La carrière et les serviteurs du public

Développer le sens du service public


Quand les Anglais – et les Américains – annoncent qu’ils vont se porter candidats à un poste d’intérêt public, ils disent qu’ils veulent ainsi aller « servir » (to serve) le peuple. Cela n’est pas toujours de la plus grande franchise; cela n’est pas toujours vrai, mais ça l’est souvent. Au moins les Anglais formulent la pensée, et parfois ils font ce qu’ils disent.
Les candidats Québécois, eux, ne disent pas beaucoup qu’ils vont entrer dans la religion du service; ils ne donnent pas l’impression de s’en aller piloter le navire de l’État, de la municipalité ou de la commission scolaire pour que celui-ci ne s’engage pas sur les récifs.

Je sais que la pureté civique ne se trouve pas que dans le monde public anglo-saxon. Mais, tout de même il y a un petit penchant, chez lui, pour au moins sauver les apparences. Par exemple, il est bien vu, chez eux, que les représentants se montrent disposés à agir pour le public pour un temps limité et contre une rémunération relativement modeste.
C’est que, voyez- vous, en principe, le candidat à la charge publique se doit d’avoir une carrière bien établie, de s’être fait une réputation dans son environnement de travail et d’action; cela lui donne ainsi, - toujours en principe,- la possibilité d’aller rendre service à la collectivité pour un temps limité, quasi en passant. Et pour que la tentation ne soit pas trop forte, pour un candidat, d’aller s’incruster dans la gouverne du public, on restreint son mandat pour deux termes. Cela rend l’accès à la dictature et à la prébende beaucoup plus difficile.
Chez nous je ne vois pas que cet esprit de la gouverne publique soit prédominant, ni même fréquent. Nous ne nous indignons pas trop de ce que le maire d’une grande ville s’installe «au pouvoir» pendant deux décennies! Nous ne nous indignons pas trop non plus de voir des premiers ministres – Jean Charest par exemple - s’accrocher au pouvoir pendant trois mandats (quasiment quatre) consécutifs, même s’il n’a recueilli qu’une minorité des voix populaires. Ces gens-là entrent donc en politique «pour faire carrière»; ils ne viennent pas pour prêter mainforte en passant.
Et c’est pourquoi les groupes d’intérêt, les partis, pas tous formés par des idéalistes comme moi, ne se gênent plus pour donner «un salaire» à leurs chefs afin que ceux-ci s’installent au pouvoir ad infinitum et répandent par la suite les faveurs que l’on sait, à ceux dont ils sont redevables.
Dans le cas du premier ministre Charest, le «salaire» ainsi versé par le parti, c’est-à-dire par ses amis d’Ottawa, s’est ajouté à la rémunération versée par l’État à un personnage élu. Cela s’est fait en cachette, au moins au début, ce qui signifie que les auteurs du système avaient quelque conscience de son irrégularité.
De fait, si M. Charest avait été un pur et bon anglo-saxon, il aurait poursuivi sa carrière d’avocat et il ne se serait engagé au «service» du public après que sa réputation eut été faite. Ainsi il n’aurait pas eu besoin de pourboire pour vivre confortablement à Montréal.
Ces jours-ci il me semble que la coutume de la distribution des salaires, des présalaires, aux chefs politiques se soit propagée au grand jour, sans que sur la surface de la mer de l’opinion n’ait été le moindrement plissée. Récemment le chef d’un parti, non élu, M. Philippe Couillard s’est fait payer le salaire d’un important dirigeant d’État, pour la simple raison qu’il pourrait être élu un jour à un poste de gouvernance.
Qu’est-ce qui empêche un pareil personnage, justement, de poursuivre sa profession en attendant que le peuple l’appelle à «servir»? Il en va de même pour le chef d’un autre parti politique non-élu, - indépendantiste celui là – M. Jean-Martin Aussant, qui reçoit dorénavant de son parti, Option nationale, une pension considérable en attendant de se faire élire! Pourquoi lui aussi n’exerce-t-il pas sa profession en attendant de recevoir l’adhésion populaire et de se faire rembourser ses dépenses?
Cette nouvelle «coutume» n’est pas étrangère à une loi québécoise nouvelle qui rémunère les partis en fonction d’un certain nombre des votes. Par conséquent ce sont les derniers publics qui payent les chefs politiques qui «espèrent» se faire élire un jour. N’est-ce pas là une incitation au carriérisme politique qui mène à la constitution de factions intouchables; à la constitution de moutonneries partisanes comme celles qui nous préoccupent actuellement?
Si nous, Québécois, voulons nous affranchir un jour collectivement il serait bon que nous manifestions clairement notre volonté de «servir» la dite collectivité par une certaine force de caractère, par une constance professionnelle et sans trop d’attaches financières. On ne va pas au Parlement ou au CSSS pour réussir.
On doit y aller pour donner un coup de pouce à la liberté. Et pas trop longtemps. La longue durée, en politique, est suspecte. De mon point de vue il s’agit, pour nous, d’établir un mode de vie républicain; de fonder une république où les notions d’égalité et de fraternité ne sont pas qu’abstractions et où une certaine abnégation l’emporterait sur le désir d’avoir accès à des postes lucratifs et permanents.


