Finances publiques: le réveil promet d'être brutal

Budget Québec 2010


(Québec) Les Québécois s'illusionnent s'ils croient que les 5 milliards $ à trouver pour éliminer le déficit budgétaire en 2013-2014 ne les concernent pas; qu'il s'agit d'une vague affaire administrative et un problème touchant d'abord les syndiqués du secteur public.
La création d'une caisse santé, de nouvelles hausses de tarifs d'électricité et l'imposition d'au moins un autre point de TVQ supplémentaire seront inévitablement sur le radar gouvernemental.
Et encore, ces mesures ne permettront de parcourir qu'une partie de la route pour arriver à destination.
[Ce constat, c'est l'économiste Luc Godbout de l'Université de Sherbrooke qui l'a dressé en entrevue au Soleil, mercredi->22706].
Au lendemain de la mise à jour économique et financière du gouvernement du Québec, M. Godbout ne s'étonne guère que le ministère des Finances insiste pour dire que les consultations à venir devront s'inspirer des pistes de réflexion dégagées par plusieurs rapports au fil des ans. Ceux de Clair, de Ménard et de Castonguay sur la santé, ceux du Mouvement Desjardins et de l'économiste Pierre Fortin sur l'utilisation de la rente hydroélectrique et celui de Montmarquette sur la tarification.
Luc Godbout rappelle que la création d'une caisse santé, sur le modèle de celle présentée par l'ancien ministre Claude Castonguay, rapporterait 600 millions $ par année dans les coffres de l'État. Il ajoute qu'une augmentation de 10 % des tarifs d'Hydro-Québec permettrait d'en­­granger 1,1 milliard $ de plus annuellement et que la hausse d'un point de la taxe de vente du Québec, en sus de celle déjà prévue pour janvier 2011, fournirait 1,3 milliard $.
Total : 3 milliards $. Il manquerait encore 2,1 milliards $ pour effacer l'ardoise de 5,1 milliards $, qui apparaîtra malgré l'application du Plan de retour à l'équilibre budgétaire. Un plan qui sera d'ailleurs lui-même difficile à mettre en place. Songeons seulement à la réduction de la croissance des dépenses qui doit passer de 4,6 % à 3,2 % dès l'an prochain.
Si elles étaient retenues, les mesures évoquées par Luc Godbout ne passeraient pas comme une lettre à la poste, qui plus est. Pensons au tollé soulevé par la perspective, récemment évoquée, de hausser les tarifs du bloc patrimonial d'Hydro-Québec.
Ce serait probablement pire avec une caisse santé à la Castonguay, convient l'économiste de l'Université de Sherbrooke, par ailleurs chercheur à la Chaire de recherche en fiscalité et en finances publiques.
Il s'agirait d'une redevance qui serait payée une fois par année. Rien à voir, selon lui, avec le ticket modérateur interdit par la Loi canadienne sur la santé. Les bas salariés seraient épargnés et un plafond serait fixé de manière à ce que personne n'ait jamais à consacrer plus de 1 % de son revenu à cette caisse. La Colombie-Britannique et l'Ontario ont déjà des impôts santé. «Selon les modalités, ça pourrait rapporter 600 millions $», dit l'économiste.
Si les mesures qu'il évoque étaient retenues, il manquerait encore, donc, 2 milliards $. Or, «ça ne sera pas en augmentant les tarifs des permis de pêche qu'on les obtiendra».
Pire que l'Ontario
Luc Godbout ne croit pas que le Québec soit en meilleure posture que l'Ontario. Ce serait même plutôt le contraire. «On a un problème structurel.»
Les baby-boomers seront bientôt de plus en plus nombreux à prendre leur retraite, et «le bassin de travailleurs commencera à se contracter, ce qui ne sera pas le cas en Ontario».
En plus, «on est déjà plus endetté qu'ailleurs et on a un fardeau fiscal global plus élevé».
«On a un sprint à faire jusqu'en 2013-2014, mais il faudra se garder des forces pour affronter le marathon qui viendra après.»
Cinq milliards de dollars à trouver, «c'est l'équivalent des budgets réunis des ministères de l'Agriculture, de la Culture et des Communications, du Développement durable, du Développement économique, de la Famille, des Aînés, des Relations internationales, du Tourisme et du Travail».
Le réveil pourrait être brutal pour ceux qui détournent encore le regard.


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