Symbole puissant que la page est définitivement tournée à Québec sur l'ère L'Allier, la Garde rouge du Royal 22ième régiment a hissé solennellement le drapeau du Canada cette année, pour la première fois depuis dix-sept ans, au mât principal sur le parvis de l'Hôtel de ville de Québec.
Le souverainiste Jean-Paul L'Allier avait banni le drapeau unifolié de «son» hôtel de ville. Autre signe des temps, les quelques dizaines de manifestants indépendantistes qui depuis dix ans cherchent à perturber la petite cérémonie protocolaire du 1er juillet, ont été confinés dans un petit enclos, de l'autre côté de la rue, mais à un mètre à peine des militaires qui, eux, occupaient toute la rue des Jardins. La seule vue de la Garde rouge, dans son flamboyant costume, excitait les passions des indépendantistes, animés par l'ex-felquiste Raymond Villeneuve et le cinéaste Pierre Falardeau. Les militaires ont, en plus, été chaudement applaudis, pour la deuxième fois en quelques jours à Québec.
Les touristes se délectaient devant ce cours accéléré d'histoire du Québec. Des militaires en apparat, devant des indépendantistes qui brandissent dans leurs dos le drapeau des patriotes. Les caméras crépitaient. Villeneuve jouissait.
Plein mon casque
Pierre Falardeau a une double personnalité: le gueulard vulgaire et l'analyste politique réfléchi. La manifestation du 1er juillet est une sorte de rendez-vous annuel pour lui et moi depuis plusieurs années. Il m'a accueilli amicalement à nouveau hier. Un jeune couple à nos côtés avait emmené leur bébé. «Tu vois, il y en a au moins un de plus que l'an passé, le groupe grossit», m'a-t-il lancé avec une pointe de cynisme. Il ne cache plus que ce pélerinage à Québec est devenu une figure obligée. «Je commence à en avoir plein mon casque», jette-t-il.
L'objectif de l'indépendance semble toujours s'éloigner dans le temps et la mode est au fédéralisme de concertation avec Stephen Harper.
«J'ai toujours été assez pessimiste, m'a-t-il expliqué. Je n'ai jamais aimé l'optimisme béat. Même quand Pierre Bourgault nous disait que l'indépendance était aussi inéluctable que le lever du soleil. Je répondais qu'il n'y a rien d'inéluctable. Dans les luttes politiques, il y a des périodes plus dures, plus désespérantes. Ça vas-tu repartir un moment donné ? Peut-être. Je ne sais même pas».
Militant outragé
D'autres journalistes se sont approchés. À la vue des micros, Falardeau est redevenu le militant outragé. Il a donné du bon «stock» pour les bulletins de nouvelles. Par exemple, en rappelant que le Québec était entré de force dans la confédération et que, même si le PQ de Pauline Marois repoussait aux calendres (sic) grecques un autre référendum, il pouvait en sortir de la même façon.
Il s'est aussi moqué de la fête du Canada, à côté de celles de l'Indépendance des États-Unis ou de la République française. «Ici , au Québec, c'est la fête du déménagement». Il a aussi apostophé les intellectuels, les jourmalistes, les artistes, «qui dorment au gaz».
Puis, il a ri de bon coeur en apercevant l'ex-maire de Québec, chef de cabinet de Jean Chrétien et témoin vedette devant la Commission Gomery sur le scandale des commandites, marcher en tête des dignitaires qui sortaient de la messe, à la Basilique, à côté. J'avoue que la scène était kafkaienne.
À un moment, campé face à moi, il m'a pris les deux épaules, comme s'il voulait me secouer pour me réveiller. «Que tu enlèves Chrétien, que tu le remplaces par quelqu'un de plus gentil, et vous parlez de fédéralisme d'ouverture les chroniqueurs politiques. Lâchez-moi !». À ce moment, il avait vraiment l'air désespéré de la bêtise de ses congénères.
La «manif» débutait: Québec français, Québec un pays, le Québec aux Québécois, Canadians go home«, scandait Raymond Villeneuve dans son porte-voix. La ministre Josée Verneer a passé en revue la Garde rouge, en adressant des regards rieurs aux jeunes soldats, au garde-à-vous, la baïonnette au canon. La foule applaudissait. Les indépendantistes rugissaient.
Pierre Falardeau se sentait vieux hier, alors que l'idée de l'indépendance stagne. Je parie cependant que le père d'Elvis Gratton sera de retour pour les célébrations exceptionnelles du 1er juillet 2008. Quand on fait partie du folklore, on a des devoirs!
Elvis Gratton désespère
L’objectif de l’indépendance semble toujours s’éloigner dans le temps et la mode est au fédéralisme de concertation avec Stephen Harper.
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