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7 commentaires

  • Archives de Vigile Répondre

    18 juin 2013

    Je sais que la pureté civique ne se trouve pas que dans le monde public anglo-saxon. Mais, tout de même il y a un petit penchant, chez lui, pour au moins sauver les apparences. Par exemple, il est bien vu, chez eux, que les représentants se montrent disposés à agir pour le public pour un temps limité et contre une rémunération relativement modeste.
    C’est que, voyez- vous, en principe, le candidat à la charge publique se doit d’avoir une carrière bien établie, de s’être fait une réputation dans son environnement de travail et d’action ; cela lui donne ainsi, - toujours en principe,- la possibilité d’aller rendre service à la collectivité pour un temps limité, quasi en passant. Et pour que la tentation ne soit pas trop forte, pour un candidat, d’aller s’incruster dans la gouverne du public, on restreint son mandat pour deux termes. Cela rend l’accès à la dictature et à la prébende beaucoup plus difficile.

    Le système anglo-saxon est fondé sur l'appartenance à la franc-maçonnerie. Ce n'est pas des individus au pouvoir, mais une clique. Les gens au pouvoir y sont pour distribuer des contrats au privé, aux compagnies gouvernées par leurs frères. Une fois leur terme accompli, ils cèdent la place pour des frangins et peuvent espérer de bons postes dans les compagnies qui ont reçus beaucoup de contrats. Officiellement, on les louangent pour la connaissance du système administratif et des contacts qu'ils conservent pour le lobbying. Si un haut-fonctionnaire, membre d'une loge maçonnique, refuse de céder sa place, ses frangins peuvent lui faire du tort en révélant des informations compromettantes extorquées durant le processus initiatique ou acquises par une surveillance "fraternelle" (chaque frère épiant l'autre puisque gardien de son frère).
    Les Canadiens-Français d'avant la Patente, avaient du mal à monter dans la hiérarchie fédérale qui était jadis une chasse gardée des loges anglaises, assez orangistes.
    Les Écossais et Anglais dominaient jadis, mais aujourd'hui, c'est plutôt le B'naï Brith qui domine le fédéral pour contrôler les postes stratégiques et forcer une politique sioniste. Le poste de Premier Ministre, c'est pour les Goyim qui font de bons serviteurs du Sionisme. Il ne sera jamais attribué à un Juif, car ils se souviennent de l'époque de Louis Blum.
    On remarque que certains politiciens prennent leur retraite pour passer au privé. Puis ils reviennent en politique.
    Un beau cas est Philippe Couillard. Lié au service de renseignement Canadien et proche d'Arthur Porter, on peut aisément deviner qu'il est aussi un frère de la franc-maçonnerie. Arthur Porter est un FM depuis des lustres. Il fut Grand Master et fait partie des Shriners.
    De même, Michael Applebaum est un membre des Shriners, sinon il n'aurait pas rencontré Guzzo pour l'introduire chez les Shriners. "To be One, Ask One" ou "2B1, ASK1".
    http://www.ledevoir.com/politique/montreal/368399/applebaum-au-resto-de-la-mafia
    Les Américains du peuple disent que les politiciens doivent faire deux "termes" : One term in power and the next term in Jail.

