La refondation du Bloc

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Pendant qu'on parle de refonder le Bloc, les souverainistes se demandent si ce n'est pas le PQ qu'il faudrait refonder...

Il y a beaucoup de vérité dans les constats des promoteurs d’une « refondation » du Bloc québécois, même si leur proposition risque de faire long feu.


Il est difficile de nier que la crise actuelle nécessite des « actions structurelles » et que les militants ont « un profond besoin de consultation et d’espoir dans le futur ».


Il est également vrai que le paysage politique a bien changé depuis la création du Bloc, alors que le Parti québécois était le chef incontesté de la famille souverainiste et que le référendum n’avait encore rien d’un mirage. Le PQ peine tout autant à s’adapter au nouveau contexte.


Si le Bloc se cherche manifestement une nouvelle raison d’être, sa vice-présidente, Kédina Fleury-Samson, y est allée d’une suggestion pour le moins étonnante. Alors que les partisans d’une promotion exclusive de l’indépendance et les défenseurs des intérêts du Québec s’entredéchirent depuis des semaines, voilà qu’elle évoque la possibilité qu’il assure une présence dans les communautés francophones hors Québec, où les indépendantistes n’ont pas la réputation d’être particulièrement nombreux.


Plusieurs croient que le Bloc devrait se saborder définitivement plutôt que d’investir temps et énergie dans un rafistolage qui ne peut que retarder l’inévitable fin, peu importe qu’il change de nom et de plateforme. Il appartiendra toutefois à la population de décider de son sort à l’élection fédérale de l’automne 2019. S’il réussit à tenir jusque-là.


L’auteure de la proposition de « refondation », Camille Goyette-Gingras, présidente du Forum jeunesse du Bloc, assure avoir commencé à y réfléchir avant que n’éclate la crise liée au leadership de Martine Ouellet, mais il est peu de dire qu’elle est devenue une partie importante du problème.


« Martine Ouellet a échoué, même si elle avait l’expérience, la compétence et la détermination », reconnaît-on dans la proposition. Dès lors, comment peut-il être envisageable qu’elle soit candidate à sa propre succession lors de la course à la chefferie qui précéderait le congrès de refondation prévu pour décembre 2018 ?


Le député de Pierre-Boucher–Les Patriotes–Verchères, Xavier Barsalou-Duval, partisan inconditionnel de Mme Ouellet, soutient que la proposition « n’est pas liée au leadership ». À l’opposé, son collègue de Bécancour-Nicolet-Saurel, Louis Plamondon, le doyen des sept députés qui ont claqué la porte en février dernier, estime qu’elle ne réclame pas le départ de Mme Ouellet de façon suffisamment claire.


Si le sort de Mme Ouellet n’est pas tranché une fois pour toutes, que ce soit dès le conseil général du 29 avril ou lors du référendum interne des 1er et 2 juin, le débat sur la refondation risque simplement de prolonger la crise.


La chef du Bloc, qui donne de plus en plus l’impression de vivre sur une autre planète, a balayé du revers de la main une proposition qui a été faite « en dehors des instances », préférant se concentrer sur la « proposition principale » qui sera présentée au congrès de… 2019.


Le titre du document, Pour faire du Québec une république, traduit parfaitement son esprit. En attendant que cela soit chose faite, le Bloc sera le « chien de garde » des intérêts du Québec, mais on s’attarde beaucoup plus longuement sur les modalités d’accession à la souveraineté et les orientations du futur pays que sur les priorités d’action du Bloc dans le cadre constitutionnel actuel.


Même si on reconnaît que seul un gouvernement souverainiste élu à l’Assemblée nationale pourra déclencher le processus menant à l’indépendance, le futur programme du Bloc est bâti à l’inverse de celui du PQ, où les politiques d’un « bon gouvernement » provincial occupent nettement plus d’espace que ce que permettrait un Québec indépendant.


Le calendrier de la « refondation » prévoit une pause durant la compagne électorale au Québec, mais il est bien évident que la mobilisation des troupes souverainistes va être sonnée bien avant son déclenchement.


S’il est vrai que le Bloc joue son avenir, le PQ joue non seulement le sien, mais celui de l’ensemble du mouvement souverainiste. Au cours des prochains mois, l’échéance du 1er octobre monopolisera toutes les énergies.


Le congrès de « refondation » entend réunir non seulement les membres du Bloc, mais aussi ceux du PQ et de Québec solidaire. Il est cependant à craindre que la campagne n’améliore pas les relations entre péquistes et solidaires, qui sont déjà exécrables depuis que QS a rejeté toute collaboration avec le PQ en le traitant de tous les noms. La réconciliation ne sera pas chose aisée.


> La suite sur Le Devoir.



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