Voilà, c’est fait, Stephen Harper vient de confirmer qu’il est prêt à tout pour obtenir un gouvernement majoritaire, y compris courir le risque de perdre des députés au Québec pour rafler la mise dans les provinces atlantiques. Faites le calcul. Sur les 32 sièges réservés à ces provinces à la chambre des communes, les Conservateurs en détiennent 14, le PLC en détient 14, et le NPD en détient 4.
Pour Harper, il est infiniment plus facile d’aller chercher sa majorité dans les provinces atlantiques qu’au Québec où ses propres sondages lui indiquent que non seulement il n’en gagnera pas, mais qu’il peut en perdre, notamment dans la région de Québec.
En signalant son appui comme il vient de le faire au projet hydro-électrique terre-neuvien du Bas Churchill, Harper s’assure de rafler non seulement tous les sièges de Terre-Neuve, mais aussi de la Nouvelle-Écosse, d’une partie du Nouveau-Brunswick et de l’Île-du-Prince-Édouard dont les populations se trouveront à en bénéficier sous forme d’une réduction de leurs tarifs d’électricité grâce à la construction d’une ligne de transmission sous-marine entre le Labrador, Terre-Neuve, et la Nouvelle-Écosse.

Le hic, c’est que la construction de cette nouvelle ligne de transmission va requérir une mise de fond importante de la part du gouvernement fédéral pour être rentable, et que le Québec et Hydro-Québec se sont toujours objectés à une telle participation du fédérale en invoquant le fait qu’ils n’avaient pas bénéficié d’une telle participation financière lorsque Hydro-Québec a bâti son réseau de transmission, et qu’il s’agissait d’une intervention qui avait pour effet de fausser le jeu économique au détriment du Québec et des Québécois.
Cette décision de Harper est donc susceptible de causer une véritable levée de boucliers au Québec où les premiers indices laissent présager un important ressac des appuis conservateurs et une montée en puissance du ressentiment à l’endroit du gouvernement fédéral et du fédéralisme.
Et non seulement la décision de Harper va-t-elle être applaudie dans les provinces atlantiques, mais elle va l’être aussi à travers le Canada où tout le monde se réjouira du bon coup contre le Québec. Depuis le temps que le ROC rêve de mettre le Québec à sa place !
Quand je vous répète depuis 15 mois que jamais la conjoncture n’a été meilleure, c’est à ce genre de chose que je pense. Ça fait longtemps que ce projet mijote, et quiconque se donnait la peine de suivre l’actualité économique dans les autres provinces était en mesure d’anticiper ce qui s’en venait, et à propos de quoi nos médias et nos dirigeants politiques se sont bien abstenus de nous informer.
Le coup de force de Harper, car c’est bien de cela qu’il s’agit, montre qu’il est même prêt à risquer l’implosion du Canada pour parvenir à ses fins d’obtenir un gouvernement majoritaire. S’il est prêt à prendre un tel risque, c’est qu’il a l’intention de faire quelque chose de très précis avec ce pouvoir majoritaire. Quelque chose qu’il ne nous a pas dit et que nous ne savons pas. Sur la base de ce que nous avons vu de lui jusqu’ici, il y a de quoi entretenir les plus vives inquiétudes.