De Pauline à Koivu

La réalité, c’est que Pauline Marois est bilingue, mais qu’elle n’a pas atteint le niveau de bilinguisme qui lui permettrait d’être à l’aise en anglais.

Citoyenneté québécoise - Conjoncture de crise en vue


Faut-il être bilingue pour devenir premier ministre du Québec? Le sujet passionne les chroniqueurs, les caricaturistes et même les humoristes depuis que Pauline Marois occupe la direction du PQ.
C’est bizarre, tout de même : on tolère l’unilinguisme de ministres anglophones au Parlement canadien, une institution bilingue, et on exige des leaders souverainistes qu’ils soient bilingues. Un visiteur étranger y perdrait son latin.
Pauline Marois, elle, a perdu patience il y a deux semaines. Elle a déclaré qu’elle en avait «un peu ras le bol de cette question-là». En toute justice, il faut convenir que son anglais n’est pas aussi mauvais que les caricatures ou les extraits diffusés sur YouTube le laissent croire. D’ailleurs, la transcription des conférences de presse d’un autre ministre, Yves Séguin, montre que l’anglais de Mme Marois se compare avantageusement à celui de M. Séguin. Par exemple : «We decide not increase any tax for taxpayer», a dit M. Séguin en décembre 2003. Admettez que c’était plutôt «primaire» comme structure de phrase et ordinaire en grammaire.
La réalité, c’est que Pauline Marois est bilingue, mais qu’elle n’a pas atteint le niveau de bilinguisme qui lui permettrait d’être à l’aise en anglais. La question est donc de savoir si elle peut représenter efficacement le Québec dans un univers nord-américain anglophone. Ceux qui ont côtoyé la «ministre» Marois dans ses rencontres passées avec ses homologues des autres provinces affirment que oui. Elle a même déjà prononcé un discours en anglais à New York.
Mais la pression est plus forte lorsqu’on devient chef de parti ou premier ministre. Sur la scène internationale, certains leaders insistent pour communiquer dans leur langue maternelle, même s’ils connaissent l’anglais. Mais dans le feu de l’action, la connaissance des langues est un outil de communication essentiel. Lire un discours, c’est une chose, mais convaincre ses interlocuteurs dans un débat complexe comme la péréquation ou les réformes constitutionnelles, c’en est une autre. Or, qu’on le veuille ou non, c’est en anglais que ça se passe lorsqu’un premier ministre du Québec rencontre ses homologues des provinces, les gouverneurs des États américains et la plupart des visiteurs étrangers.
À l’Assemblée nationale, on pourrait croire que l’utilisation de l’anglais n’est pas nécessaire, mais ce n’est pas le cas. Chaque fois que les politiciens font un point de presse, la dernière portion est consacrée à la presse anglophone. C’est une routine bien établie à Québec, contrairement au Parlement d’Ottawa où les francophones, minoritaires, doivent jouer du coude pour poser leurs questions.
Plusieurs médias anglophones sont représentés à la tribune de la presse de l’Assemblée nationale. On y trouve des représentants du Globe and Mail, de la Gazette, de Can West, de la CBC, de CTV, de Global et de CJAD. Tous sont bilingues, mais la présence des médias électroniques commande des «clips» en anglais. Certains élus, dont Nathalie Normandeau ou Julie Boulet, sont incapables de le faire, mais c’est un handicap dans un monde aussi dépendant des communications que la politique.
On mange en anglais au repas du soir, dans la résidence familiale du couple Marois-Blanchet, à l’Île-Bizard. Ça va durer longtemps si Mme Marois veut diriger le Québec, parce que les exigences sont beaucoup plus grandes à l’endroit d’un premier ministre que d’un Saku Koivu. «Passe la puck», même Koivu comprend ça, sur la patinoire. Mais le jargon des politiciens, c’est beaucoup plus complexe, surtout quand il leur faut patiner comme Koivu pour marquer dans le but adverse.
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