La loi 104 est inconstitutionnelle, tranche la Cour suprême

Loi 104 - Les écoles passerelles - réplique à la Cour suprême

Hugo de Grandpré - (Ottawa) La Cour suprême a déclaré inconstitutionnels les changements apportés par le gouvernement Landry en 2002 à la loi 101 pour mettre fin au phénomène des écoles «passerelles».
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Québec dénonçait que certains élèves anglophones ou allophones profitaient de ces écoles privées non-subventionnées pendant une courte période de temps pour pourvoir ensuite faire le saut dans le système scolaire anglais subventionné.
Des familles avaient poursuivi le gouvernement en alléguant que ces amendements étaient contraires à l'article 23 de la Charte des droits et libertés, qui garantit aux citoyens canadiens de recevoir leur éducation dans la langue de leur choix dans certaines circonstances.

La Cour suprême leur a donné raison en principe, jeudi, dans une décision unanime qui confirme la décision rendue par la Cour d'appel du Québec.

Dans les deux dossiers qu'il était appelé à analyser, le plus haut tribunal du pays a toutefois suspendu la décision pour une période d'un an.

Dans l'un des dossiers, celui de la famille Nguyen, il n'a pas non plus rendu de décision sur le droit de ces enfants d'étudier en anglais au Québec, faute de preuve. Il a renvoyé leur dossier (ainsi que celui de la vingtaine d'autres familles qui s'étaient jointes au recours) au gouvernement du Québec pour une nouvelle analyse en fonction des nouveaux critères établis dans le jugement.

L'autre dossier, celui de la famille Bindra, est légèrement différent. La fille aînée de la famille avait été déclarée admissible à l'éducation en anglais en vertu d'une autorisation spéciale. Les parents ont invoqué l'article 23 de la Charte canadienne pour convaincre le gouvernement de laisser son petit frère profiter de l'éducation anglaise également.

Seulement dans ce cas-ci, les juges de la Cour suprême ont donné droit aux demandeurs et permis à leurs enfants d'étudier en anglais au Québec.

Mais dans les autres cas, ceux des écoles dites «passerelles», Québec devra y aller au cas par cas, ont dit les sept juges.

«Certains éléments de preuve relatifs à l'utilisation des écoles passerelles laissent planer des doutes quant à l'authenticité de bon nombre de parcours scolaires, et quant aux objectifs de la création de certaines institutions», ont-ils écrits.

«Une méthode d'examen des dossiers plus conforme à celle établie dans l'arrêt Solski permet l'étude concrète du cas de chaque élève et de celui des établissements concernés», ont-ils ajouté.

Cet arrêt Solski, rendu par la même cour, rappelle que l'élève doit avoir passé la «majeure partie» de son éducation dans la langue dans laquelle il souhaite étudier. Les facteurs à analyser sont quantitatifs et qualitatifs, a établi la Cour suprême : on peut prendre en compte le temps passé dans divers programmes d'études, l'étape de l'étude à laquelle le choix de la langue d'instruction a été fait, etc.

Mais d'ici un an, a tranché la Cour jeudi matin, le gouvernement ne pourra plus exclure le temps passé dans une école privée non-subventionnée - une école passerelle - de ce calcul.
Sentiments partagés
À Québec, la ministre responsable de la Charte de la langue française, Christine St-Pierre, s'est dite déçue et choquée par la décision de la Cour suprême. Elle émettra d'autres commentaires plus tard aujourd'hui.

«Nous sommes heureux en ce sens que la Cour a déclaré la législation invalide. Mais nous sommes un peu préoccupés que maintenant, le dossier doit retourner au ministère de l'Éducation», a pour sa part déclaré Brent Tyler, l'avocat qui représentait les quelques 26 familles en cause.

«Ça a pris sept ans pour obtenir ce jugement et maintenant, nous devons repartir à zéro encore.»

Me Tyler, ainsi que les représentants de certains intervenants au dossier comme l'Association canadienne des écoles indépendantes et l'Association des commissions scolaires anglophones du Québec, ont dit souhaiter que le gouvernement du Québec s'assoie maintenant avec eux pour repenser le système.
«Nous espérons que la ministre va démontrer de la bonne foi et gérer cela rapidement», a indiqué Brent Tyler.
Il a précisé que la situation des familles impliquées à la base dans le litige avait beaucoup changé avec le temps. Certains enfants impliqués ont déjà gradué de l'école secondaire et d'autres ont quitté la province, a-t-il souligné.
Avec Tommy Chouinard


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