Élection 2008

L'épouvantail économique

Comment prétendre qu’il est plus sûr pour le Québec de livrer combat avec une main attachée dans le dos…

Chronique de Patrice Boileau

L’élection générale qui est déclenchée aujourd’hui se fera donc autour de l’enjeu classique du développement économique du Québec. Face à une crise financière qui commence à faire sentir ses effets sur l’économie réelle, Jean Charest tentera de gagner un pari qui a échappé à Stephen Harper : celui de faire élire une majorité de députés qui assurerait, selon lui, une stabilité au gouvernement capable de mieux affronter la tourmente qui se lève.
Il fallait entendre le ministre du Développement économique, Raymond Bachand, en rajouter dernièrement à ce sujet. Il a rabâché le vieux discours fédéraliste voulant que l’incertitude politique n’aide pas le Québec à triompher des turbulences économiques! Ainsi, le député libéral de la circonscription d’Outremont a reproché à l’Action démocratique de vouloir parler de constitution et au Parti québécois, lui, de souveraineté. Le pauvre clown ne voit-il pas que l’activité économique au Québec ralentit alors qu’un parti ultra-fédéraliste forme le gouvernement à l’Assemblée nationale? Les sondages qui prédisent que son parti pourrait faire élire une majorité de députés ne semblent pas davantage favoriser une embellie. Difficile en conséquence de croire ses mensonges. La vérité est qu’une gouvernance fédéraliste ne garantit en rien la stabilité économique. Ce sont avec les libéraux de Jean Charest que les Québécois se dirigent vers une tourmente économique qui va faire mal, point à la ligne.
L’économie est une bête féroce qu’aucun gouvernement dans le monde n'a réussi à mater. Un peu comme un rodéo, il est possible de rester en équilibre momentanément sur le taureau. Sauf que l’animal finit toujours par avoir le dernier mot! Au mieux, les États peuvent atténuer les fluctuations cycliques de l’économie, sans plus. À condition évidemment de disposer de tous les leviers fiscaux et législatifs. Ce que le charlatan à Bachand n’a pas compris, tout comme la bande de complexés à laquelle il appartient, celle qui ose prétendre qu’il est plus sûr pour le Québec de livrer combat avec une main attachée dans le dos…
En poussant au maximum la logique de Jean Charest, Ottawa serait donc dans de beaux draps puisque dirigé par un gouvernement minoritaire. Le gouvernement fédéral échouera donc dans sa mission de préserver la population des méfaits du ralentissement économique. Balivernes! L’administration Harper pourra compter sur l’aide des partis d’opposition pour manœuvrer au travers de la tourmente, malgré les bourdes qu’a commises son ministre des Finances Jim Flaherty. Ce dernier n’en est pas à ses premières bêtises. Lorsqu’il occupait la même fonction à Queen’s Park, sous le gouvernement conservateur de Mike Harris, Flaherty avait également abaissé imprudemment le fardeau fiscal des contribuables. Ce qui a laissé un déficit budgétaire de plus de quatre milliards en Ontario. La présente administration libérale de l’endroit n’a d’ailleurs toujours pas terminé de nettoyer le gâchis laissé par le bras droit de Stephen Harper. Le cafouillage économique n’est donc pas l’affaire des souverainistes, comme essaient de le faire croire ceux qui vont chercher à en camoufler un à Québec, en déclenchant des élections.
La campagne électorale qui débute aujourd’hui au Québec doit une fois pour toutes éliminer l’épouvantail économique qu’agitent machinalement les libéraux pour convaincre les Québécois de ne pas élire un gouvernement souverainiste. L’instabilité politique est une chimère qui doit irrémédiablement disparaître de la mémoire collective des Québécois. La Chine a pu se développer de façon fulgurante ses dernières années, même si les autorités de l’endroit ont longtemps privilégié un modèle de développement contraire à celui préconisé par la meute d’investisseurs qui y brassent aujourd’hui des affaires. Manifestement, le Québec est un modèle exemplaire d’intégrité politique et économique. Et son accession à l’indépendance politique ne fera qu’ajouter à cette image de droiture. Voilà ce qui doit être dit à l’électorat québécois.
***
Le gouvernement libéral de Jean Charest ne dévoile pas la vérité sur l’état de santé des finances publiques du Québec. Il ment à la population lorsqu’il affirme maintenir l’équilibre budgétaire. Il n’avait pas en poche les milliards qu’il a octroyés pour rénover les infrastructures routières. Ceux qu’il a attribués pour financer la construction des mégas hôpitaux universitaires à Montréal ont également été dénichés à crédit. Le Québec n’a pas les moyens de se payer deux centres de santé. Seule une défaite électorale du PLQ permettra d’éviter un second pillage de fonds publics digne de celui observé lors de la construction du stade olympique. Voilà qui peut avoir des conséquences dramatiques en cette période de ralentissement économique. Un déficit budgétaire majeur pourrait convaincre les maisons de crédit américaines à imposer une baisse de la côte de solvabilité du Québec. Les hallucinations milliardaires de la ministre des Finances, Monique Jérôme-Forget, ne les ont sûrement pas rassurés. La mise à jour économique qu’elle a présentée hier n’a en effet convaincu personne au sujet de cette réserve fictive de 2.3 milliards de dollars.
Manifestement, les Québécois ont beaucoup plus à perdre en reconduisant les libéraux de Jean Charest au pouvoir. De plus, le PLQ n’a plus de marge de manœuvre face à Ottawa, depuis qu’il a sottement alloué une baisse d’impôt aux Québécois à même un transfert fédéral, en 2006. Le gouvernement canadien pourra donc de nouveau retenir unilatéralement les contributions fiscales du Québec pour équilibrer ses finances, comme il l’a fait au milieu des années 1990. Est-ce un gouvernement fédéraliste à Québec qui est le mieux placé pour empêcher que ne surviennent ces nouveaux détournements de fonds? Aux Québécois de répondre à cette question le 8 décembre prochain.
Patrice Boileau


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2 commentaires

  • Marcel Haché Répondre

    5 novembre 2008

    Le gouvernement Charest n'aurait aucune difficulté à faire passer des lois populaires.L'opposition serait alors désarmée.
    Mais Charest compte sans doute présenter des lois impopulaires.Cela demande un courage qu'il n'a pas.Il lui vaudrait mieux être majoritaire,bien évidemment...
    Cela ferait alors écho à la déclaration de sa ministre Gagnon-Tremblay qui invitait les québécois--quelques jours après qu'un 1,3 millions de québécois aient voté Bloc !--à changer leurs manières de voir.Fallait-il être prétentieuse!
    Prétention et couardise,la recette parfaite pour en manger toute une.

  • Archives de Vigile Répondre

    5 novembre 2008

    Mais au contraire, c'est un cadeau innestimable que cette campagne sur l'économie.
    Mme Marois n'a qu'à promettre de nationaliser l'exploitation pétrolière de l'ïle Anticostie, des rives de Gaspé et des terres entre Monréal et Québec.
    Nous seront le deuxième Alberta et pas même poluant !
    À l'épreuve de la crise.
    Ce n'est pas Charest qui nationalisera ça. Il ne fera pas ça à ses amis qui sont aux sommets des entreprises privées qui exploitent ces ressources québécoises actuellement.
    Les Québécois ne diront pas non à celà, c'est certain.
    Je vous rappele que c'est le PQ qui a concu le projet de deux mégas hôpitaux "linguistiques".