Des pertes sur de l'argent emprunté

Gilles Taillon, le critique des finances de Mario Dumont, était un gentleman, Legault est un pitbull. Voilà une session parlementaire qui promet. La visite chez le dentiste coûtera cher et elle sera douloureuse.

CDPQ-Subprimes - qui sont les coupables?



(Québec) Le gouvernement Charest se comporte comme un patient atteint d'un mal de dent qui reporte sans cesse sa visite chez le dentiste, dans l'espoir que la douleur passe.
Jour après jour, les libéraux refusent d'aller s'expliquer en commission parlementaire sur la Caisse de dépôt, sans se rendre compte que ce ne sont plus les pertes de l'institution qui leur font le plus mal, mais leur entêtement à refuser de rendre des comptes.
Pourtant, ils seront bien obligés de passer chez le dentiste tôt ou tard, surtout après avoir confessé hier des pertes combinées de plus de 8,5 milliards $ dans le Fonds des générations et dans le Fonds d'amortissement des régimes de retraite des employés des secteurs public et parapublic (FARR).
Rassurez-vous, ces pertes ne s'additionnent pas à l'hémorragie de 40 milliards $ dans le portefeuille de la Caisse de dépôt. Elles en font partie. Mais ce qui fait mal, surtout dans le cas du FARR, c'est qu'il s'agit de pertes sur de l'argent emprunté. Des pertes, a concédé à regret la ministre Jérôme-Forget, qui auront un impact dans le prochain budget.
Le Fonds d'amortissement a été créé en 1993 pour payer les prestations de retraite des employés de l'État et est géré par la Caisse de dépôt. Le problème, c'est que contrairement aux entreprises privées, qui ont l'obligation de capitaliser leurs régimes de pension à même leurs revenus, le gouvernement le fait par des emprunts, c'est-à-dire des émissions d'obligations. Selon les documents budgétaires de mars 2008, la valeur du Fonds était alors de 31,7 milliards $. C'est près du quart de cette somme qui s'est envolé dans les déboires de la Caisse de dépôt. Tant et aussi longtemps que la Caisse faisait des profits, la dette obligataire du gouvernement était moins élevée que la valeur capitalisée du Fonds. Mais si le quart de la cagnotte a disparu, la dette du gouvernement augmentera en conséquence. C'est la mauvaise nouvelle que Mme Jérôme-Forget nous annoncera dans son prochain budget, à travers tout le reste.
Il fallait voir le malaise de la ministre à la période de questions pour comprendre à quel point le gouvernement n'a pas hâte de donner le détail des pertes encourues par tous les organismes dont les fonds sont gérés par la Caisse de dépôt. Les libéraux ont tenté hier d'appliquer au Parti québécois la stratégie utilisée contre l'Action démocratique, qu'ils accusaient sans cesse de n'avoir rien à proposer.
Mais les péquistes sont beaucoup plus coriaces et expérimentés que les adéquistes, surtout lorsque François Legault mène la charge sur les finances publiques. Hier, il a forcé la ministre Jérôme-Forget à admettre que les rapports mensuels de son ministère lui annonçaient les pertes du Fonds des générations dès le 17 octobre. Il devient de plus en plus difficile, pour la ministre, de soutenir qu'elle ignorait la gravité de la situation de la Caisse de dépôt à la fin de novembre, pendant la campagne électorale. Dans les circonstances, on finira par croire que la seule raison pour laquelle Mme Jérôme-Forget refuse d'aller témoigner en commission parlementaire, c'est parce qu'elle y serait assermentée... Et sous serment, on ne peut pas dire n'importe quoi!
Monique Jérôme-Forget croyait avoir le haut du pavé hier dans sa première réponse à François Legault, en lui reprochant de ne pas avoir posé de questions sur la Caisse de dépôt. «Je sais que la ministre s'ennuyait de moi, elle ne perd rien pour attendre», a rétorqué Legault.
Gilles Taillon, le critique des finances de Mario Dumont, était un gentleman, Legault est un pitbull. Voilà une session parlementaire qui promet. La visite chez le dentiste coûtera cher et elle sera douloureuse.


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