L’intéressante conversation que j’ai eue avec la directrice de la Fondation pour l’alphabétisation Mme Diane Mockle, récemment, m’a permis de me poser des questions fondamentales.
En effet, les Québécois qui tendent à promouvoir un certain affranchissement collectif, doivent se demander si la culture générale de la population n’est pas en quelque sorte une condition facilitatrice de l’action libératrice. Il n’y a pas de vraie liberté dans l’ignorance !
La Fondation, dans son bureau bien organisé de la rue Saint-Laurent et avec sa jeune équipe, justement, s’efforce de combattre pour la vérité et la pensée en distribuant aux enfants de la nation, quelque 37,000 livres par année (des dons) afin de hausser le niveau de la connaissance. Les bureaucrates appellent cela la lutte pour hausser «le niveau de litératie».
Cette aventure a évolué à partir des programmes de tutorat effectués par les communautés religieuses, jadis, explique Mme Mockle, programmes maintenus par la suite par les Commissions scolaires. Ce sont «les mots d’espoir» comme le dit le slogan de la Fondation qui pourront permettre de créer l’habitude de la lecture, habitude qui pourra même rejoindre les adultes.
Mme Mockle précise les choses. La fondation n’est pas le seul organisme à combattre ainsi pour l’ouverture de l’esprit. Il y aurait ainsi quelque 160 organismes, qui oeuvrent en ce domaine de l’alphabétisation chez nous. Sans compter l’Association des parlementaires du Québec qui distribue des lots de 20,000 livres dans les pays en développement - qui le demandent – et dont les bureaux se trouvent aux Archives du Québec, rue Viger)…
Mais alors les jours de la lecture et de la riche culture générale s’annoncent-ils paradisiaques, ici même dans notre société d’abondance? Pas tout à fait. Mme Mockle regrette justement que notre société soit devenue beaucoup trop «utilitariste». C’est-à-dire que les idéalistes comme moi, qui rêvent au rétablissement de la société humaniste, et au maintien de la «pensée intégrée» telle que proposée par l’enseignement classique et les Belles-Lettres, auront des réveils brutaux. «Ces temps-là ne reviendront plus» dit-elle.
La directrice en veut pour preuve, entre autres choses, le fait que le Ministère de l’éducation (du Québec évidemment) n’a pas de programme de formation continue pour les éducateurs. Dans cet ordre d’idées, le programme «non-utilitaire» d’histoire de la politique sociale, a été éliminé, et le reste. Somme toute, le niveau de culture générale, chez nous, est «pauvre». Notre société n’est pas reliée «aux valeurs fondamentales» et son rapport au temps et à l’espace est fort limité.
Faut-il rappeler que sur l’échelle dite «de litératie» comprenant 5 niveaux, échelle établie par l’organisme international EIACA, 49 p. cent des Québécois se trouvent aux niveaux 1 et 2, les plus bas. Cela veut dire que ces gens ont une faiblesse au niveau de la lecture, tant et si bien qu’ils ont de la difficulté à comprendre un titre de journal! Cela n’est pas une raison de désespérer, indique Mme Mockle, pourvu que nous tenions compte de la réalité.
Il y a donc du travail à faire. Et des moyens à trouver pour motiver M. et Mme tout le monde. Notre société n’a pas encore fait d’enquête pour établir quelle est la proportion des citoyens qui ont des bibliothèques privées à la maison, bibliothèques qui mériteraient ce nom. Mais il est certain qu’ils ne sont pas très nombreux. Les «monster houses» de Brossard et d’ailleurs ne sont pas réputées pour cela.
A mon avis personnel la poursuite de nos objectifs d’affranchissement collectif sera facilitée par la prise en compte du niveau culturel et par une action pour en hausser le niveau. La démocratie et la liberté ne sont pas facilement réalisables dans l’indigence intellectuelle. Cela voudrait dire que nous poursuivons nos objectifs d’affranchissement tout en luttant pour la propagation des valeurs fondamentales.
