L’ex-président Bush est en ville, aujourd’hui jeudi, à l’invitation de la Chambre de commerce. Devant l’Hôtel Reine-Elizabeth, des manifestants protesteront. Et il y a matière à protester : les politiques économiques de l’ex-président furent désastreuses. Il a, pour le moins, donné des signaux favorables au retour de la torture au mépris des conventions internationales et il a, en se fondant sur des motifs qui apparaissent comme mensongers, plongé l’Irak dans une guerre qui a fait 300 000 morts au bas mot.
Mais les manifestants ont choisi de ne pas se limiter à, par exemple, demander qu’il soit accusé de crimes de guerre ou d’incitation à la torture. Ils ont décidé de le déclarer « persona non grata ». Leur position de principe est que W ne devrait pas prendre la parole à Montréal.
Le Collectif Échec à la Guerre participe ainsi à une tendance assez fâcheuse qui pousse la protestation jusqu’à vouloir empêcher l’adversaire de parler. Peut-être vont-ils répéter leur exploit de septembre 2007 lorsqu’ils avaient acheté plusieurs places lors d’un événement organisé par le Cérium (dont je suis directeur exécutif) où l’alors ministre Maxime Bernier discourait sur la politique canadienne en Afghanistan, en ouverture d’un colloque où tous les points de vue s’exprimaient.
Plutôt que de prendre les micros d’assaut pendant la période de questions pour mettre le ministre en difficulté grâce à des questions pointues (Bernier était assez mal préparé, il aurait certainement chuté), les militants ont préféré une stratégie de disruption de l’événement, donc d’atteinte à la liberté d’expression. La période de question venue, ils n’étaient plus là. J’étais déçu, on a raté l’occasion d’un bon débat.
(Bon je sais ce que vous voulez savoir. Oui, Julie Couillard était présente. Non, elle ne portait pas la même robe que pour l’assermentation du ministre. Elle avait un col roulé. Satisfaits ? Alors je continue.)
A la Chambre de commerce, il n’y a pas de période de questions, ce qui est dommage. Mais ma position est que, tant qu’il n’est pas condamné pour crimes de guerre, George W Bush est un citoyen libre de ses mouvements et de ses paroles et il a le droit de venir répéter ici les mêmes sophismes qu’il a employés pendant ses huit ans de gouvernement.
Qu’il y ait, ce midi, des slogans, des pancartes et un symbolique lancer de souliers sur la photo de l’ex-président. Parfait. Mais s’il fallait que les militants tentent d’empêcher l’événement d’avoir lieu, ils n’agiraient pas comme des démocrates.
On ne fait pas « Échec à la guerre » lorsqu’on choisit de manifester contre un droit, on fait échec à la liberté. La liberté d’expression.
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Voir aussi : Faut-il financer W ? Non !
et : Faut-il crucifier W ? Oui et non !
Le blogue de Jean-François Lisée
Faut-il museler W ? Non !
Bush à Montréal
Jean-François Lisée297 articles
Ministre des relations internationales, de la francophonie et du commerce extérieur.
Il fut pendant 5 ans conseiller des premiers ministres québécois Jacques Parizeau et Lucien Bouchard et un des architectes de la stratégie référendaire qui mena le Québ...
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Ministre des relations internationales, de la francophonie et du commerce extérieur.
Il fut pendant 5 ans conseiller des premiers ministres québécois Jacques Parizeau et Lucien Bouchard et un des architectes de la stratégie référendaire qui mena le Québec à moins de 1% de la souveraineté en 1995. Il a écrit plusieurs livres sur la politique québécoise, dont Le Tricheur, sur Robert Bourassa et Dans l’œil de l’aigle, sur la politique américaine face au mouvement indépendantiste, qui lui valut la plus haute distinction littéraire canadienne. En 2000, il publiait Sortie de secours – comment échapper au déclin du Québec qui provoqua un important débat sur la situation et l’avenir politique du Québec. Pendant près de 20 ans il fut journaliste, correspondant à Paris et à Washington pour des médias québécois et français.
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