La Dame de fer perd sa cuirasse

CDPQ-Subprimes - qui sont les coupables?


(Québec) «J'ai eu ça à l'esprit presque tous les jours depuis que c'est arrivé et j'étais non seulement déçue, mais très déçue des résultats de la Caisse», a déclaré hier Monique Jérôme-Forget devant la commission parlementaire qui étudie les pertes de la Caisse de dépôt et placement du Québec.
On veut bien la croire, sauf qu'il est difficile de comprendre pourquoi elle ne s'est pas tenue informée de la situation pendant la campagne électorale, si ça la préoccupait à ce point. «Aveuglement volontaire?» ont demandé les critiques de l'opposition. La question est légitime.
La ministre dit avoir appris que la Caisse subissait des pertes de 8,7 % le 14 octobre dernier. Son ministère a été avisé que ces pertes avaient grimpé à 18 % le 28 novembre, mais ce n'est que le 10 décembre, deux jours après les élections, qu'on l'a informée de cette détérioration.
Pourquoi avoir attendu si tard alors que ces pertes étaient l'un des principaux sujets de controverse de la campagne électorale? Jeudi, Mme Jérôme-Forget a donné une explication surprenante à cette question. «L'éthique veut que, pendant une période électorale, vous ne profitiez pas d'une situation alors que vous êtes ministre. Et c'est donc le 10 décembre que le sous-ministre des Finances m'a convoquée pour me donner les résultats.»
Une question d'éthique? Depuis quand un ministre doit-il être tenu dans l'ignorance d'une situation grave parce qu'il est en campagne électorale? Il faudra repasser pour nous faire croire une telle explication.
De deux choses l'une : les libéraux ne voulaient pas connaître l'ampleur des pertes pendant la campagne électorale pour ne pas avoir à mentir, ou ils ont été tout simplement irresponsables. Or, s'il est une chose dont on ne peut soupçonner Monique Jérôme-Forget, c'est d'être irresponsable. J'opte donc pour le premier scénario : les libéraux ont préféré ne pas savoir ce qui se passait pendant la campagne électorale, afin de ne pas donner raison à leurs adversaires politiques et de ne pas nuire à leurs chances de former un gouvernement majoritaire. Voilà pour cet épisode.
L'autre question à laquelle Mme Jérôme-Forget a été incapable de répondre hier porte sur l'absence de réaction de son gouvernement et de la Caisse de dépôt à une mise en garde de la Banque du Canada concernant les papiers commerciaux en 2005. C'est le sous-gouverneur de la Banque du Canada, Pierre Duguay, qui a révélé la semaine dernière, en commission parlementaire, avoir lancé cet avertissement. «Donc, vous avez donné un avertissement, mais il y a des gens qui n'en ont pas tenu compte?» lui a-t-on demandé. «Exactement», a répondu M. Duguay.
Est-ce qu'on a lu cette mise en garde à Québec ou à la Caisse de dépôt et pourquoi ne pas en avoir tenu compte? Impossible d'avoir une réponse de la ministre.
Tout au long de sa comparution d'hier, Monique Jérôme-Forget s'est retranchée derrière son devoir de non-ingérence dans les affaires de la Caisse. Elle n'a pas tort sur le principe de la chose, mais l'opposition lui a rappelé, avec raison, qu'elle avait quand même le devoir de se tenir informée.
On comprend mieux, maintenant, pourquoi la ministre tenait tant à laisser passer les dirigeants de la Caisse avant de s'expliquer. Elle comptait sur eux pour répondre aux questions auxquelles elle n'avait pas d'explication. Pressée de toutes parts, elle a dû faire face à la tempête hier, mais elle n'a pas été convaincante. Ce n'est pas la nomination en catastrophe de Michael Sabia hier qui va clore ce débat.


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