La prudence est de mise dans le débat sur la langue

La Presse a même recruté Marcel Côté pour démolir la réputation de chercheur de Marc Termote (Michel Vastel)

C'est la faute à Termote...

La tempête médiatique des derniers jours sur la situation du français à Montréal rappelle étrangement celle autour des frasques de Hérouxville, qui a lancé le débat sur les accommodements raisonnables sur de biens mauvaises pistes. Le simple fait qu'un organisme gouvernemental refuse de publier une étude d'un chercheur risque d'amorcer le débat public sur une toute aussi mauvaise lancée.

Le chercheur en question, Marc Termote, est bien connu. Il écrit sur le sujet depuis plus de 30 ans. Quoique respecté, il n'en reste pas moins qu'il a des positions et des partis pris qui ne laissent personne indifférents. De plus, le Comité de suivi de la situation linguistique compte parmi ses membres le mathématicien Charles Castonguay, de Gatineau, un personnage qui dénonce l'anglicisation du Québec depuis trois décennies. Si Charles Castonguay se dit satisfait d'une étude sur l'équilibre linguistique au Québec, et c'est le cas ici, il y a lieu d'allumer des feux jaunes et d'inviter à la prudence.
Le professeur Termote a publié des études similaires sur la situation du français, en 1988 et en 1996, pour le compte du Conseil de la langue française. Dans ces deux études, et davantage en 1996 qu'en 1988, il argumentait déjà que la chute de la fécondité chez les francophones, conjuguée à l'accroissement de l'immigration non francophone, favoriserait une baisse de la proportion des francophones au Québec, phénomène qui, selon lui, pouvait être dramatique à Montréal et à Gatineau. Il insérait ces conclusions dans une avalanche de scénarios démographiques (une quinzaine, si ma mémoire est bonne), pour conclure que les scénarios les plus extrêmes étaient les plus probables.
Le professeur Termote est intervenu à quelques reprises pour lancer des mises en garde contre l'immigration, qu'il voit comme un facteur d'anglicisation pour le Québec, ou pour le moins, un facteur de marginalisation du français.
Je n'ai pas lu l'étude de 2006, mais si elle est fidèle à la pensée de Marc Termote, il y a repris ses thèmes familiers, présentant une quinzaine de scénarios démographiques, décrétant que le plus extrême est le plus probable (une manoeuvre de chercheur quelque peu douteuse et très irritante) et concluant que l'île de Montréal basculera du côté des non-francophones d'ici peu. Cette conclusion est une opinion, celle d'un chercheur engagé depuis 30 ans, quoique Marc Termotte aime bien se dire objectif, comme tous les chercheurs qui ont des opinions.
Beaucoup de commentaires ont été faits à la suite de la publication de ces nouvelles données, certains criant à l'anglicisation du Québec, d'autres y voyant une consolidation de la francisation. Le débat n'a toutefois pas soulevé de passion, et il fut généralement reconnu que le français langue d'usage au Québec était en progression partout au Québec, incluant Montréal, ce qui était le premier objectif de la loi 101.
On pourrait dire de la vision linguistique de Marc Termote qu'elle est très belge, c'est-à-dire binaire (le français contre les autres langues) et intégriste (une langue partout au travail, à la maison et dans la rue), comme elle l'est dans son pays d'origine.
Malheureusement, la société québécoise et montréalaise est plus complexe, car le Québec est et demeurera une société d'accueil et devient de plus en plus diversifiée. Notre comptabilité linguistique et en particulier, la définition d'un francophone, devra en tenir compte.
Par ailleurs, il est bon de rappeler certains grands constats quant à la situation linguistique au Québec, particulièrement si les équilibres linguistiques à Montréal font l'objet d'un débat public.
Le français est devenu la langue commune au Québec et à Montréal, un acquis des grands débats linguistiques des années 60 et 70.
Comme minorité francophone d'Amérique, les Québécois doivent avoir une sage prudence face à la présence publique de l'anglais. Mais paradoxalement, nous devrions comme citoyens d'Amérique du Nord la posséder, comme langue seconde essentielle.
Quant à la volonté des nouveaux arrivants de conserver à la maison leur langue maternelle, nous ne devrions pas nous en offusquer, et surtout ne devrions pas accepter ces scénarios intellectuels monstrueux où ceux qui parlent une langue autre que le français ou l'anglais à la maison sont montrés du doigt et le phénomène déploré.
Ceux qui, par leurs dires et leurs écrits, façonnent le débat public sur un sujet aussi important que la langue devraient faire preuve de moins de sensationnalisme et porter davantage attention aux tendances de fonds (sic) qui structurent l'évolution de notre société. Est-ce trop leur demander?
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Marcel Côté
L'auteur est associé fondateur de SECOR Conseil.
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Critique:
"J’ai trouvé les journaux du week-end bien décevants, c’est-à-dire prévisibles. Les mêmes chroniqueurs se font face sur la question linguistique. Certains y croient. D’autres non. La Presse a même recruté Marcel Côté pour démolir la réputation de chercheur de Marc Termote, l’auteur d’une étude sur le poids du français à Montréal. Il faudra un jour que je vous parle de la réputation de chercheur de Marcel Côté. Dans son C.V. il parle de son expérience de «conseiller» auprès des chefs de gouvernement du Québec et du Canada. Dans l’un et l’autre cas, ce fut un désastre. À Ottawa, il ne connaissait personne ce qui ne pardonne pas dans cette capitale."
Michel Vastel, 27 janvier 2007


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