La distinction entre Hydro-Québec Production et Distribution embrouille tout

Réponse à Jean-Robert Sansfaçon pour son éditorial Politique ou partisanerie?

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À qui profite cette distinction et la confusion qui en découle ?

Il est étonnant de voir que, plus que 12 ans après l’adoption de la loi 116 - qui séparait définitivement les activités d’Hydro-Québec Production (HQP) de celles d’Hydro-Québec Distribution (HQD) -, cette distinction fondamentale qui définit le cadre institutionnel de l’industrie électrique au Québec demeure absente de nos débats sur l’énergie.
Ainsi, l’éditorial de M. Sansfaçon (Politique ou partisanerie ?, 2 février), comme les commentaires de Mme Marois auxquels il répond, passe sous silence la différence profonde qui existe entre un surplus d’HQP et un surplus d’HQD.
L’énergie produite par Gentilly-2, tout comme celle produite par La Romaine, appartient à HQP, qui a comme mission d’accumuler des « surplus » afin de les vendre à profit. M. Sansfaçon a donc raison de souligner le problème implicite à produire l’électricité à 10 cents pour la vendre à 4 cents. Ces pertes sont du compte de l’actionnaire (le contribuable) et affecteront durement les dividendes payés par la société d’État dans les années à venir. En même temps, ces surplus pourraient, en théorie, constituer « un avantage pour le Québec », comme le dit Mme Marois, si jamais on trouve des façons de les utiliser qui sont économiquement et socialement rentables (comme, par exemple, dans l’électrification des transports).
Les surplus d’HQD, par contre, sont une autre paire de manches. Le mandat d’HQD est de desservir la demande au Québec et d’acquérir l’électricité requise à cette fin. Les surplus qui ont mené à ce débat sont les surplus d’HQD, qui, pour toute une série de raisons, s’est engagée à acheter plus d’électricité qu’elle en a besoin. Ces surplus sont, en effet, coûteux. Et oui, Mme Marois, ils constituent un problème réel, et non pas un avantage pour le Québec.
L’équilibre énergétique d’HQD se calcule d’année en année. Si, par exemple, avec l’électrification des transports la demande d’HQD augmente dans l’avenir, elle aura effectivement besoin d’augmenter ses acquisitions d’énergie. Mais les coûts reliés aux surplus de 2012, de 2013 et de 2014 - comme, par exemple, l’argent payé à TransCanada Énergie pour ne pas exploiter sa centrale à Bécancour, construite pour desservir un contrat avec HQD - sont des pertes nettes, récupérées à même nos tarifs d’électricité.

Trop compliqué?
Comment se fait-il que la séparation fonctionnelle HQP/HQD et les analyses qui en découlent soient absentes de presque tous les articles sur ces questions, même dans les journaux les plus sophistiqués ? J’ai la forte impression que, dès le départ, la communauté journalistique a conclu que cette question était trop compliquée pour le public en général. Ainsi, même lorsque le journaliste le comprend bien, il évite d’en parler, afin de ne pas confondre le public.
Cette tendance de sursimplification empêche la tenue d’un débat éclairé sur les questions énergétiques au Québec. Ce manque de clarté mène aussi à des conclusions erronées. Ainsi, M. Sansfaçon termine son éditorial en disant : « le Québec se dirige vers des surplus vendus à perte qui exigeront des hausses de tarifs uniquement pour satisfaire les attentes du gouvernement ». Or, selon la logique qui sous-tend la loi 116, les pertes d’HQP n’affectent aucunement les coûts d’HQD, sur lesquels se basent ses tarifs.
Cela n’empêche pas qu’un gouvernement peut vouloir arrondir ses fins de mois en augmentant les tarifs de son monopole HQD. C’est ce que le gouvernement Charest faisait avec sa loi (toujours en vigueur), qui augmente arbitrairement le prix de l’électricité patrimoniale ; c’est aussi ce que fait le gouvernement Marois en voulant s’approprier des bénéfices des réductions de coût chez HQD.
Il est difficile, cependant, de débattre ces enjeux lorsque la séparation fonctionnelle qui en constitue la toile de fond demeure, encore, largement inconnue auprès du grand public.


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