Sous le règne du gouvernement conservateur de Stephen Harper, la défense des droits des femmes vacille, malmenée sur différents fronts, du soutien financier d'organismes essentiels à la remise en question d'acquis gagnés de haute lutte. Ce sont là des attaques sournoises et pernicieuses, dont l'aspect le plus inadmissible est qu'elles sont partie intégrante d'un système méprisant les droits.
C'est sans doute la lucidité et la sollicitude qui ont fait parler la sénatrice conservatrice Nancy Ruth. Dans une formule colorée et emportée, elle a enjoint aux groupes de femmes de se taire sur le délicat sujet de l'avortement, car elle craint le pire. «Shut the f...k up!»
Heureusement, personne n'a suivi cette instruction, si clairvoyante fût-elle. Depuis cette sortie, bien au contraire, le silence n'est pas de mise. Les langues se délient, l'opposition rugit son indignation quant à ce gouvernement qui manoeuvre en douce, grignote les acquis, affaiblit les mécanismes démocratiques, s'attaque à la défense des droits.
L'irritation a atteint son comble lorsque du lot, des organismes privés de l'aide d'Ottawa se sont détachés une douzaine de groupes voués à la défense des droits des femmes, certains soutenus financièrement depuis plus de 30 ans! L'opposition soulève d'importantes et judicieuses questions: la culture de l'intimidation règne-t-elle chez les conservateurs? Les subventions sont-elles liées au respect d'une idéologie?
Le gouvernement peut bien dépêcher pour sa défense la ministre Josée Verner, qui présente le tableau des subventions comme une opération strictement comptable. Tout le monde a saisi le principe de l'offre et de la demande. Beaucoup d'appelés, peu d'élus. Mais sur quelles bases rejette-t-on des organismes à qui on a donné pendant 34 ans? Et quels sont les critères fixant le sort des élus? Au nom de quoi, comme on l'apprend aujourd'hui, des groupes religieux remportent-ils une manche contre des groupes voués à la recherche fondamentale et à la défense des droits des femmes?
Tout cela ne serait pas si inquiétant si l'on ne soupçonnait pas ces pièces être des morceaux épars d'un casse-tête illustrant l'érosion des droits. Depuis leur arrivée au pouvoir, les conservateurs ont expédié nombre de signaux sans équivoque et inquiétants. À propos des droits des femmes: l'abolition du Programme de contestation judiciaire, la disparition du mandat de Condition féminine Canada de la promotion de l'égalité, la décision d'exclure l'avortement de l'initiative canadienne sur la santé maternelle et infantile à l'étranger.
À propos des groupes de défense des droits: l'incroyable crise qui se déroule à Droits et Démocratie, l'arrêt du soutien financier à des groupes comme Alternatives ou KAIROS, les compressions à la Commission canadienne des droits de la personne. Et c'est sans compter la liste infinie de dossiers qui ont démontré un mépris outrancier pour la transparence et le respect des droits de la personne: le cas d'Omar Khadr ou l'épineux dossier des détenus afghans, par exemple.
C'est un sombre tableau, qu'on ne peut parcourir sans réprimer une certaine irritation. C'est pourquoi, en dépit du bien intentionné conseil de Mme Nancy Ruth, il ne faut surtout pas... «fermer sa gueule».
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