Le fleurdelisé, la force d’un symbole

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Il faudra un jour rendre à Maurice LeNoblet Duplessis l'hommage qu'il mérite pour l'adoption d'un symbole aussi fort

Le 21 janvier prochain, le fleurdelisé, fêtera son 66e anniversaire. Encore méconnu des Québécois, le Jour du Drapeau est une fête mémorielle adoptée par le gouvernement du Québec en 1998 à l’occasion du 50e anniversaire du fleurdelisé.
Grâce à l’entêtement et au travail mené sans relâche par René Chaloult, député indépendant et militant nationaliste, notre drapeau fut adopté le 21 janvier 1948. En effet, c’est ce jour qu’il avait choisi pour déposer une motion enjoignant les parlementaires de l’Assemblée législative à doter l’État québécois d’un drapeau qui lui serait propre. Il fut tout juste pris de vitesse par le premier ministre Maurice Duplessis qui annonça à la Chambre que son Conseil des ministres venait d’adopter une résolution en faveur de l’adoption d’un drapeau. Peu avant 15h, le fleurdelisé fut hissé pour la première fois sur la tour du parlement à Québec. Ce drapeau remplaçait définitivement l’Union Jack et devenait officiellement le drapeau du Québec.
Le fleurdelisé est sans contredit un remarquable drapeau, qui se rapporte aux origines de la collectivité et qui est devenu un symbole de fierté identitaire transcendant les étiquettes politiques et idéologiques: il n’est la propriété de personne et doit demeurer un symbole universel qui réunit toute la nation québécoise. Cet emblème sert aussi à nous distinguer et à nous identifier de par le monde. Qui plus est, le fleurdelisé est un magnifique drapeau et nul besoin d’être chauvin pour l’affirmer : en 2001, suite à une enquête menée auprès de ses membres, l’Association des vexillologues de l’Amérique du Nord décrétait qu’il est le 3e plus beau drapeau de l’Amérique du Nord.
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Cette année, pour la deuxième fois de son histoire, le gouvernement du Québec tiendra une cérémonie protocolaire à l’Assemblée nationale pour souligner le Jour du Drapeau. De plus, sur le coup de 15h, toutes les administrations municipales et les écoles du Québec ont été invitées à rendre hommage au fleurdelisé en procédant à une levée et un Salut au drapeau.
On doit beaucoup l’organisation de cette commémoration – et d’autres comme la Fête nationale et la Journée nationale des patriotes au Mouvement national des Québécoises et des Québécois (transparence totale : j’œuvre pour cette organisation) qui place au cœur de sa mission la promotion de l’histoire, du patrimoine et de l’identité québécoises.
Chaque année, à l’occasion du Jour du Drapeau, le MNQ et ses sociétés membres organisent quelques dizaines d’événements à caractère officiel, pédagogique ou ludique sur l’ensemble du territoire québécois. Puisque la plupart des Québécois ignorent l’existence de cette journée, et ce, malgré le travail acharné de ceux qui la promeuvent, force est d’admettre qu’il reste encore du chemin à parcourir pour donner à cette journée mémorielle l’ampleur qu’elle et notre drapeau méritent. Et pour cause.
Les journées mémorielles comme le Jour du Drapeau, et de manière générale, les commémorations nationales, sont fondamentales pour une nation. La transmission d’une mémoire nationale par des manifestations favorisant le rassemblement de la nation implique une perspective d’avenir. En somme, la commémoration a pour fonction de répondre à un enjeu immédiat qui est de fédérer la nation autour de références collectives grâce au renforcement de la mémoire.
Depuis plusieurs années, le MNQ plaide pour que le gouvernement du Québec se dote d’une véritable politique de commémorations puisqu’elles travaillent à cimenter l’appartenance nationale et le sentiment identitaire québécois. En 2012, suite aux travaux réalisés par l’historien Charles-Philippe Courtois, le MNQ déposait au gouvernement une série de propositions sur le plan commémoratif.
Avec une politique de commémorations cohérente, en 2008, le gouvernement du Québec aurait pu célébrer avec plus d’ampleur et de hauteur le 400e anniversaire de la fondation de Québec et non se contenter de spectacles et de festivités sans contenu historique et commémoratif. En 2009, les seules commémorations de la Conquête de 1759 ont été organisées par le gouvernement fédéral. On se rappelle la désolante reconstitution de la Bataille des Plaines d’Abraham qui avait été annoncée par la Commission des champs de bataille nationaux, organisme relevant du gouvernement fédéral et qui avait été annulée suite à la levée de boucliers que le projet avait soulevé.
En 2013, le gouvernement du Québec aurait pu commémorer tour à tour le 350e anniversaire de l’arrivée des Filles du Roy et bien évidemment, le 250e anniversaire du Traité de Paris qui scella le sort de la Nouvelle-France et profiter de ces anniversaires pour rappeler ces moments déterminants dans l’histoire du Québec.
Pour sa part, le gouvernement du Canada a bien compris l’importance des commémorations nationales. Depuis quelques années, nous faisons face à une véritable offensive du gouvernement fédéral en cette matière. Au ministère Patrimoine canadien, si on additionne les budgets alloués au « Patrimoine », soit 40,5 millions$ et celui de l’ « Appartenance au Canada », 57 millions$ prévu pour l’exercice 2013-2014, le Canada alloue plus de 97 millions$ au patrimoine, aux commémorations et autres manifestations de mémoire. Le Québec doit suivre cet exemple et investir dans des dossiers porteurs pour la mémoire et le sentiment d’appartenance nationale.
Pour un peuple, la connaissance de son passé est fondamentale pour cimenter l’identité collective puisque la mémoire est l’un des éléments qui définissent l’appartenance nationale. Pour une jeune et fragile nation comme le Québec, dont la survie n’est jamais assurée dans le temps, la transmission de la mémoire est d’autant plus importante car elle permet d’inscrire notre existence dans le passé et nous projeter vers le futur.
Myriam D’Arcy
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À ceux qui s’intéressent à l’histoire de notre drapeau et de nos emblèmes nationaux, je vous invite à lire la série de textes que l’historien Gilles Laporte leur a consacrés dans les pages du Huffington Post Québec à l’occasion du Jour du Drapeau. Ils sont tous disponibles ici.

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Myriam D'Arcy détient un baccalauréat en Science politique à l’Université du Québec à Montréal. Elle est candidate à la maîtrise en histoire à l’Université du Québec à Montréal. Depuis quelques années, elle collabore à différents projets de recherche en histoire du Québec, notamment à la Télé-Université de l’UQÀM.





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