Colloque sur l’évolution de la question nationale

Duceppe et Marois veulent un référendum

30 octobre 1995 - il y a 15 ans

Mélissa Guillemette - A l’occasion des 15 ans du dernier référendum sur la souveraineté du Québec, Pauline Marois et Gilles Duceppe ont dit travailler main dans la main pour faire de la province un pays souverain. La chef du Parti québécois a défendu son plan pour y parvenir si elle était élue première ministre, tandis que le chef du Bloc québécois a dit que le «fossé» se creuse davantage entre le Québec et le reste du Canada, et qu’il se situe désormais au niveau des valeurs.

La dernière semaine a été mouvementée chez les souverainistes. En entrevue à Radio-Canada, Jacques Parizeau a dit mercredi que le chef du Bloc québécois est le plus efficace pour porter la souveraineté. Vendredi, Le Devoir révélait qu’une lettre mettant en doute le plan Marois et le concept de «gouvernance souverainiste» circule depuis quelques jours chez les militants du Parti québécois. La semaine précédente, l’ancien premier ministre Bernard Landry recommandait au Parti québécois de revenir à la question fondamentale: l’indépendance.

La chef n’est pas ébranlée et ne croit pas que son leadership soit remis en cause. «Je ne sens pas ça du tout, honnêtement. Et je sais que [ces commentaires sont] faits de bonne foi. Les gens veulent la souveraineté, ils ont hâte», a-t-elle dit après avoir fait un discours dans le cadre du troisième colloque Quelque chose comme un grand peuple, organisé par l’Institut de recherche sur le Québec.

Au centre de l'action

Le plan Marois propose entre autres de mener un référendum, sans toutefois s’engager sur le moment où il se tiendra et suggère de rapatrier certaines compétences d’Ottawa. Elle a martelé que la question de la souveraineté serait «au coeur de tous nos gestes», «au centre de l’action» et à «l’avant-plan, toujours et partout où il est possible».

Pauline Marois a indiqué qu’elle travaillait concrètement avec Gilles Duceppe pour reprendre «le travail de présentation et de préparation de la souveraineté» dans plusieurs domaines, indiquant que des précisions viendraient.

Gilles Duceppe a rappelé son appui à la chef péquiste Pauline Marois sur tous les plans, précisant que la souveraineté doit demeurer la priorité. Oui, il faut se battre pour des «ententes administratives», par exemple, mais «ça ne change pas le fond des choses. On doit faire ce travail tout en se disant qu’il faut également préparer le pays.» Selon lui, il n’y a toutefois pas de «troisième voie» possible; le fédéralisme renouvelé est un «cul de sac». «C’était l’essence de [l’Accord du lac] Meech et c’était également l’essence de [l’Accord de] Charlottetown, a-t-il dit samedi. On n’était pas d’accord à l’époque, mais au moins, [les fédéralistes] avaient quelque chose à dire. Ils ne disent plus rien.»

Le «fossé»

Les Québécois ne se reconnaissent pas dans les décisions prises à Ottawa, estime Gilles Duceppe, ce qui est un moteur pour la souveraineté. La volonté des conservateurs d’abolir le registre des armes à feu, les positions en matière d’environnement et le refus de signer la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones: autant de sujets qui creusent «le fossé» entre le Québec et le reste du Canada. «Ils ont une autre façon de faire les choses. Je ne dis pas qu’on est meilleurs [..], mais on est certainement différents. Et on ne peut pas exprimer notre différence dans ce cadre-là.»

Quant aux propos tenus par l’ancien péquiste Joseph Facal vendredi soir, qui invitait les souverainistes à rompre avec «l’obsession référendaire», puisque l’appui du peuple n’est pour l’instant pas à la veille d’atteindre la majorité, Gilles Duceppe a rappelé que «s’il avait fallu accepter ce raisonnement en 1995, il n’y aurait pas eu de référendum, parce que la souveraineté, dans l’ordre des priorités était à 7 % et l’appui était à 38 %. Aujourd’hui, il est à environ 40 %».

Le chef bloquiste a aussi invité les souverainistes à «parler» plutôt que de «déplorer» pour enfin arriver à un nouveau référendum. La députée péquiste et porte-parole en matière de relations internationales, Louise Beaudoin, a quant à elle expliqué que le débat au sein des troupes souverainistes est sein (sic). «Je préfère ça à la mort clinique» des échanges d’idées, a-t-elle confié, après son intervention au colloque.

Quelle morosité?

La «morosité» politique décrite par Joseph Facal vendredi ne se faisait pas sentir au colloque de samedi, où 200 personnes se sont présentées. La présidente du Comité national des jeunes du Parti québécois, Christine Normandin, croit au contraire que le débat sur la souveraineté est plus pertinent que jamais. «Les enjeux ne sont pas les mêmes qu’en 1995, le souverainisme n’est plus réactionnaire. On parle désormais [du gisement pétrolier] Old Harry et des questions énergétiques.» Elle voit l’indépendance du Québec comme «un moyen» pour élever la province, et non comme une «fin».

Le syndicaliste Gérald Larose a parlé des remises en doute du leadership de Pauline Marois ou du souverainisme comme d’un «faux problème». «Je m’implique dans plusieurs mouvements [écologistes et sociaux] et dans ces milieux, ça ne prendrait pas grand-chose pour que le feu reprenne», si un gouvernement péquiste était élu.

Au cours de la journée de samedi, une table ronde et des ateliers ont fait un retour sur les 15 ans écoulés depuis le dernier référendum sur la souveraineté du Québec. Lors de son intervention, Louise Beaudoin a d’abord fait ses excuses à un ex-candidat péquiste et ancien député libéral dans les années 1960, Yves Michaud, contre lequel une motion de blâme a été votée en 2000 à l’Assemblée nationale pour des propos jugés inacceptables concernant la communauté juive. M. Michaud a toujours nié ces propos. Vendredi, Joseph Facal faisait les mêmes excuses. La semaine dernière, le député de Québec solidaire Amir Khadir a indiqué qu'il tenterait de rallier les députés de l'Assemblée nationale autour d'un règlement qui éviterait ce genre de «dérapage».


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