Sur la grande scène politique où l'on reprend le même spectacle, année après année, dans cet étrange pays où nous habitons, seuls les comédiens changent. La pièce, elle, est toujours la même. On la rejoue sur de petites ou de grandes scènes, toujours dans le même décor. On fait d'ailleurs des auditions en ce moment. Il s'agit de distribuer un grand rôle, celui de chef du Parti libéral du Canada, qui deviendra forcément un jour premier ministre du Canada.
C'est là que le grand sorcier Ignatieff entre en scène. Il veut le rôle. Il dit qu'il s'y est préparé car il a beaucoup joué à l'étranger. Certains ont des doutes sur la pertinence de ses expériences car le rôle qu'il ambitionne est très particulier.
Il faut à celui qui le joue un dosage d'un peu d'hypocrisie, d'une bonne dose d'arrogance, une capacité énorme de mépris, un sens de l'honneur assez élastique, un air supérieur en tout temps et un énorme ego qui lui permettra de ne jamais douter de rien. Être un peu baveux ne peut pas nuire non plus.
Il faut savoir, en plus, promettre sans s'engager, mentir en souriant, reprendre ce qu'on a déjà donné, parler sans rien dire et n'utiliser les mots que comme des jetons qu'on met sur une table de jeux. Histoire de voir ce qu'ils peuvent rapporter.
Comme le mot «nation» par exemple. Peut-il permettre de gagner plus vite?
Le grand sorcier qui n'avait pas grand-chose d'autre à offrir, a joué son plus gros jeton: NATION. À l'instant même où le mot a été lancé, la foule qui observait l'audition du Sorcier s'est divisée en deux parties. D'un côté ceux qui ont trouvé que c'était une véritable trouvaille et qui ont applaudi. Bravo! ont-ils crié. Enfin quelqu'un qui a le courage d'appeler les choses par leur nom. Le Québec forme une nation, c'est tellement évident que ça crève les yeux. Voilà un grand sorcier qui nous fera faire un pas en avant.
Les autres ont hurlé. Quoi? Pas encore cette histoire de nation! C'est qui cet imbécile qui ramène l'idée complètement folle que le Québec serait différent du reste du Canada? D'où sort-il? Il ne va pas nous refaire le coup de la société distincte. C'est du déjà voooooo! Ce que nous voulons, c'est un Canada uni. Que le Québec cesse de se prendre pour un autre. Ce que nous voulons, c'est un Québec soumis.
Pauvre grand sorcier
Le pauvre grand sorcier est en train d'apprendre qu'on ne peut pas plaire au Québec et au Canada en même temps. D'autres l'ont essayé avant lui et ils ont tous mordu la poussière. Si on reconnaît que le Québec est une nation, on se fait élire au Québec mais on perd le reste du Canada. Et si on se fait élire dans le reste du Canada, on perd le Québec.
Méchant dilemme. Surtout que le grand sorcier n'était pas là pour voir de grands acteurs comme Pierre Elliot Trudeau, Brian Mulroney ou Jean Chrétien faire leur show. Le Grand Sorcier a pensé qu'il lui suffirait d'apparaître pour que les difficultés s'aplanissent. Grave erreur. Tous les premiers ministres du Canada ont vécu avec le mot «nation québécoise» comme une roche dans leur soulier. Ils ont fini par y laisser leur peau.
Le grand sorcier Ignatieff est trop chic, trop distingué, pour le rôle qu'il ambitionne. La lutte à finir qui se joue au Canada depuis plus d'un siècle a plus besoin d'un chat de gouttière dans le troisième acte que d'un distingué professeur. Et des chats de gouttière, on en a plein. Ils miaulent dans la coulisse. L'Halloween, c'est leur terrain de jeu naturel. Depuis le temps qu'ils font peur au monde.
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