mourir dans le sable du désert du Proche Orient, en l'occurence!
    Amis Québécois, diable, réveillez-vous! Il est plus que temps!

  • Michel Guay Répondre

    19 mars 2009

    Le seul fait de parler des morts des agresseurs et de nejamais parlr des morts des agressés en dit long sur dictature Canada