Le gouvernement Charest passe des idées aux actes

2005


Au menu : négociations avec les employés du secteur public, PPP, nouveau pacte fiscal et modernisation de l'État
La nouvelle année risque d'être mouvementée pour le gouvernement Charest et ses partenaires.
Négociations syndicales, modernisation de l'État, lancement des partenariats public-privé (PPP) et renouvellement du pacte municipal arrivent tous à leur point culminant en cette année de mi-mandat électoral à Québec.
Comme le résume le vice-président de la CSN, Louis Roy, " le gouvernement passe de l'idéologie à la pratique". Et dans tous les cas, ce sont des virages importants, pour ne pas dire historiques, que le gouvernement veut faire prendre à ses partenaires.
Vers la fin de janvier, on en saura plus. Un premier rapport sur la modernisation de l'État sera publié et il contiendra des recommandations quant aux 60 organismes d'État qui ont été étudiés en 2004. Le gouvernement passera en revue 180 organismes d'État au cours des trois prochaines années. Parions que des transferts de compétences seront recommandés...
Chose certaine, à partir de ce rapport, les intentions du gouvernement Charest se préciseront.
Bataille autour de la sécurité d'emploi
Dans les négociations actuelles avec les quelque 72 000 employés de la fonction publique, l'enjeu prioritaire est la sécurité d'emploi. Le gouvernement veut pouvoir transférer des postes - au privé, aux municipalités, à des sociétés mixtes, à des agences ou ailleurs à l'intérieur du réseau - sans que l'employé ait un droit de refus.
"On garantit la sécurité d'emploi, pas la sécurité de poste ", dit Jean-François Munn, négociateur patronal en chef.
"Le gouvernement ne renie pas ses responsabilités face à ses employés, mais il doit être capable d'affecter un employé là où il sera le plus efficace", dit-il. En revanche, l'État promet que le salaire et les congés de maladie demeureront les mêmes pour les employés transférés dans une nouvelle entité.
La partie syndicale affirme que le principe de sécurité d'emploi est bafoué : l'employé, en plus de perdre son droit de refus et son droit de retour dans la fonction publique - à moins de soumettre sa candidature pour un poste nouvellement créé - perd aussi son appartenance syndicale, en vertu des modifications législatives adoptées l'an dernier.
"Il est clair que le gouvernement se prépare à des transferts de juridiction [sic] et qu'il veut sortir des gens de la fonction publique", affirme Stéphane Caron, porte-parole du Syndicat de la fonction publique du Québec (SFPQ).
De fait, l'objectif avoué du Conseil du trésor est de réduire de 20 % le nombre de fonctionnaires d'ici 10 ans. Autrement dit, de ne pas combler la moitié des postes laissés vacants à la suite du départ des employés à la retraite.
Du côté de la santé, les négociations sont marquées par de profonds chambardements. Le gouvernement a décentralisé plusieurs éléments de négociation, qui seront désormais négociés au niveau local au lieu de se retrouver à la table centrale. Il a reconfiguré les syndicats en quatre strates : les employés de bureau, les techniciens et professionnels, les infirmiers et les paramédicaux (entretien ménager, buanderie, etc.).
"Ce découpage correspond à l'idéologie de privatisation du gouvernement", soutient Louis Roy. Les syndicats concernés se disent prêts à se rendre jusqu'en Cour suprême pour faire échouer cette mesure, indique M. Roy. En attendant, les syndiqués doivent négocier les conditions de travail de leurs membres pendant que ceux-ci sont à choisir leurs nouvelles accréditations syndicales. "Désagréable", dit-on dans le milieu syndical.
Les syndicats dans l'incertitude ?
Du côté de l'éducation, les négociations avancent, mais les enseignants de cégeps ne savaient toujours pas, fin décembre, ce qu'il adviendra de leurs maisons d'enseignement.
Le Front commun dans le secteur public - le premier depuis 1989 - partage la même doléance : "Nous ne savons pas exactement ce que le gouvernement veut faire. Cela demeure flou", souligne M. Roy. Le problème est que les demandes syndicales ont été préparées en 2003, alors que rien de concret n'était annoncé du côté des PPP et de la modernisation de l'État, dit-il.
"Nous ne savons pas sur quel front nous battre, car nous ignorons sur quel front le gouvernement va nous attaquer. Mais en même temps, il faut renouveler nos conventions", lance Louis Roy.
"J'ai de la difficulté à croire qu'ils ne voient pas où on s'en va, répond Jean-François Munn. Qu'ils regardent ce qui se fait ailleurs. Et qu'ils cessent d'être contre ! Le gouvernement veut se moderniser. Inéluctablement, il devra trouver de nouvelles façons de dispenser les services."
Au nom du maintien des acquis, les syndicats du secteur public "se retrouvent dans un conservatisme extrême", déplore-t-il.
Nouveau pacte fiscal
Parallèlement aux affrontements qui s'annoncent avec ses employés, le gouvernement Charest doit signer un nouveau pacte fiscal avec les villes, pour qui 2005 est une année d'élections. Là aussi, il est en train de revoir le rôle de l'État.
Selon l'Union des municipalités du Québec, le gouvernement Charest dévoluera certaines responsabilités au secteur municipal - on parle de prisons et d'administration de l'aide sociale, entre autres - sans nécessairement lui fournir les compensations financières que les municipalités jugent suffisantes, ce qui risque de les pousser vers des PPP et des conflits avec les employés municipaux.
suzanne.dansereau@transcontinental.ca


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