Il m’est arrivé ces jours derniers, d’appuyer une demande, faite par des citoyens (de la base) habitant un quartier peu favorisé d’Abidjan, d’obtenir des livres de culture générale. J’ai vu l’ardeur du désir, en ce cas, d’avoir accès aux connaissances. Cette volonté d’avoir accès aux faits et à la pensée s’oppose à celle de ceux qui « ne veulent rien savoir ».
L'indépendance se fait d'abord dans les têtes
Comment faciliter l’affranchissement
Réduire le nombre de de ceux qui « ne veulent rien savoir ».
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7 commentaires
Archives de Vigile Répondre
25 juin 2013@maro,
Vous connaissez mes fantasmes mieux que je ne le saurais.
Cela me rappelle quelque chose, mais bon, c'est vous le meilleur qui fait tout bon pour la Grande Cause de l'Humanité.
Nous les Créoles, ne saurions dépasser ceux de l'Hexagone.
Pardonnez nos idées brutes et rustres.
Je corrigeais votre mot car l'interprétation est confondante.
Alain Maronani Répondre
24 juin 2013@Dery,
Je connais vos fantasmes raciaux et autres...
Il ne s'agit pas de génétique....mais de sociologie.
Inscrivez-vous a un cours 101 de socio.
Archives de Vigile Répondre
24 juin 2013Côté journaux, j'ai brisé un abonnement gratuit en 1996 à l'Agacette pour protester contre un éditorial-caricature. Le Devoir n'a plus la même mission que du temps de ma grand-mère abonnée. Le JdeMtl reflète peu mes intérêts.
Bref, je consulte les versions Web ou de la bibliothèque locale. Tout journal est un filtre de nouvelle et remplit à certains degrés une mission de propagande au-delà de la vente de savon ou de voiture.
Je suis sur plusieurs fora ou blogues de discussions qui réfèrent à des journaux d'un peu partout dans le monde. Les traductions aident à voir différentes perspectives, parfois radicalement différentes de celles offertes localement. Et fouiller les faits, c'est ce que j'ai pu faire sur différents sujets qui me mettent en opposition à la Pensée Uniforme. D'où l'odeur sulfureuse que je dégage.
À vrai dire, je dois remercier plusieurs personnes qui m'ont allumé sur certains discours acceptés trop complaisamment.
Je doute que l'on puisse rendre une nation entière intellectuellement indépendante. Par contre les individus peuvent le devenir.
Archives de Vigile Répondre
24 juin 2013"La pauvreté et l’analphabétisme sont avant tout héréditaires." --- Maronani
C'est dangereux ce que vous écrivez. Vous placez le problème au niveau de la génétique. Pour ma part, j'écrirais "environnemental", bien que des cas de caractères peuvent être attribués à la génétique. De même que certaines maladies mentales.
Faut-il avoir une bibliothèque personnelle chez soi ? La culture livresque, c'était jadis surtout la culture des Protestants puisque la maîtrise personnelle de la Bible est importante pour eux. Les Catholiques déléguaient cette tâche au curé et se fiait à son interprétation. D'où les écarts en littératie entre le Québec et le reste du Canada.
L’Instruction Publique s'est amélioré avec la création du Ministère de l'Éducation. Néanmoins, il est difficile de motiver un jeune à l'effort d'apprendre, si ses parents ouvriers ne sont pas passés par le même moule. La cause familiale aurait dû régresser, mais le moule a changé au fil des réformes succédant aux réformes. Notre Ministère de l'Éducation est devenu celui de l'éducation, du sport et des loisirs. Pour un parent, il est peut être plus important de voir son fils réussir au hockey qu'en lecture ou calcul.
Une bonne partie de la population montréalaise est d'origine étrangère. Pour les familles dont les parents travaillent en manufacture, ont-elle une culture du livre plus développée ? On pourrait en douter si la famille est Latino pour cause d'Église Catholique. Et s'il est difficile de bien franciser les parents, alors la littératie francophone des enfants est difficile à développer. Le facteur immigration joue sur les chiffres.
