Des votes à l'encan

Élections fédérales - 2011 - le BQ et le Québec



«Je suis notre libération
_ Comme des millions de gens fragiles
_ À des promesses d'élections»
- Claude Gauthier, Le Plus Beau Voyage, 1972
Je ne sais pas d'où ça nous vient, mais au Québec, chaque fois qu'il y a une élection dans la mire, il y a une forte odeur d'encan public qui s'installe dans l'air. Faut-il, comme le chante Claude Gauthier, que nous ayons été si pauvres que les politiciens ont fini par se transformer en Pères Noël chaque fois qu'ils devaient se soumettre à un vote pour entretenir notre foi en une sorte de démocratie au rabais? C'est l'éternel recommencement. Combien vaut mon vote? Combien allez-vous m'offrir pour que je fasse mon X à côté de votre nom?
Je ne sais pas si c'est pareil ailleurs dans d'autres pays dits civilisés, mais je trouve inquiétant pour notre si fragile démocratie qu'il en soit ainsi chez nous. Pour moi, le vote est un outil démocratique qui ne s'achète pas, qui ne se vend pas et qui ne se dépose pas dans n'importe quelle urne. On a la responsabilité comme citoyens de l'utiliser de notre mieux, de s'informer pour se faire une opinion et d'agir ensuite en sachant que l'exercice de cette liberté entraîne forcément des responsabilités qu'on ne peut pas balayer du revers de la main. C'est le seul pouvoir réel qui nous appartient et qui ne devrait pas se monnayer.
Je n'insisterai pas sur le fait que des humains sont morts parfois et que d'autres sont prêts à mourir pour le privilège de s'exprimer comme citoyens. Vous n'avez qu'à ouvrir votre télé aux informations ces temps-ci. Vous savez tout ça déjà. Ça n'a pas empêché quelques-uns d'entre vous, dès qu'il a été clair que nous serions appelés à voter dans les semaines qui viennent, d'affirmer, sourire en coin, que vous n'aviez pas l'intention de vous rendre déposer votre précieux petit X le jour du vote, que c'était de l'argent gaspillé pour rien et que rien ne changeait jamais. Ces réponses me font dresser les cheveux sur la tête. Il sera trop tard pour pleurer quand nous l'aurons perdu, notre droit de vote! Imaginez des leaders qui règnent pendant 42 ans comme en Égypte et davantage encore en Libye, et dites-vous bien que ça pourrait nous arriver aussi. Nous ne sommes pas immunisés.
Ce qui m'horripile en ce moment, c'est de voir les citoyens de la ville de Québec, par exemple, mettre leur vote aux enchères. «Donnez-nous le bonbon que nous désirons et nous allons voter pour vous.» Étrange comportement pour des citoyens fiers et informés. Que nous réclamions du fédéral ce qui nous appartient est une chose. La bataille du Bloc autour des 2 milliards qu'Ottawa nous doit est juste, mais la danse lascive de la capitale du Québec pour séduire le riche client, c'est d'un tout autre ordre.
Il est évident que nous sommes fragiles devant des politiciens expérimentés qui vont nous bombarder de messages préparés par de grands spécialistes des communications. Il est évident que l'équilibre des forces entre ces politiciens et les citoyens n'est pas favorable aux citoyens. Comme il est évident qu'il est finalement un peu déprimant de voter si souvent: quatre fois en sept ans..., nous sommes vraiment gâtés.
Nous développons des stratégies dignes des plus grands stratèges du monde. La réalité, c'est qu'on nous demande de voter dans un pays qui nous est de plus en plus étranger.
Il est évident que le Canada tout entier n'a plus peur de nous. On a beau aboyer très fort, le ROC ne tourne même pas la tête pour voir ce qui nous arrive. Le gouvernement Harper, qui aurait bien besoin d'acheter nos votes québécois n'en fera rien, car le ROC ne lui pardonnerait jamais cette faiblesse. Le rôle d'Ottawa, selon le ROC, c'est de nous dire non. Sur tout. Tout le temps. Et ce n'est pas Jean Charest qui va changer la donne. Les «petits caprices québécois», comme on les appelle dans le ROC ne dérangent plus personne. Ils veulent maintenant nous apprendre à «prendre notre trou». Le pont Champlain peut bien tomber, ça n'empêchera pas le ROC de dormir.
En fait, le Québec ne fait presque plus partie du Canada. Veut, veut pas, c'est une réalité. Il faudrait juste qu'on le réalise pleinement et qu'on cesse d'aller quêter notre pitance en échange de votes qui ne viennent plus du coeur d'aucune façon. Le Québec ne s'est pas séparé du Canada. Le Canada s'est séparé du Québec... On ne l'avait peut-être pas vu comme ça, mais ce n'est pas plus mal. En fait, c'est peut-être plus intéressant.
Ça laisse de la place pour l'imagination, et le fameux «projet d'avenir» que nous appelons de toutes nos forces, c'est peut-être celui-là...


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