À propos du mensuel québécois VOIR

De la Mollesse intellectuelle

Lettre ouverte

Tribune libre


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Sujet : Le mensuel québécois / Août 2016
[Lettre ouverte->jepenseque@voir.ca]

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1) Y a-t-il quelqu’un au sein de l’équipe de Voir pour «informer» M. Mickaël Bergeron (p.28-29 de la version imprimée) que si les Franco-Canadiens célèbrent la Saint-Jean-Baptiste (syntagme répété au moins à quatre reprises dans son article), les Québécois, en revanche, eux, commémorent la Fête nationale du Québec. Et ce, depuis 1977… Or si d’aventure M. Bergeron se perçoit comme un «Canadien Français», ceci expliquant alors cela, il serait séant et courtois de sa part, il me semble, de ne pas imposer son éloge implicite et "auto-content" du rapetissement provincialeux à l’ensemble des lecteurs du mensuel. À cet égard, je lui suggérerais la lecture de cette courte réflexion publiée chez Vigile. Ça remettrait peut-être les yeux en face des orifices. Ce qui m’amène illico au point suivant.
2) Le terme Province renvoie par définition (tout Québécois lucide, instruit et informé le constate d'emblée d'ailleurs, chaque jour de son existence), à un territoire administratif sous domination d’une puissance étrangère: «Province. Du latin Provincia: Dans l’Antiquité, pays ou territoire conquis par Rome hors de l’Italie et gouverné selon les lois romaines ». Aussi, utiliser ce vocable dans le contexte québécois signifie, de deux choses l’une, ou bien que l’auteur (ou l’entreprise, ou le média, etc.) est investi d’une culture qui ne dépasse guère celle de l’adolescent-type (ce qui du coup le dispose tout naturellement à utiliser des termes dont il ne saisit pas véritablement le sens: il faut dire que même le nouveau directeur du Devoir n'y échappe pas, hélas...), ou bien qu’il cherche, comme chez Gesca / La Presse, par exemple, à promouvoir une vision inféodée, pour ne pas dire dégradante, du Québec. Anesthésiante, au mieux. En conséquence, demandez-vous donc, gens de Voir, si, dans le cadre de la promotion de votre Guide Restos (p. 58), vous faites naître chez moi le désir de me procurer ce dit Guide portant, et je cite, «sur plus de 600 établissements à travers la Province»…?
3) Pourquoi (p. 39 et 41) un tonic plutôt qu’un tonique? Pour faire au moins aussi colonisé que la France??? Qui, en effet, métamorphose désormais presque toutes les finales en -que en -c. Pour faire bien américain. Bien entendu. American Music comprise.
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Je m’en tiendrai là. Convaincue que la liste de mes doléances serait beaucoup plus longue… si j’avais effectivement lu l’exemplaire en bonne et due forme. Mais d’une édition à l’autre, depuis le printemps, je me vois constamment buter sur ce type de faiblesse rédhibitoire. Constamment, et presque à chaque page. Alors, histoire de ne pas me mettre en rogne une fois de plus en vous lisant, je me suis contentée, cette fois-ci, de parcourir le Voir d’août 2016 en coup de vent.
Or même ce parcours, qui n’aura pas dépassé les 120 secondes, m’aura permis de repérer au premier coup d'oeil ces «irritants» signalés à l'instant.
Qui, à force de se répéter, en continu, m’auront, à la fin, et définitivement, enlevé tout désir de procéder à une véritable lecture de Voir.
À l’exemple de cette dame, sans doute, qui ne vous aura pas épargné (non plus) dans l’édition de Juillet/Août 2016 du mensuel L’Aut’ Journal, dans un texte au titre parfaitement représentatif de mon propre sentiment: «L'Aliénation tranquille»!
Dommage. Car, sincèrement, j’aimerais… vous aimer.
Mais pareille mollesse intellectuelle d’un couvert à l’autre (une Monique Giroux ou un Normand Baillargeon ne suffisent pas pour sauver les meubles, nonobstant la plume sympathique, il est vrai, du rédacteur en chef) - vous m’en voyez désolée - c’est trop, mais vraiment trop, pour mon petit coeur de femme… transi par le désir de beauté, d’intelligence, de pertinence et de culture.
De dignité aussi: la Provincialite aiguë (maladie mortelle du colonisé québécois), à l'instar de madame Morgane, je n’en peux tout simplement plus. Non plus.
Cela dit, sans exiger la lune pour autant (Voir n’est pas un périodique spécialisé, je n’en disconviens pas). Mais un minimum, quoi.
Espérant tout de même, quoique modestement, gens de Voir, faute de vision (du moins jusqu'à nouvel ordre, si tant est), que la présente réflexion vous sera utile en quelque manière, je vous salue.
Cordialement


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2 commentaires

  • Archives de Vigile Répondre

    10 août 2016

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    Aliénation tranquille...
    et Placement de produits
    ???
    '
    Je partage totalement l’opinion de madame.
    Je devrais dire: Mesdames (Morgane et Chenonceau).
    J’éprouve également depuis longtemps tous ces «malaises» à la lecture du Voir.
    Et j’espérais vivement un renouveau de fond, et pas uniquement cosmétique, à la faveur de la nouvelle empreinte du magazine depuis le printemps dernier.
    On sent beaucoup de bonnes intentions, certes.
    Mais le souffle n’y est pas. Ni une solide culture.
    À vrai dire, ça fait plutôt journal étudiant.
    Nonobstant deux ou trois plumes moins faibles.
    Je termine sur un détail. Qui hélas, n’en est pas un.
    Voici. Il y a toujours des textes dans ce mensuel qui ressemblent fort à ce que l’on appelle du «placement de produits». L’articulet portant sur le fameux «Tonic» (sic) participe de cette forme, il me semble. Et ça se répète.
    À cet égard, il faudrait que Voir annonce une politique claire auprès de son lectorat.
    Car se «faire passer» de la Pub pour de l’information (pro-consommation qui plus est), ce ne me semble pas très honnête.
    Ni transparent.
    Bref, l'inoculation d'une solide dose de professionnalisme dans ce Voir gratifierait ce magazine d'une crédibilité intellectuelle que, sincèrement, je lui souhaite.
    Reste que je ne suis pas sans être étonné, et beaucoup, qu’après un quart de siècle d'expérience on n’y est toujours pas…
    Dommage.
    Car ce serait tellement agréable, après lecture, de se dire qu'on n'a pas totalement, ce faisant, perdu son temps.
    Merci.

  • Ouhgo (Hugues) St-Pierre Répondre

    8 août 2016

    Saluons cette noble démarche. Sans être naïfs.
    Car nous sommes redevenus "une province". Même à travers l'effort de changer les plaques des voitures de "La belle province" en "Je me souviens", les "distraits" ont été maintenus dans ce vocabulaire par l'omniprésente chaîne de friteuses: "La Belle Province".
    Plus récemment, un tsunami "provincial" nous a frappés à travers les miss météo, les meilleurs lecteurs de nouvelles, les grands éditoriaux, comme il est signalé dans l'article.
    On constate que l'ennemi s'était fait discret dans la première décennie post matraque référendaire, pour ne pas paraître s'acharner, mais maintenant que nous avons adopté un comportement de "commotionné cérébral", on nous assène le grand coup, pour nous décérébrer complètement.
    Est-ce ainsi qu'on procède en général pour liquider une nation?