La réunion nationale Montréal-Québec

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Sortir des affrontements mesquins et stériles

Depuis le commencement des temps, les villes de Montréal et de Québec se sont posées en rivales, en concurrentes. Si Montréal se faisait « donner » une autoroute, Québec en voulait deux; si Québec « s’octroyait » un Parlement, Montréal en voulait un; si Montréal « recevait » une « grande » bibliothèque Québec voulait la lui ravir, et le reste et le reste.
Vraisemblablement, - le sens commun le veut - il n’y a pas de possibilité d’affranchissement national au Québec si la capitale et la métropole ne s’unissent pas dans la fraternité la plus consentie, la plus fondamentale. L’amitié, l’amour même entre les deux collectivités est un prérequis facilitateur si nous espérons atteindre un certain affranchissement national. Il faut que les rameurs rament ensemble si nous voulons que le navire atteigne le port.
Quand j’étais dans la vingtaine, moi qui suis un Montréalais né sur la rue Saint-Denis, je me suis aperçu, dans des rencontres avec des collègues de la ville de Québec, que la prise de contact n’allait pas de soi. Il fallait faire des pirouettes pour contrer certaines attaques verbales contre «les gens de la métropole». Il était difficile de s’en sortir. Et parfois je me suis senti malhabile en ne transmettant pas, de mon côté, toute la chaleur humaine qu’il fallait.
Il se peut bien que tout cela, toutes ces déficiences complexées, provienne de certaines peurs fondamentales, les peurs de ne pas être reconnus, d’être snobbés, de disparaître, d’être mal aimés. Tout cela qui construit la haine et la méfiance, des vices qu’il y a lieu de combattre et de faire disparaître par des gestes de conscience éclairée, par la valorisation de certains symboles communs.
Par exemple rappelons- nous que la décision, par l’État, de construire une bibliothèque nationale a difficilement posé le problème du lieu. Le maire de la Ville de Québec, M. Jean-Paul L’allier, avait en effet combattu pour que cette institution ne soit pas implantée à Montréal. Il disait, - je le sais, j’avais correspondu avec lui à ce sujet - que les institutions étatiques devaient être posées dans la capitale.
Or il était évident que les besoins relatifs à l’enrichissement culturel et au combat contre l’analphabétisme se trouvaient beaucoup à Montréal, où la population, nombreuse, avait été trop laissée à elle-même et à sa pauvreté. Cette attitude, venant d’un maire pourtant plus visionnaire que la moyenne avait, dans ce cas particulier, manqué de hauteur… et d’amour.
L’État, en ce cas particulier, a tranché en faveur de Montréal, et ce fut sage, mais il s’en est fallu de peu pour que la population de Montréal fut privée d’une institution essentielle au maintien de sa spécificité culturelle et nécessaire à l’existence du peuple francais d’Amérique. Il est vrai que l’État aurait dû construire la « grande » bibliothèque sur le terrain d’en face, devant le parc, mais cela est une autre histoire.
Il est vrai aussi que l’État aurait pu mieux nommer l’institution. En ce moment, l’État a posé une banale affiche qui porte le nom «GRANDE BIBLIOTHÈQUE». C’est à mon avis une faute de français. Il faut un article… Son nom, en pure vérité, devrait être «LA GRANDE BIBLIOTHÈQUE DU QUÉBEC»! En ne se disant pas «du Québec» la bibliothèque a-t-elle peur de se montrer solidaire de la nation ?
De même, si le maire de Montréal, M. Jean Drapeau, avait été un peu plus solidaire de la nation et un peu moins grandiose - l’État lui-même, le payeur, aussi, du reste – aurait pu réaliser un milliard$ d’économies et permettre à la capital de se construire un ou deux arénas! Comme cela nous aurions évité les chicanes de clocher qui empoisonnent l’atmosphère depuis deux décennies...
Et nous nous serions attaqués ensemble au vrai problème, soit la colonisation anglo-américaine à la Molson de l’équipe de hockey de Montréal; nous aurions ainsi pu avoir deux équipes québécoises au lieu de n’en avoir aucune. Le sport n’est-il pas un symbole national fort important ?
Bon ! Soyons raisonnables... Si nous revenons à nos moutons d’aujourd’hui, justement, je me dis qu’il faut poser des gestes de solidarité concrets, entre Montréal et Québec , ceci pour maintenir une certaine force à ce qui nous reste de civilisation française en Amérique.
Dans l’État actuel des choses, Montréal a besoin de la capitale pour l’aider à stopper l’anglicisation qui s’y produit. La semaine dernière les nombreux réseaux anglais de Montréal ont décrit la parade du premier juillet, celle du Canada, comme si le monde français était disparu. Pour cela ils ont fait grand effort pour montrer que les immigrants sont parfaitement intégrés à la nation canadienne-anglaise et qu’ils sont contents d’être de culture anglaise.
Pour contrer cette débandade, ce « work in progress » bien organisé contre nous, organisons–nous. Les Montréalais, de prime abord, doivent réclamer que leur État organise lui-même les célébrations nationales et qu’il pose divers gestes de protection culturelle. Sinon la capitale ne sera plus la capitale de grand-chose. Il semble, en tout cas, que le gouvernement existe pour cela et qu’il se tait beaucoup.
Pour ma part, je propose, pour changer le cours psychologique des choses, que nous posions un petit geste de solidarité modeste : c’est la création, facilement réalisable, d’une Association amicale Montréal-Québec, dont le siège pourrait être situé à Trois-Rivières, ou alternativement dans la capitale et la métropole.
La nouvelle association réunirait des gens de bonne volonté, qui ont dépassé le stade des guerres de clocher et qui voient les choses dans le calme de la réalité. Il y en a de part et d’autre ! Je me demande si les Club Richelieu ne pourraient pas lancer eux-mêmes un pareil projet. S’ils en avaient l’intention je me ferais fort de les aider; en tout cas je deviendrais sans hésitation un membre cotisant.


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1 commentaire

  • Archives de Vigile Répondre

    6 juillet 2013

    Les Québéciens se disent toujours être "fiers" de leur capitale coloniale de la "Province of Kwibek" et non de la capitale nationale du Québec. On est pas sorti du bois...