  • Archives de Vigile Répondre

    17 juin 2013

    Il faut aussi comprendre que presque toujours les postes de décision finissent par être occupés par les mêmes qu'on ne pouvait sentir lorsque nous étions sur les bancs d'école au secondaire et au cegep: les suffisants, les baveux, les fendants, etc...
    Dans ces conditions, il n'est pas surprenant de voir qu'il n'existe toujours pas de revenu de citoyenneté universel afin que tous les citoyens sans exception puissent vivre décemment et heureux.
    Étrangement, je dois admettre que l'un des rares politiciens que j'ai vu qui dégageait humilité et modestie était un libéral. C'était Claude Ryan, un bon Irlandais catholique.
    Peut-être se trompait-il d'être un ardent fédéraliste. Mais par contre j'aimais ses qualités d'homme et ce qu'il dégageait comme personne.

  • Lise Reid Répondre

    16 juin 2013

    Barack Obama est au service du peuple américain...et
    avant lui George W Bush... vraiment.

  • Archives de Vigile Répondre

    16 juin 2013

    Histoire de trou d'eau
    Justin Trudeau remboursera les groupes qui l'ont payé pour ramasser des fonds
    http://www.radio-canada.ca/nouvelles/Politique/2013/06/16/002-justin-trudeau-chef-remboursement-parti-liberal.shtml

    Ça commence à sentir mauvais...
    tête a claque les grenouilles
    http://www.youtube.com/watch?v=_jW1kyS6krs

  • Archives de Vigile Répondre

    16 juin 2013

    M. Bonhomme,
    Les politiciens ne sont pas au service de la population. Dans une société civilisée où le bien commun est ce qui prime, ça devrait être le cas... mais nous ne vivons pas dans une société civilisée.
    Et nous n'avons d'ailleurs jamais connu la civilisation. C'est le fameux humaniste anglais du 16e siècle Thomas More qui a le mieux décrit comment fonctionne un État et au service de qui sont les politiciens dans son ouvrage classique intitulé "L'Utopie":
    "Lorsque j’envisage et j’observe les républiques aujourd’hui les plus florissantes, je n’y vois, Dieu me pardonne ! qu’une certaine conspiration des riches faisant au mieux leurs affaires sous le nom et le titre fastueux de république. Les conjurés cherchent par toutes les ruses et par tous les moyens possibles à atteindre ce double but :
    Premièrement, s’assurer la possession certaine et indéfinie d’une fortune plus ou moins mal acquise ; secondement, abuser de la misère des pauvres, abuser de leurs personnes, et acheter au plus bas prix possible leur industrie et leurs labeurs.
    Et ces machinations décrétées par les riches au nom de l’État, et par conséquent au nom même des pauvres, sont devenues des lois."
    Donc, selon Thomas More, les personnalités politiques sont au service d'une minorité de riches qui tirent profit de l'État.
    Malheureux que rien n'ait changé en 500 ans, qu'on ait pas progressé vers le bien commun...
    Et c'est encore un Anglais qui nous l'apprend à nous Québécois.
    Les Anglais ont leur défaut, mais force est d'admettre que souvent ils voient plus clair que nous Québécois.

  • Archives de Vigile Répondre

    15 juin 2013

    Cher Jean-Pierre,
    Votre analyse est partielle, partisane et incomplète.
    Il y a parmi les péquistes - Pauline Marois, François Gendron et d'autres - qui sont des dinosaures et qui n'ont pas fait d'autres choses dans la vie que de recevoir leur salaire de l'État, c'est-à-dire de nous tous.
    Facile d'attaquer Jean-Martin Aussant et pas les dinosaures.
    Deuxio, vous n'allez pas au fond des choses parce que vous êtes incapable de remettre en cause le dogme du gouvernement représentatif - l'élection - les élus - qui est à la source de tous les maux et de toute la corruption,
    Fait dur.
    Pierre Cloutier

  • Fernand Durand Répondre

    15 juin 2013

    Pensez-vous que Stephen Harper est anglo-saxon ????