Folie des grandeurs

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Une folie qui n'aurait jamais vu le jour sans le fédéralisme canadien

Il était écrit dans le ciel que la centrale hydroélectrique de Muskrat Falls au Labrador ne serait jamais rentable. Même si Stephen Harper a déjà garanti un emprunt de 6,4 milliards pour permettre à Terre-Neuve de réaliser le rêve absurde d’un politicien mégalomane, Justin Trudeau n’a pas à faire de même.
Les Terre-Neuviens ont appris récemment de la bouche du nouveau président de la société d’État Nalcor Energy (l’équivalent d’Hydro-Québec), Stan Marshall, que les coûts du projet Muskrat Falls avaient bondi à plus de 11 milliards au lieu des 7 milliards prévus il y a quatre ans.

Muskrat Falls est situé au sud du barrage de Churchill Falls, qui appartient aussi à Terre-Neuve.

À la fin des années cinquante, le premier ministre de Terre-Neuve, le coloré Joey Smallwood, voulait construire un gros barrage avec pour objectif de vendre cette énergie aux États-Unis, ce qui amena l’actionnaire principal de la compagnie d’électricité, la société privée Brinco, à tenter de négocier des contrats d’approvisionnement à long terme avec les Américains, et avec Hydro-Québec pour le transport de cette énergie. Les négociations échouèrent au début des années soixante, et Brinco tenta cette fois de convaincre le gouvernement Lesage d’acheter l’énergie qui serait produite aux chutes Churchill (alors Hamilton Falls). Mais faute d’entente pour revendre cette électricité au sud, Lesage refusa de s’engager à développer le potentiel de Terre-Neuve alors qu’au même moment se poursuivait la construction de la Manic.

Brinco dut donc chercher les centaines de millions auprès des financiers de Wall Street, eux aussi rébarbatifs en l’absence de débouché assuré pour l’électricité. C’est avec l’autorisation du premier ministre Smallwood que Brinco reprit les négociations avec le Québec pour en venir, finalement, à une entente par laquelle Hydro-Québec s’engageait à participer au financement de Churchill Falls et à acheter la presque totalité de l’électricité produite à un prix jugé raisonnable pour l’époque, mais qui se révéla dérisoire le jour où l’inflation fit exploser les prix de l’énergie.


Déjà dans les années cinquante, Joey Smallwood avait imaginé construire une ligne sous-marine entre le Labrador et Terre-Neuve pour éviter le Québec, une idée vite abandonnée à cause des coûts.

Or, voilà qu’en 2010 un autre conservateur très coloré, Danny Williams, reprit l’idée de se passer du Québec, qui refusait de renégocier l’entente de 1969 et de prendre à sa charge le financement d’une ligne jusqu’en Nouvelle-Angleterre. Lancée dans les grands projets, Hydro-Québec souhaitait participer au développement du Bas-Churchill, mais refusa mordicus de renégocier le contrat de 1969.

En 2010, Danny Williams annonce donc une entente avec la Nouvelle-Écosse pour la construction de Muskrat Falls et de la fameuse ligne de transport partiellement sous-marine reliant le Labrador à Terre-Neuve, à la Nouvelle-Écosse et à la Nouvelle-Angleterre. Le tout pour la modique somme de 7,4 milliards, un chiffre jugé optimiste par les analystes (dont Le Devoir), révisé récemment à 11,4 milliards.

En avril dernier, le président de Nalcor Energy, Ed Martin, quittait son poste dans un climat de scandale « pour prendre soin de sa famille ». Son successeur, Stan Marshall, reconnut aussitôt que Muskrat Falls était trop gros et trop coûteux pour Terre-Neuve. Quel client américain voudra s’engager pour 25 ans alors que le prix du gaz naturel est au plus bas ?
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