Délais d'attente: peu d'amélioration

17. Actualité archives 2007


En avril 2003, beaucoup de Québécois ont sans douté voté pour les libéraux de Jean Charest en pensant qu'ils amélioreraient un système de santé qui croulait de toutes parts. Ceux qui ont quelque mémoire se souviennent que M. Charest avait fait de la santé un des enjeux fondamentaux de la campagne.
Quand on pense à la détérioration du système de santé, les premières images qui nous viennent à l'esprit concernent les horreurs survenues dans les urgences ou dans les centres d'hébergement pour personnes âgées. Il s'agit certes de situations spectaculaires, et les médias en ont fait une source inépuisable d'histoires épouvantables. Or, aussi pénibles puissent-elles être, ces situations ne nous renseignent pas beaucoup sur l'état réel du système de santé.
Les délais d'attente pour avoir accès à une chirurgie constituent un baromètre beaucoup plus fiable. Les délais affectent la vie de dizaines de milliers de personnes. Au Québec, actuellement, près de 200 000 personnes poireautent dans l'anxiété en attendant de voir un médecin spécialiste.
D'autre part, nous disposons d'un outil qui permet de mesurer à quel point les délais raccourcissent ou s'allongent, par province et par spécialité.
Cet outil, c'est l'enquête annuelle de l'Institut Fraser, menée auprès de 2700 médecins spécialistes au Canada. Au Québec, 519 spécialistes ont participé à l'enquête 2006, dont les résultats viennent d'être publiés.
Presque quatre ans après l'élection du gouvernement Charest, où en est donc le système de santé québécois? L'examen des délais d'attente fournit trois nouvelles: une bonne, une mauvaise et une pire.
LA MAUVAISE: Au Québec, il faut attendre plus longtemps que jamais pour voir un spécialiste. Le système de santé québécois (c'est la même chose dans le reste du Canada) fait attendre le patient " en double ". Une fois entre la visite chez le médecin de famille et le spécialiste, et une fois entre la consultation chez le spécialiste et le traitement. En 2003, lorsqu'un omnipraticien québécois référait son patient à un spécialiste, l'attente médiane se situait à huit semaines; aujourd'hui, ce délai est de 10,2 semaines. Une détérioration de 15 jours.
LA BONNE: La période cruciale entre la consultation avec le spécialiste et la date effective du traitement a été considérablement raccourcie. En 2003, le délai d'attente médian avant d'avoir accès à une chirurgie, au Québec, se situait à 10,7 semaines, le plus long depuis la création de l'assurance maladie. Cette année, ce délai est ramené à 8,3 semaines, le plus court en sept ans.
Autrement dit, les patients en ont pour 17 jours de moins à attendre. L'amélioration est d'autant plus remarquable que les chiffres correspondants, pour l'ensemble du Canada, font du surplace: le délai médian est passé de 9,5 à neuf semaines pendant la même période.
Voilà certainement une bonne note à placer au crédit du système de santé québécois. Si on tient compte de la double attente, il y a donc eu légère amélioration. Au total, en 2003, entre le médecin de famille et la chirurgie, les Québécois attendaient 131 jours; aujourd'hui, c'est 129 jours. C'est à peine si on peut voir la différence. Le bon côté des choses, c'est que l'amélioration s'est surtout faite sentir dans les semaines les plus anxiogènes, celles qui précèdent l'intervention.
LA PIRE NOUVELLE: La relative amélioration des trois dernières années masque un véritable drame. Sur une période plus longue, la dégradation du système québécois de santé tient du cauchemar. Nous avons vu que le temps d'attente médian, cette année, se situe à 18,5 semaines, ou 129 jours. Or, en 1993, le délai correspondant n'était que de 7,3 semaines.
Il y a à peine une douzaine d'années, lorsque son médecin de famille lui annonçait qu'il devrait consulter un spécialiste, le patient québécois pouvait prévoir une attente de 51 jours seulement avant d'avoir accès à une chirurgie.
Au rythme où les choses s'améliorent, il faudra encore 52 ans avant de retrouver un tel niveau! Nous devrons être patients, c'est le cas de le dire. Les Québécois peuvent toujours se consoler en pensant que le délai d'attente médian, dans l'ensemble du Canada, se situe à 17,8 semaines. À quelques poussières près, les délais québécois soutiennent donc la comparaison.
Il existe cependant d'importantes variantes selon les provinces. Au Nouveau-Brunswick, la province avec le pire dossier, le délai médian frise maintenant les 32 semaines, niveau carrément inacceptable dans un pays riche. Dans certaines spécialités, les chiffres sont épouvantables: le patient néo-brunswickois doit attendre 47 semaines en ophtalmologie, 62 semaines en neurochirurgie, 63 semaines en orthopédie et 70 semaines en plastie.
Au Québec, les chiffres correspondants, pour les mêmes spécialités sont de 30, 37, 33 et 27 semaines. Comme quoi, quand on se compare... Enfin, le Québec est loin d'être le seul endroit où le système se détériore.
Depuis 1993, les délais d'attente ont augmenté fortement dans toutes provinces, y compris les plus riches comme l'Ontario et l'Alberta, et dans toutes les spécialités, sauf la chirurgie cardiovasculaire.


Laissez un commentaire



Aucun commentaire trouvé