De belles résolutions

Lorsque l'indifférence pèse plus lourd que l'indignation, c'est là que le système dérape.

Les incrédibles...



(Québec) Le début de novembre a tout d'un début de janvier avec son lot de résolutions. Resserrement de l'attribution des contrats du gouvernement et des municipalités, code d'éthique pour les élus municipaux, consultation afin de revoir le financement des partis politiques, grand ménage promis à Montréal. Les bonnes intentions abondent. Reste à voir comment elles prendront forme, comment elles seront appliquées et comment elles résisteront au temps. Bref, la durée de vie des résolutions du 1er novembre sera-t-elle plus longue que la durée de celles du 1er janvier?
Quelques heures à peine après la tenue des élections de dimanche, ministres et élus municipaux prennent la parole pour dire que tout ira mieux dans l'avenir. Derrière soi l'époque des contrats refilés à l'entrepreneur qui a financé sa campagne électorale. Finis le blanchiment d'argent et le temps où une poignée d'entreprises se partageaient de lucratifs contrats. Terminée la collaboration fonctionnaires-entreprises lors d'appels d'offres. À l'avenir, les délinquants n'échapperont pas à la justice. Dorénavant, la rigueur, la probité, la saine concurrence et le respect des règles seront au rendez-vous.
Y croyez-vous? Avez-vous le sentiment que Gérald Tremblay, Laurent Lessard, Monique Gagnon-Tremblay, Claude Béchard, Jacques Dupuis, Robert Dutil et Sam Hamad vont tenir davantage parole que votre beau-frère qui promet année après année qu'il cessera de fumer et qu'il entamera un entraînement sportif?
Ces dernières semaines, le gouvernement Charest multiplie les annonces pour indiquer qu'il prend les choses au sérieux et qu'il compte décourager et pincer ceux qui déjoueront les règles établies. «Coïncidence» extraordinaire, la Sûreté du Québec arrêtait hier 10 personnes du milieu de la construction.
Pour l'opposition péquiste, l'agitation du gouvernement n'est qu'un écran de fumée visant à faire oublier qu'il refuse de tenir une vaste commission d'enquête. C'est de bonne guerre. Or, il y a fort à parier qu'à la suite d'une enquête publique, on en viendrait à la conclusion que le processus d'octroi des contrats et que le financement des partis politiques doivent être revus. On jugerait aussi opportun de mieux indiquer aux élus les pièges qui les guettent s'ils fréquentent de trop près certains entrepreneurs. Probablement qu'on s'entendrait aussi sur la nécessité de resserrer les mécanismes de contrôle dans les municipalités et les ministères pour s'assurer que les fonds publics sont bien utilisés.
Commission d'enquête ou pas, le gouvernement Charest doit présenter des résultats tangibles au cours des prochains mois s'il ne veut pas traîner sa décision comme un boulet et en payer le prix politique. Il doit dépasser le stade des pieuses intentions.
Avec la nouvelle politique de gestion contractuelle présentée par Monique Gagnon-Tremblay, Québec exigera que ses ministères et organismes prennent des mesures pour lutter contre le truquage des offres, les ententes préalables entre soumissionnaires et le trafic d'influence. Quel suivi sera fait de ces mesures? Avec les compressions budgétaires prévues dans les ministères, il est à craindre que le contrôle sera lâche si la volonté politique est faible.
Les élus ont des devoirs à compléter pour rassurer le public. La population doit aussi faire les siens et faire preuve de cohérence. On ne peut un jour se dire indigné par la corruption dans le milieu municipal, réclamer fortement dans un sondage une commission d'enquête publique, et rester bien assis chez soi le jour du scrutin. À Montréal, ce prétendu Palerme ou Naples d'Amérique du Nord, seulement 38 % des électeurs ont cru bon aller voter dimanche.
Lorsque l'indifférence pèse plus lourd que l'indignation, c'est là que le système dérape.


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