La laïcité, pomme de discorde pour Québec

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Il ne manque que Guillaume Tell

(Québec) La laïcité, dossier délicat entre tous, a provoqué des étincelles entre les deux gros canons du gouvernement Marois. Bernard Drainville et Jean-François Lisée ont croisé le fer sur cette question importante pour la stratégie souverainiste du gouvernement Marois.
Le gouvernement s'est engagé à déposer un document de réflexion avant l'ajournement de juin. Il s'agira d'un texte très général, une forme de livre vert, dans lequel Québec évoquera une série d'avenues possibles sans toutefois en mettre une en valeur, indiquent des sources informées au sujet de la réflexion.
Bernard Drainville, responsable du dossier, voulait s'en tenir à une proposition plus modeste - essentiellement une réponse point par point au mandat que lui a donné la première ministre Marois. Mais beaucoup d'eau coulera sous les ponts avant qu'on jette sur papier l'ébauche d'un projet de loi, prévient-on déjà.
Un problème «montréalais?»
Plaidant qu'il s'agit d'un problème «montréalais», Jean-François Lisée, plus dogmatique, croit plutôt que le dossier de la laïcité est une occasion de choix pour faire avancer le sentiment identitaire de la majorité francophone - un ingrédient important pour la prochaine campagne électorale. Il était derrière l'approche de Pauline Marois sur le «nous», une stratégie identitaire très affirmée, quand elle est revenue en 2007.
La ministre de l'Immigration, Diane De Courcy, s'est aussi lancée dans la mêlée, rappelant qu'elle est ministre responsable de la clientèle visée.
Mais après quelques parties de bras de fer au Comité ministériel de l'identité, où on trouve aussi Agnès Maltais, Pierre Duchesne et Alexandre Cloutier, l'approche du ministre de la Citoyenneté paraît avoir le dessus. Pour le gouvernement Marois, une politique sur la laïcité portera essentiellement sur le rôle des employés de l'État. On ne voudra pas intervenir au sujet de la présence de signes religieux dans l'espace public. La neutralité de l'État en matière de confession se mesure essentiellement au comportement des agents de l'État. Pas question d'importer ici le débat de la société française, où on traduit en cour une jeune fille parce qu'elle portait un voile dans une garderie privée.
En France, on interdit le port de la burqa dans la rue, mais Québec n'a pas l'intention de se lancer dans ce débat. Toutefois, en ce qui concerne les élèves des écoles publiques, Québec devra établir une ligne - d'autant plus qu'il est limité par un verdict de la Cour suprême qui a autorisé il y a quelques années le port du kirpan, le poignard rituel des sikhs, dans une école de Montréal.
Joint hier, le ministre Lisée a nié toute acrimonie envers son collègue Drainville. «Bernard mène ce dossier de main de maître. Dans ce dossier comme dans d'autres, il insiste sur les convergences», a soutenu le ministre responsable de Montréal. «Les discussions progressent», a conclu M. Lisée.
M. Drainville a refusé de commenter le dossier. Il est cependant évident que «sur la forme et sur le contenu», des négociations ont été nécessaires entre les deux ministres, a-t-on confié au gouvernement.
Depuis longtemps, sur la colline parlementaire, on fait des gorges chaudes du mode de fonctionnement du ministre Drainville et de son cabinet. Le ministre brouillon et impulsif est réputé pour ses virages en U, qui forcent à retourner constamment à la table de travail. Dans le dossier des lois électorales, par exemple, le cabinet politique frappait directement à la porte du Directeur général des élections, ce qui laissait souvent en porte à faux le comité ministériel - où ces questions devaient au préalable être évaluées.


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