Courchesne à la rescousse

Pour paraphraser une émission très populaire, c'est «la question qui tue».

L'affaire des CPE



(Québec) Il fallait que le gouvernement Charest soit bien embarrassé par l'histoire des garderies pour passer outre, mercredi, à la règle qui veut que ce soit le ministre responsable qui réponde aux questions concernant son ministère. C'est l'ancienne titulaire du ministère de la Famille, Michelle Courchesne, qui s'est levée la première en Chambre pour justifier l'octroi des permis de garderie à des donateurs du Parti libéral, en 2008. Mme Courchesne a crié au salissage et a soutenu que l'octroi des permis avait été effectué avec rigueur, sans ingérence politique.
Le cri du coeur de la ministre aurait eu plus de crédibilité s'il n'avait pas été lancé par la même personne qui s'est ingérée dans le programme de création de trois nouveaux centres collégiaux de recherche et de transfert à l'été 2008. Malgré des critères de sélections supposément apolitiques, la ministre avait donné sa préférence au Cégep de Victoriaville, dans une circonscription libérale, aux dépens du Collège de Rosemont, situé dans la circonscription de la péquiste Louise Beaudoin. Pourtant, c'est Rosemont qui avait la meilleure note.
Retour aux garderies : ce n'est pas tellement la possibilité d'une ingérence politique qui est le plus troublant dans cette affaire. Les politiciens sont élus pour gouverner, et leurs interventions sont parfois normales et même souhaitables pour corriger certaines aberrations de la bureaucratie. Ce qui surprend dans le cas des garderies, c'est de voir des promoteurs ou des administrateurs, qui n'avaient jamais contribué à la caisse électorale du parti au pouvoir, ouvrir tout à coup leurs goussets pour le PLQ. Les collecteurs de fonds du parti auraient-ils fait la tournée des bénéficiaires de ces nouveaux permis afin de solliciter des dons? Ce ne serait pas surprenant, dans un monde où même les fondations de certains hôpitaux sollicitent leurs anciens patients.
L'histoire des garderies me rappelle les confidences d'un ancien ministre d'un autre gouvernement qui avait révélé, sous le sceau de la confidentialité, avoir été scandalisé lorsque le chef de cabinet du premier ministre lui avait demandé la liste des contrats accordés par son ministère. Le but de la demande : transmettre la liste aux collecteurs de fonds du parti afin de solliciter des dons auprès des bénéficiaires des contrats.
La pratique existe-elle encore? Difficile à dire. Mais elle soulève des questions éthiques et même légales dans un monde où les personnes morales, c'est-à-dire les compagnies, n'ont pas le droit de financer les partis politiques.
Dans le cas des garderies, ce sont les promoteurs ou les administrateurs qui ont versé de l'argent au Parti libéral. C'est donc tout à fait légal. Mais s'ils ont été collectés après avoir obtenu leurs permis de garderie, les contributions financières prennent alors l'allure d'un remerciement de l'entreprise pour faveurs obtenues. Ça reste légal, mais c'est difficilement acceptable sur le plan éthique.
Si tel est le cas, voilà une situation qui devrait intéresser le Directeur général des élections et un éventuel commissaire à l'éthique.
À court d'arguments, le ministre de la Famille, Tony Tomassi, a accepté mercredi de dévoiler les évaluations des fonctionnaires pour toutes les demandes de permis de garderie afin de démontrer qu'il n'y a pas eu d'ingérence politique. C'est un pas dans la bonne direction, mais qui ne répondra pas à l'autre question : pourquoi ces gens ont-ils soudainement ressenti un besoin aussi pressant de contribuer au financement du Parti libéral du Québec?
Pour paraphraser une émission très populaire, c'est «la question qui tue».


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