Graham Fraser n’écarte aucune option

Le commissaire aux langues officielles craint que les minorités linguistiques du pays fassent les frais des compressions à Radio-Canada

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La schizophrénie fédérale : selon Ottawa, Ottawa exagère !

Face aux nouvelles rondes de compressions à CBC/Radio-Canada, Graham Fraser n’écarte aucune option. Craignant que les minorités linguistiques du pays fassent à nouveau les frais des réductions budgétaires du radiotélédiffuseur, le commissaire aux languesofficielles évoque même la possibilité de se tourner vers les tribunaux, s’il le faut.

Jeudi, Graham Fraser arappelé à l’ordre le gouvernement fédéral et la SociétéRadio-Canada, soulignant leurs obligations respectives en vertu de la Loi sur les langues officielles. Une première étape qui pourrait mener à d’autres actions de sa part si Ottawa s’entête à faire comme s’il n’avait pas son mot à dire dans le dossier du sous-financement de Radio-Canada.

« Le gouvernement ne peut se laver les mains en se disant que ce n’est pas son problème », a affirmé M. Fraser en entrevue au Devoir, promettant d’utiliser tous les moyens à sa disposition, si cela s’avère nécessaire, pour s’assurer du respect des obligations de Radio-Canada, notamment de refléter la situation et les besoins particuliers des collectivités francophones et anglophones, y compris en situation minoritaire.

« J’ai toujours plusieurs outils prévus dans la loi face à chacune des situations, a affirmé M. Fraser. On ne fait pas un geste pour le plaisir de le faire, mais après une analyse afin de déterminer la meilleure façon d’en arriver à des résultats positifs. […] Intervenir devant les tribunaux, c’est une option qui existe dans la loi. »

Le commissaire avait poursuivi pour une première fois Radio-Canada, en 2010, à la suite de la décision de la société d’éliminer toutes les émissions produites et mises en ondes par la station francophone CBEF de Windsor, dans le sud-ouest de l’Ontario. Dans un jugement préliminaire, la Cour fédérale avait conclu que le CRTC et le commissaire aux langues officielles avaient compétence partagée pour trancher les plaintes des minorités linguistiques concernant la programmation du diffuseur.

Les nouvelles orientations stratégiques de la société d’État, qui doit retrancher près de 130 millions de dollars de son budget en raison des compressions fédérales, d’une baisse de ses revenus publicitaires et de la perte des droits de diffusion du hockey, inquiètent l’ex-journaliste. Ces coupes — on prévoit notamment l’élimination d’un emploi sur cinq et la diminution du nombre de productions maison — se répercuteront sans aucun doute sur les minorités francophones et anglophones en milieu minoritaire, dit-il.

« On sous-estime souvent à quel point, quand on vit ensituation minoritaire, c’est important d’avoir des voix rassembleuses, de la communauté, comme source d’information, de divertissement. Quand on élève une famille à Sudbury ou à Saint-Boniface, on veut que nos enfants puissent avoir un paysage linguistique qui leur soit propre. La présence de postes de radios et de télé, de journalistes sur place, c’est quelque chose d’extrêmement important. »

Sur le pied d’alerte

Du côté des minorités francophones en situation minoritaire également, on analyse actuellement différentes avenues. La Fédération des communautés francophones et acadienne (FCFA), qui dénonce fréquemment les tendances « montréalisantes » du diffuseur public canadien, se montre cette fois-ci particulièrement préoccupée par les intentions de la direction de Radio-Canada.

L’organisme n’a pas hésité, au cours des dernières années, à intenter des recours judiciaires contre Ottawa pour le forcer à respecter ses obligations envers les groupes linguistiques en situation minoritaire, par exemple lors de l’abolition du formulaire long du recensement.

« D’intenter une poursuite, on n’est pas encore rendu là, souligne la présidente de la FCFA, Marie-France Kenny. Mais nous plaiderons une fois de plus devant le CRTC pour que la Société Radio-Canada s’acquitte réellement de son mandat national. Le gouvernement a, lui, l’obligation de s’assurer qu’elle puisse le faire. »

Des arguments auxquels continue de faire la sourde oreille la ministre du Patrimoine (et députée de Saint-Boniface), Shelly Glover, qui maintient que la SRC est « responsable de son propre fonctionnement » et que le gouvernement Harper n’interviendra pas.


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