Aussi, une comparaison avec l'Ontario se fausse parce que l'Ontario est unilingue anglaise dans la pratique éducative et de l'emploi. Tandis que nos immigrants font face au dilemme de choisir entre le français ou l'anglais pour la réussite des enfants, malgré la Loi 101.
L'environnement informationnel a beaucoup évolué. Si les livres étaient les dépositaires exclusifs de l'information, maintenant, c'est l'audiovisuel. La calculatrice a engendré la paresse au niveau du calcul mental ou sur papier. Maintenant les jeunes disposent de iPad et de SmartPhones.
Ils se fient aux correcteurs de texte intégrés. Il ne faut pas que j'ébruite ma rencontre avec des traducteurs électroniques chinois-anglais de poche à Pékin.
Dans ma jeunesse, j'avais commencé à collectionner des livres. Mes parents m'ont vite abonné à la bibliothèque municipale pour sauver des sous. Ma petite bibliothèque consistait de quelques étagères. Maintenant, ce sont surtout des livres de Maths, de Physique, d'Informatique et quelques dictionnaires. Mes livres de jeunesse furent donnés à des familles dans le besoin pour faire de la place.
J'ai encore des livres stockés dans des caisses de cartons. Jadis nomade, maintenant plutôt fixe, je ne cherche plus à collectionner les livres autrement que dans la forme numérique. C'est plus facile à fouiller, à répertorier ou à faire du copie-collé.
Pierre Cloutier Répondre
23 juin 2013Non l'indépendance se fera pas les urnes ou ne se fera pas. Pour cela, il faut avoir des leaders qui ont le courage minimal - je dis bien minimal - de mettre le pays sur la table de façon claire, franche et précise comme Jean Lesage et René Lévesque l'ont fait lors de l'élection de 1962.
Avec votre méthode, on en a pour 150 ans...
Pierre Cloutier
Alain Maronani Répondre
22 juin 2013Je travaille avec cette fondation au Salon du Livre...fréquenté principalement...a l'exception des écoles, par ceux qui peuvent lire...
Je fais également de l'alphabétisation avec une autre organisation.
La pauvreté et l'analphabétisme sont avant tout héréditaires.
50 années après le rapport Parent, la moitié de la population québécoise est en situation d'analphabétisme fonctionnel.
C'est un échec dramatique.
Le budget du ministère de l'éducation est le deuxième en importance derrière celui de la santé.
Nous n'obtenons pas ce que nous devrions récolter de ces budgets immenses.
Nous avons 16 commissions scolaires, l'Ontario, avec 2 fois plus de population en a quatre...
Une remise en cause fondamentale du système d'éducation, de son organisation, etc, est indispensable, pas des structures supplémentaires, des commissions, etc...
Yves Rancourt Répondre
22 juin 2013Monsieur Bonhomme,
Oui, vous avez bien raison, l'alphabétisation, l'éducation et la lecture sont les premiers pas de l'affranchissement. Mais, il faut également aller au-delà de ces premiers pas car, entre autres choses, la propagande et la désinformation agissent aujourd'hui avec une telle puissance sur le cerveau humain que même ceux qui détiennent une formation universitaire peuvent se faire avoir facilement. Selon vous, combien de gens dans nos sociétés modernes et éduquées vont remonter aux sources ou données officielles pour vérifier le fondement de présumés faits évoqués dans un article de journal ou un documentaire passé à la télé? Ou encore pour dresser eux-mêmes le bilan d'un gouvernement plutôt que de se fier pleinement au bilan fait par un quelconque chroniqueur? Bien peu si je me fie aux gens autour de moi, pourtant tous bien éduqués.
Noam Chomsky, ce célèbre analyste des médias, disait un jour que, "si nous avions un vrai système d'éducation, on y donnerait des cours d'autodéfense intellectuelle". Il faudra, de mon humble point de vue, aller jusques là si l'on veut réellement s'affranchir un jour. Et, au Québec, c'est peut-être plus vrai qu'ailleurs.
Mes salutations à vous.