Les faits sont têtus, n'en déplaise au ministre des Finances, Michel Audet : le Québec n'est pas en "déficit zéro", mais en déficit tout court. C'est uniquement par des artifices comptables que le gouvernement québécois peut afficher un équilibre budgétaire.
Si on ne peut pas dire que la population est bernée, c'est tout simplement parce qu'il y a longtemps qu'elle n'est plus dupe des manoeuvres comptables des gouvernements québécois. Ce n'est pas à l'honneur de ces derniers.
Il y a déjà plusieurs années, en effet, que la plupart des citoyens ont compris que les exercices budgétaires ne donnent pas l'heure juste sur l'état des finances publiques. Ils créent une illusion. Rien de plus.
Michel Audet a tort de refuser de tenir compte des déficits des réseaux de l'éducation, de la santé et des services sociaux - pour ne prendre que ces exemples. Les déficits cumulés dans ces réseaux s'élèvent à 1,3 milliard $.
Le plaidoyer du ministre sur la "responsabilité" des gestionnaires des réseaux de la santé et de l'éducation n'est pas dénué de fondement. Mais il ne fait pas le poids quand on analyse la situation prévalant dans le reste du Canada. Le Québec demeure la seule province à ne pas intégrer, en tout ou en partie, ces entités dans sa comptabilité. Ce n'est pas glorieux.
Le vérificateur général, Renaud Lachance, a raison d'appeler le gouvernement à plus de "rigueur" - même si lancer un tel mot pour une personne occupant cette fonction équivaut à administrer une magistrale gifle. M. Lachance ne pourrait pas aller beaucoup plus loin, sauf peut-être en refusant de signer les états financiers consolidés !
Que dit M. Lachance aussi ? Qu'il n'y a pas que les réseaux de la santé et de l'éducation qui sont en cause. Selon lui, "le solde budgétaire aux fins de la Loi sur l'équilibre budgétaire est déficitaire d'au moins 5,3 milliards $".
Les élus du Parti québécois devraient éviter de monter sur leurs grands chevaux aujourd'hui à l'Assemblée nationale. Nous avons déjà eu l'occasion de l'écrire, puisque ce n'est pas la première fois que le vérificateur administre ce genre de leçons : tous les gouvernements du Québec se collent à une convention comptable qui maquille la réalité depuis qu'une loi interdit les déficits budgétaires.
Il y a un vrai débat, franc et serein, à ouvrir au Parlement sur ce sujet ; sur ce qu'il convient d'inclure ou pas dans la comptabilité gouvernementale. Cette tâche, cela dit, devrait être menée après les prochaines élections pour éviter qu'elle ne sombre trop dans la partisanerie. Nous pouvons attendre quelques mois.
D'autant plus qu'il s'agit d'un travail de longue haleine. Michel Audet a fait un timide pas, hier, en consacrant plus de 300 millions $ à des dépenses qu'il savait devoir consentir cette année, mais qu'il avait décidé de ne pas inscrire dans sa comptabilité... Merci à Transelec Chile !
Ces 300 millions $ ont été puisés dans les 869 millions $ obtenus de la vente par Hydro-Québec de sa participation dans cette entreprise chilienne. Le reste, 500 millions $, sera versé au Fonds des générations. Une décision judicieuse.
Réduire le lourd endettement de 118 milliards $ du Québec est une nécessité. À long terme, la pérennité des programmes sociaux passe aussi par cette voie. Actuellement, pour chaque sept dollars transitant dans les coffres de l'État, il y en a un qui sert à payer les intérêts de la dette. Pas le capital. Seulement les intérêts.
Mais ne nous berçons pas d'illusion là non plus : selon un haut fonctionnaire des Finances, la dette publique aura encore grimpé de 3 milliards $ d'ici le 31 mars prochain. Elle s'établira à 121 milliards $.
jmsalvet@lesoleil.com
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