Le train fantôme de la Montreal, Maine and Atlantic Railway (MMA) continue de pourrir l’existence des Méganticois, et ce, un an après avoir semé la mort et la destruction.
Plusieurs résidants appellent les décideurs politiques à faire disparaître au plus vite le trou béant au coeur de la municipalité, après quoi seulement ils pourront « tourner la page » sur la tragédie ferroviaire. À chaque coup d’oeil vers le centre-ville historique de la municipalité — aux allures d’un champ de bataille gagné par la désolation — ils sont confrontés à la nuit d’horreur du 6 juillet 2013, durant laquelle 47 personnes ont perdu la vie.
« Le travail de reconstruction [et de] protection de l’environnement, l’aide aux proches des victimes : tout cela va continuer. [Nous entendons] redonner non seulement l’espoir, mais la vie réelle et l’avenir à Lac-Mégantic », a promis le premier ministre, Philippe Couillard, dimanche midi, au terme d’une messe commémorative à la mémoire des victimes de la catastrophe.
Plus tôt, la mairesse Colette Roy-Laroche a invité les survivants de l’« horrible » tragédie ferroviaire à « tourner la page » puis à « embrasser l’avenir avec une bonne dose d’énergie, de courage et d’espoir ». « Tournons une page de notre histoire, non pas pour l’oublier ou la faire disparaître, mais pour nous permettre de mieux regarder vers l’avenir », a-t-elle déclaré lors d’une allocution dans la nuit de samedi à dimanche.
Lorsque l’attention des médias — et conséquemment celle de Québec et d’Ottawa — se lassera de Lac-Mégantic, quel sera notre avenir ? s’interroge une femme d’affaires à la retraite croisée par Le Devoir sur la passerelle de bois longeant le chemin de fer entre l’église Sainte-Agnès et le nouveau mail. « Ça va être quoi demain ? On va tomber tout seuls. […] Dans ma vieille tête, je ne sais pas comment ça va fonctionner », dit-elle, plongée dans l’inquiétude.
Selon elle, les autorités ont créé à coup de signaux contradictoires un climat d’incertitude minant tout espoir de faire battre à nouveau le coeur historique de Lac-Mégantic. « Pendant des mois, ils répètent : « Non, vous ne pourrez jamais occuper de nouveau votre immeuble. » Puis, un jour, ils disent: “ Vous pourrez peut-être. ”] C’est l’enfer. »
Elle juge négativement le complexe commercial aux allures de mini-DIX30 construit en quelques mois non loin du site du déraillement du train chargé de pétrole brut. « Les « condos », ça ne fonctionne pas. Ils ne vendent pas », indique-t-elle, ajoutant que les commerces de proximité de Lac-Mégantic sont boudés au profit de ceux de Saint-Georges et de Sherbrooke.
De son côté, le maire de Québec, Régis Labeaume, s’est dit persuadé que le centre commercial contribuera « vraiment » à « revitaliser » la municipalité. « Ils ont fait un bon travail » là où régnait il y a quelques mois une « désolation extraordinaire ».
Mais chose certaine, les propriétaires des immeubles épargnés par les flammes, mais inaccessibles depuis un an, sont à bout de souffle. Ils attendent toujours l’aide promise par l’ancien gouvernement québécois. « Ils sont en grande difficulté. Ça fait un an et ils attendent toujours », indique la conseillère en communication à Lac-Mégantic, Karine Dubé.
« 47 raisons d’exiger une voie de contournement »
Des manifestants ont attiré l’attention des élus présents à la cérémonie de commémoration sur l’importance d’une voie de contournement pour la municipalité après le déraillement du 6 juillet 2013. Yves Thibodeau et Monique Cloutier tiennent fermement une grande bannière sur laquelle « 47 raisons d’exiger une voie de contournement » lors du passage du ministre fédéral Christian Paradis.
Ottawa doit « voir tout de suite » à l’aménagement d’une voie ferroviaire de contournement. « Il ne faut pas qu’il y ait une autre tragédie », fait valoir Monique Cloutier, insistant sur le dénivelé de la pente entre Nantes et Lac-Mégantic — « le plus accentué au Québec » — sur laquelle le train fantôme a dévalé, sans opérateur, dans la nuit du 5 au 6 juillet 2013.
« On ne souhaite pas ça à nos pires ennemis. La population mérite d’être protégée du terrorisme [d’affaires] », affirme de son côté Gilles Fluet.
Les compagnies ferroviaires assurant le transport de matières dangereuses ont entre leurs mains des « armes de destruction massive ». « On a connu ça ici », dit-il. Il appelle Ottawa à payer sans rechigner les coûts de construction d’une voie de contournement, plutôt que d’engloutir des milliards de dollars dans l’achat d’avions de chasse et de navires de guerre pour combattre des « ennemis inconnus ». À Lac-Mégantic, « l’ennemi, on le connaît », dit M. Fluet.
Les maires de Montréal, Denis Coderre, et de Québec, Régis Labeaume, n’attendent que l’appel de « Colette » afin de lui prêter main-forte dans ce dossier. Ils ont refusé dimanche d’appuyer officiellement le projet de voie de contournement. « Je ne suis pas maire de la place. [Mais] si Colette nous demande de l’aider, on va l’aider. Elle ne nous l’a pas demandé ! », déclare M. Labeaume. « C’est tout ! », acquiesce M. Coderre, rappelant le prêt de vélos en libre-service Bixi à Lac-Mégantic. « Colette m’avait dit : « On aimerait ça avoir les Bixi. » On a amené les Bixi ! », indique-t-il.
LAC-MÉGANTIC
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