Joyeux Noël à tous les sikhs, musulmans, juifs, chrétiens et athées

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Noël et Jour de l'An - 2010- 2011

(Photo Reuters)

Chaque année à pareille date resurgit la question des décorations de Noël dans les institutions publiques. [Cette année, c'est à deux sikhs de stricte observance, Harjeet Singh Bharb et Manjit Singh, que nous devons d'avoir relancé le débat->10582]. Devant la commission Bouchard-Taylor, ceux-ci ont déclaré, avec raison, que la règle sur les symboles religieux devait être la même pour tout le monde. L'ennui, c'est qu'ils y ont inclus le sapin de Noël, le mettant sur le même pied que le crucifix de l'Assemblée nationale.


Les lumières de Noël, ainsi que le mot Noël lui-même, n'ont rien de spécifiquement chrétien. Le mot Noël serait une contraction du latin natalis (naissance), tiré de «natalis dies sol invictus», le jour de naissance du soleil invaincu. Bien avant l'apparition du christianisme, cette fête était célébrée chez les Romains le 25 décembre, date à laquelle correspondait le solstice d'hiver avant la réforme du calendrier par Jules César.
La divinité qui représentait le soleil invaincu était Mithra. Le mithriacisme, apparu d'abord en Perse au IIIe siècle avant notre ère, connut son apogée à Rome au IIIe siècle de l'ère chrétienne; les chrétiens en ont tiré une bonne part de leurs symboles, de leurs rituels et de leur mythologie. Noël, christianisé au IVe siècle après que l'empereur Constantin eut imposé le christianisme comme religion d'État, n'est que l'un de ces emprunts. Le natalis dies dont il est question dans Noël n'est donc pas celui de Jésus mais celui de Mithra.
Une autre origine possible du mot Noël est le terme gaulois noio (nouveau) combiné au grec hel (soleil), ce qui donne noio hel pour nommer le jour du solstice. Que l'on adopte l'une ou l'autre des étymologies, Noël nous renvoie, dans les deux cas, aux fêtes du solstice d'hiver. Même les Vikings s'adonnaient à des festivités à l'approche de ce moment de l'année, festivités appelées yul; dans les langues scandinaves d'aujourd'hui, Noël se dit Yul, mot que l'on retrouve aussi dans l'anglais classique comme dans le terme yul log, la bûche de Noël.
Coutume celtique
Quant au sapin de Noël, il nous viendrait des Celtes. Plus de 1000 ans avant le christianisme, les Celtes décoraient un sapin (symbole de vie) avec des fruits et des fleurs lors du solstice d'hiver. La pratique serait passée au christianisme par les Alsaciens qui en avaient maintenu la tradition. Mais ce n'est qu'au XIXe siècle que le protestantisme allemand l'a adopté alors que le catholicisme ne s'y est résigné qu'au XXe siècle. Jusqu'aux années 40, l'Église catholique considérait encore le sapin de Noël comme une pratique païenne condamnable.
Le fait que le christianisme précise que la célébration religieuse qui a lieu le jour de Noël est la Nativité montre bien qu'il y a deux dimensions qui se recoupent le 25 décembre. Les fêtes de familles, les partys de bureau, les festins, les décorations, les échanges de cadeaux et les beuveries n'ont guère rien à voir avec le Jésus de la crèche. Aujourd'hui, Noël est souligné même au Japon et il faut y voir l'effet de la commercialisation plutôt que celui des missionnaires. La fête de la Nativité que célèbrent certains chrétiens n'est en fait pas parvenue à éclipser les fêtes carnavalesques héritées des Saturnales romaines et des réjouissances celtes. De la même façon que Mithra est tombé dans l'oubli, le père Noël a éclipsé le sens religieux de la fête.
On peut donc choisir de fêter ce que l'on veut le 25 décembre et les chrétiens n'ont pas l'exclusivité de ces festivités de fin d'année. Que l'on soit sikh, juif ou athée, on aurait bien tort de ne pas participer à ces réjouissances et de ne pas éclairer, par un sapin illuminé, les nuits les plus longues de l'hiver.
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Daniel Baril

L'auteur est anthropologue et conseiller au Mouvement laïque québécois.
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Anthropologue de formation, ex-rédacteur à l’hebdomadaire Forum de l’Université de Montréal, administrateur au Mouvement laïque québécois et à l’Association humaniste du Québec.

Auteur de Aux sources de l’anthropomorphisme et de l’idée de Dieu et codirecteur des ouvrages collectifs Heureux sans Dieu et Pour une reconnaissance de la laïcité au Québec.





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