Mettre le Québec à l’arrêt aura été somme toute facile. On a mis « la switch à off » en fermant les secteurs les plus à risque les uns après les autres. Et voilà !
Mais, de toute évidence, il sera beaucoup plus difficile de repartir la société, de savoir quand le faire et surtout, comment le faire…
« On a fermé d’un coup, a résumé Horacio Arruda. On ne peut pas rouvrir d’un coup. »
Et il ne croyait pas avoir aussi raison. La vigueur de la réaction qui a suivi l’évocation par François Legault d’une ouverture précoce des écoles avant le 4 mai a en effet dû surprendre à Québec. Parents, professeurs, syndicats ont réagi en chœur : wô les moteurs !
Or, tôt ou tard, convenons-en, il va falloir rouvrir les commerces, les usines, les tours de bureaux et il va aussi falloir rouvrir les écoles, les garderies et les services de garde.
Bien beau exiger qu’on attende l’automne, mais on semble oublier que le virus sera encore là à ce moment-là. Le risque sera même plus grand en septembre, car si tout repart en même temps, on connaîtra rapidement un autre pic de contamination.
Et donc, la question n’est pas de savoir quand on déconfinera au juste, mais comment on le fera. À quel rythme. Et dans quelle séquence.
Chose certaine, il faut qu’on commence à parler sérieusement du déconfinement.
Il faut qu’on s’ouvre tranquillement à l’idée que le Québec repartira avec en son sein un virus qui continuera de circuler.
Il faut qu’on s’ouvre à l’idée, par le fait même, d’immuniser graduellement la population, seule façon d’enrayer la contamination communautaire.
À l’heure actuelle, à peine 10 % de la population québécoise serait immunisée, selon les estimations. C’est très peu.
D’où l’ouverture du gouvernement et de la santé publique, dans un contexte où le pic de la contamination semble atteint, à rouvrir dans un avenir prévisible les écoles aux élèves, lesquels sont très peu à risque face à la COVID-19.
« L’épidémiologie fait que les jeunes enfants ne sont pas très malades, explique le Dr Arruda. Il y a toujours des exceptions possibles, mais c’est excessivement rare. Or, plus les enfants vont être immunisés par la maladie, moins ils vont devenir des vecteurs actifs auprès des personnes plus âgées. »
La peur des parents et des enseignants est tout à fait compréhensible dans le contexte. C’est peut-être l’envers de la réussite du trio Legault-McCann-Arruda : il a tellement bien réussi à sensibiliser la population au risque du virus que celle-ci en a peur comme de la peste. Même si le véritable risque touche les personnes de 60 ans et plus, voire de 70 ans et plus.
C’est d’ailleurs pour cette raison qu’advenant une ouverture hâtive des écoles, les enseignants plus âgés seraient appelés à rester chez eux. Même chose pour les enseignants ayant des maladies chroniques et autres personnes vulnérables.
Voilà une raison de plus de parler du déconfinement, et plus spécifiquement, des conditions dans lesquelles il devra se faire. Dans certaines régions d’abord ? Avec une partie seulement des élèves par école ? À l’aide de journées allégées ? Etc.
Le premier ministre a peut-être manqué de doigté en abordant la question de la réouverture progressive de la société à la légère, sans préparation. Mais reste qu’on est collectivement rendus là.